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Lauri Immi, vestale du Miles Davis Hall

Lori Immi, maîtresse de cérémonie du «Miles Davis Hall». swissinfo.ch

Depuis sept ans, la jeune femme est responsable de la programmation de la salle la plus créative du Jazz Festival de Montreux.

Rencontre avec quelqu’un qui jongle allégrement avec les nouveaux courants de l’électro, du hip-hop, du rock dur ou de la world music.

Le cœur du Jazz Festival de Montreux, c’est le Centre des Congrès, et ses deux salles, l’Auditorium Stravinski et le Miles Davis Hall (MDH). Cela même si le Casino Barrière a désormais rejoint le festival pour y abriter le jazz.

L’Auditorium Stravinski, c’est la Rolls-Royce du festival. Parois et plafond richement boisés, ambiance chic pour accueillir les plus grandes stars de la manifestation, celles qui coûtent cher et pour lesquelles le public est prêt à dépenser sans compter.

Un étage en-dessous se trouve le Miles Davis Hall. Murs noirs, ambiance plus ‘underground’, c’est géographiquement logique, pour accueillir des découvertes, mais aussi des artistes proposant des spectacles plus pointus, moins ‘grand public’.

Bref, la salle que l’intelligentsia musicale considère comme la plus passionnante, puisqu’on le sait, pour elle, un artiste rassembleur n’a nécessairement guère d’intérêt. Quoi qu’il en soit, la responsabilité de la salle en question revient, depuis 7 ans, à Lauri Immi.

swissinfo: C’est Faithless qui a ouvert le 38ème Jazz Festival de Montreux, dans l’Auditorium Stravinsky. Un groupe pourtant typique de l’état d’esprit du Miles Davis Hall…

Lori Immi: Absolument. D’ailleurs ils y sont passés il y a huit ans, à leurs débuts. Mais maintenant, c’est devenu un groupe important, avec des exigences en matière de cachet qui ne nous permettent plus de les programmer au ‘Miles’.

swissinfo: Cela reste-t-il la fonction du Miles Davis Hall de présenter des artistes qu’on va retrouver quelques années plus tard à l’Auditorium Stravinsky?

L.I.: Le but de cette programmation, oui, c’est de faire la part belle aux découvertes, aux nouvelles tendances, et de retrouver certains d’entre eux, quelques années plus tard à l’Auditorium. C’est le cas pour Faithless, cela l’a aussi été pour Morcheeba ou Calexico…

Mais aujourd’hui, tout cela est devenu très éphémère, les groupes passent très vite. Sur la quantité de groupes qui sortent chaque année, il n’y en a pas beaucoup qui ont une grande pérennité, malheureusement.

swissinfo: Vous avez constaté un réel changement à ce propos au cours de ces sept années de programmation?

L.I.: Oui, j’ai l’impression que tout va de plus en plus vite. Notamment à cause des mouvements de mode. Il n’y a pas que la musique qui est donc en cause, mais la mode, le marketing, ce genre de choses.

swissinfo: La programmation du ‘Miles’ est caractérisée par la diversité des genres: électro, hip-hop, rock dur, world… Comment faites-vous, en tant que programmatrice, pour suivre les groupes émergents dans tous ces courants?

L.I.: C’est du travail, cela demande beaucoup de temps. Et pas seulement à une certaine période de l’année. C’est tous les jour qu’il faut écouter des disques, aller voir des concerts, lire la presse. Se tenir informé, c’est vraiment un travail quotidien.

J’ai également pas mal d’échanges avec des gens qui font le même travail que moi, sur des festivals en France, en Belgique, au Canada… C’est aussi grâce à ces échanges qu’on arrive à garder le cap.

swissinfo: Vous avez aussi un réseau de personnes qui vont écouter des concerts pour vous?

L.I.: Non, j’essaie de faire un maximum de choses moi-même. Mais je délègue parfois. Cette année, la soirée reggae par exemple, je l’ai confiée à ‘Rootsman Production’, des gens qui organisent des concerts reggae à Genève depuis plus de 10 ans. Ils sont très bien informés, c’est leur truc.

Pour le reste, je travaille beaucoup toute seule. D’abord parce que j’adore ça, ça m’intéresse, ça me motive, et je pense que la programmation, c’est somme toute un travail assez personnel.

Je ne crois pas que j’arriverais à travailler avec un gros comité de programmation. A Montreux, on ne croit pas trop à ça. On est un petit team de programmation, dans le sens où chacun travaille dans un secteur précis de la programmation. On se concerte donc, ne serait-ce que pour ne pas avoir de collisions d’artistes, mais j’ai ma liberté de travail.

swissinfo: Les artistes qu’on n’a pas le droit de rater cette année?

L.I.: J’ai mis beaucoup de cœur dans toutes les soirées… Mais disons que j’ai un faible pour la soirée du 8 juillet, une soirée de femmes avec Me’Shell NdegéOcello, Feist et Martina Topley-Bird.

La soirée hip-hop du 11, également: je me réjouis de voir Roots Manuva, le projet Jaylib avec Madlib, et le rappeur anglais Ty. Une soirée loin des clichés hip-hop américains, le gangsta-rap, tout ce dont on est abreuvé sur toutes les chaînes de TV musicales.

Et le 12, le duo londonien «Archive», je pense que ce sera un grand moment. Bref, il y en a plein…

Interview swissinfo, Bernard Léchot à Montreux

– Le 38e Jazz Festival de Montreux se tient jusqu’au 17 juillet.

– Lori Immi travail comme programmatrice du Miles Davis Hall depuis 7 ans. Auparavant, elle a fait de la production de spectacle pour la société VSP, le Festival de Leysin et l’Arena de Genève.

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