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De Bienne à Vevey, la vie, la mort, l’extase

Morte? Vivante? Extatique? A Vevey, Cristina Garcia Rodero s’intéresse au vaudou. Cristina Garcia Rodero

«De la vie à la mort - de la mort à la vie», annoncent les Journées photographiques de Bienne. «Emporte-moi!» répond en écho le programme d’«Images’04» à Vevey, sous-titré «Extase, possession et autres transports».

Les deux manifestations se sont ouvertes vendredi et dureront jusqu’au 26 septembre.

Les festivals photographiques ont parfois la thématique ambitieuse. Et vaste surtout. Ainsi les Journées photographiques de Bienne qui, durant trois semaines, déclinent le photo-reportage à travers le titre «De la vie à la mort – de la mort à la vie». Ce qui, d’un pole à l’autre, on s’en doute, ouvre toutes les possibilités…

Répartis sur 11 lieux, de la galerie au musée en passant par le restaurant ou le café, ce sont 26 artistes suisses et européens qui sont exposés.

Selon les organisateurs, le photo-reportage est de plus en plus exclu de la presse écrite. Or, il n’a rien perdu de son actualité, il bénéficie même d’un regain d’intérêt – à Bienne donc, de le démontrer.

Du mariage à l’exécution

Perçu comme un important symbole de vie, le mariage est évoqué à travers la démarche de plusieurs artistes. Ainsi la Bernoise Stöh Grünig immortalise-t-elle des ‘Mariages de rêves’. La Bâloise Tanja Schmidlin fixe quant à elle des ‘Mariages turcs’.

Un autre Suisse alémanique, Markus Bühler, a focalisé son objectif sur la trajectoire d’un couple de nains, reportage qui culmine le jour de leur union. Cela donne ‘Short people – le plus beau jour de leur vie’.

Décidément branchés union sacrée, les organisateurs associent la population locale à l’événement: une centaine de photos d’habitants de Bienne et des environs sont ainsi projetées dans le cadre de cette exposition thématique consacrée au mariage. Une façon de valoriser un ‘genre’ photographique souvent moqué.

Mais la vie se décline aussi à travers d’autres approches…Ainsi les ‘Femmes volantes’ du photographe-musicien Marc Latzel, qui s’est intéressé à ces Iraniennes qui n’ont pas le droit de danser ni d’entrer dans un stade de football, mais ont obtenu celui de voler en parapente… Ou les relations homme-chien pour Franca Pedrazzetti. Ou les affabulations du roman-photo pour Jérémie Gindre.

A travers un hommage à Werner Bischof, reporter et photographe de presse décédé il y a 50 ans, la vie prend d’autres couleurs. Le public peut découvrir ou revoir son reportage sur la famine en Inde en 1951, réalisé pour la célèbre agence Magnum, un reportage qui fut publié dans le magazine «Life».

A Bienne, la mort est parfois métaphorique. Avec par exemple le passé industriel et horloger de la ville, illustré dans ‘Il lungo addio’(‘le long adieu’), une exposition conçue par Dieter Bachmann qui retrace l’immigration italienne en Suisse après 1945.

Et puis il y a la vraie mort, sans distance ni rémission, avec par exemple ‘Journal d’une exécution’ du photographe lucernois Fabian Biasio. Il a suivi une femme qui accompagnait les derniers jours de son frère condamné à mort aux Etats-Unis. Bienvenue à Huntsville, Texas.

L’extase, mais quelle extase?

Au lieu de choisir un thème immensément large et d’exposer un éventail de sujets qui peuvent s’y rapporter, «Images 04», à Vevey, a opté pour une démarche inverse: choisir un mot apparemment univoque – l’extase – pour en dévoiler son inattendue polysémie.

«Extase: Etat dans lequel une personne se trouve comme transportée hors de soi et du monde sensible», rappelle le site Internet de la manifestation.

Un phénomène qui mêle le sacré et le profane, la spiritualité et la sexualité, «un instant où l’homme est sublimé, un instant où les liens qui le retiennent à la réalité et à son corps s’effacent, un instant qui se fait voyage vers l’inconnu ou vers l’au-delà», disent les organisateurs.

Parmi les expositions monographiques, celle de l’Espagnole Cristina Garcia Rodero, axée sur le vaudou haïtien, celle du Français Antoine d’Agata, qui a fixé le chaos des nuits chaudes aux Canaries, ou les interrogations de la Suissesse Nathalie Rebholz sur la folie et la fuite par l’imaginaire.

Original: le Suisse Istvan Balogh a demandé à des personnes rencontrées dans la rue de jouer et de mimer l’extase («Out and Out»). Un peu «Quand Harry rencontre Sally» en version helvétique, en quelque sorte.

A noter également plusieurs expositions collectives. Ainsi «eXtase», qui «questionne les œuvres actuelles qui oscillent entre obscénité et théâtre de l’intime» ou «ActionnismeS», sur la performance artistique, qui occupe dès les années 50 une place prépondérante dans les manifestations artistiques.

Dix lieux d’exposition, mais aussi vingt programmes cinématographiques, en salle et en plein air, car «Images’04» joue de l’image fixe et de l’image en mouvement. Les deux approches sont d’ailleurs soulignées à travers deux concours, le ‘Grand prix européen des premiers films’ (doté de trois prix de 10’000 Euros) et le ‘Grand prix international de photographie’ (20’000 Euros).

swissinfo, Bernard Léchot

«De la vie à la mort – de la mort à la vie», à voir dans le cadre des 8èmes Journées photographiques de Bienne, du 3 au 26 septembre 2004.
«Emporte-moi! – Extase, possession et autres transports» à voir dans le cadre d’«Images’04» à Vevey.

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