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Expo.02: P

P, comme Pipilotti, un nom qui aura marqué la genèse d'Expo.02. SP/Expo.02

L'abécédaire d'Expo.02: P comme Pays des Trois-Lacs ou comme... Pipilotti. Quelle image en gardent Nelly Wenger, Frédéric Hohl et Daniel Rossellat?

P comme «Pays des Trois-Lacs»

Le Rwanda est surnommé le Pays des mille collines… Le Pays des Trois-Lacs et des deux langues, c’est plus facile à gérer? «C’est un peu plus facile, mais ce n’est quand même pas évident!» répond Frédéric Hohl.

Et de préciser: «on a sept directions, dans cinq immeubles, on parle de quatre arteplages dans des lieux différents, tout ça en deux langues. Avec dans l’expo des gens qui parlent encore quatre ou cinq autres langues… Quand on s’échange des mails, il y a un grand mélange de français, d’allemand, parfois d’anglais. Donc à l’interne, il y a une sorte de langue de l’expo, et ça, c’est assez intéressant!»

Cinq cantons, quatre villes, un arteplage mobile, et cela sur la zone où l’«Alémanie» jouxte la Romandie… Nelly Wenger se réjouit du fait qu’il s’agit d’une première particulièrement ambitieuse: «cette notion de Pays des Trois-Lacs a d’ailleurs été créée pour l’exposition nationale. J’espère beaucoup qu’elle va perdurer. Je sais qu’actuellement, les villes-arteplage s’organisent en réseau pour l’après-expo, ce qui est très important.»

Pour elle, les difficultés sont plus culturelles que spécifiquement linguistiques: «on a là quatre villes qui ont décidé de s’unir pour être les hôtes d’une manifestation nationale. Aucune n’avait les moyens de le faire toute seule. A quatre, elles y sont arrivées. Mais au fond, ce sont des villes qui ne se connaissaient pas beaucoup jusque là, et c’est en cela que notre travail est compliqué et passionnant. On doit gérer quatre villes qui collaborent, mais qui sont aussi concurrentes par certains aspects (…), chaque ville voulant à son tour être le centre de l’expo».

Ras-le-bol de la paperasse!

Plus critique, Daniel Rossellat: «c’est un projet politique. Une idée typiquement helvétique, consensuelle, que de vouloir quatre villes, deux langues et trois lacs pour faire une exposition nationale! Ce qui est intéressant, c’est la tentation de faire travailler des villes ensemble. Mais avec les différents règlements des villes et des cantons, c’est d’une complexité incroyable.»

Et de piquer une franche colère contre la paperasserie helvétique: «ce qu’on vit à l’expo montre l’absurdité de certaines mesures administratives. Moi-même je dois remplir des papiers parce que j’ai un appartement à Neuchâtel et que j’habite à Nyon, même si j’ai un passeport suisse!»

«Je dois remplir des formulaires, des papiers, aller les faire signer à Nyon, les faire signer à Neuchâtel. Pour immatriculer ma moto, j’ai mis deux semaines! Et je ne parle pas des procédures concernant l’expo: on perd une énergie colossale pour se rassurer avec de l’administration!»

P comme Pipilotti

Qui dit arteplage dit pilotis. Qui dit pilotis dit presque Pipilotti. Quel souvenir attache-t-on du côté d’Expo.02 au nom de Pipilotti Rist, l’artiste suisse alémanique à laquelle les rênes de l’expo avaient à l’origine été confiés?

Mes trois interlocuteurs ne sont pas avares en compliments à l’égard de l’une des plus allumées des créatrices helvétiques: «j’adore Pipilotti Rist, déclare Nelly Wenger. Je l’ai malheureusement croisée à l’expo, elle a démissionné alors que je m’apprêtais à venir. Comme citoyenne et spectatrice, j’ai adoré la période où elle y était, elle est parvenue à me passionner.»

La directrice générale va même plus loin: «j’espère que ce projet va en partie lui ressembler: je me suis sentie la légataire de quelque chose de précieux qu’il s’agissait de mettre en œuvre, et de protéger. J’espère que l’épilogue de toute cette histoire tourmentée sera qu’il y a eu un rêve, que ce rêve a failli s’écraser, mais que le rêve a résisté et s’est concrétisé.»

Associé au nom de Pipilotti Rist, la notion de rêve domine aussi pour Frédéric Hohl: «elle a amené la chose essentielle à l’expo, le rêve. Dans des tas de manifestations, on commence par l’aspect technique et on finit par le rêve. Là, on a commencé par le rêve et on finit par l’aspect technique.»

Hommage également, mais nuancé, de Daniel Rossellat: «j’ai beaucoup d’estime et d’affection pour Pipilotti Rist. Une artiste très intéressante, qui avait plein d’idées. Mais c’était une erreur de casting: elle n’était pas à sa place. En tant qu’artiste, elle pouvait amener beaucoup de choses, mais on l’a nommée manager. Elle était responsable des procédures, des contrats, des choses comme ça… Malgré toute l’énergie qu’elle a essayé d’y mettre, on a vite remarqué que c’était ingérable.»

Bernard Léchot

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