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Le «Projet Chaplin», un trésor sur 200 000 pages

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Depuis 1999, une équipe de Bologne restaure des films de Charlie Chaplin. Ce «Projet Chaplin» comprend également le passage sur support digital des archives du maître.

Rencontre avec la coordinatrice de cet immense travail, Cecilia Cenciarelli.

swissinfo: Pourquoi a-t-on confié à une équipe italienne la tâche de restaurer les films de Chaplin et de digitaliser ses archives?

Cecilia Cenciarelli: «L’image retrouvée» – c’est le nom de notre laboratoire de restauration – est bien connue dans le monde entier pour la qualité de son travail et son recours aux technologies les plus récentes.

La famille et l’Association Chaplin ont misé sur notre savoir-faire et je peux dire qu’ils ont été impressionnés par le résultat.

De plus, Charlie Chaplin a toujours été très populaire en Italie. La cinémathèque de Bologne est le deuxième fonds d’archives cinématographiques le plus riche du pays et la ville organise le «Festival du cinéma retrouvé», entièrement consacré au muet. Chaque été, des archivistes ,des professeurs, des étudiants, des chercheurs et des amateurs du monde entier se pressent pour y assister.

Pour toutes ces raisons, il a paru évident que Bologne offrait l’environnement idéal pour le Projet Chaplin.

Pouvez-vous nous expliquer ce que vous viendrez faire le mois prochain aux archives communales de Montreux?

C.C. : Nous sommes six à travailler sur le Projet Chaplin. Notre tâche est de répertorier, d’étudier et de passer sur support digital l’ensemble des archives Chaplin. Nous prévoyons que ce travail va durer jusqu’à l’été 2005.

Pour cela, nous devons transférer tout ce qui existe à Paris et à Montreux ici à Bologne. Les documents sur papier sont rangés dans des boîtes, qui retourneront à Montreux après quelques mois en Italie.

Mes collègues vont devoir venir à Montreux pour finir d’examiner ce qui reste là-bas et en dresser un inventaire complet. Nous en profiterons également pour échanger quelques boîtes. Ainsi, «Les Feux de la Rampe» vont rentrer à la maison (à Montreux) et «Monsieur Verdoux» va pouvoir visiter Bologne !

Quelle est l’importance de ce fonds d’archives conservé à Montreux?

C.C. : C’est certainement le plus riche du monde, et il va s’enrichir encore. Les papiers de Charlie Chaplin ont pas mal voyagé: de Californie, où il avait ses studios, ils sont venus en Suisse, et une partie est restée à Paris, siège de l’Association Chaplin.

Une fois que nous aurons fini notre travail, tous les documents (y compris ceux qui étaient à Paris) seront réunis pour la première fois à Montreux, où ils seront conservés dans les meilleures conditions possibles.

Evelyne Lüthy-Graf, responsable des archives communales, est une des professionnelles les plus compétentes que je connaisse. De plus, ses locaux disposent des meilleurs systèmes de sécurité et de climatisation que l’on puisse trouver. Les papiers y seront donc à l’abri de vol et de l’outrage des ans.

Que trouve-t-on dans ces précieuses archives?

C.C. : Elles sont immensément riches et variées. Il y a des manuscrits, des scénarios, des dessins, des partitions originales, des lettres personnelles, des notes de production, des communiqués de presse, et bien sûr, des photographies. En tout, ce sont près de 200 000 pages, dont les plus anciennes remontent à 1910.

Notre but, en restaurant les films et en digitalisant ces archives, est de rendre cette magnifique collection visible. Elle sera disponible sur Internet à l’attention des chercheurs, des étudiants et de tous les passionnés. C’est une manière de garder vivant le nom de Charlie Chaplin.

Qu’est-ce qui vous excite le plus dans ce travail?

C.C. : Notre tâche ressemble à celle des archéologues. Chaque fois qu’une boîte d’archives arrive chez nous, nous nous sentons comme à la veille d’une découverte.

Dans la dernière, il y avait de faux billets de banque français utilisés pour «Monsieur Verdoux», à côté d’une lettre écrite et signée par Albert Einstein!

Qu’avez-vous découvert sur la manière de travailler de Chaplin?

C.C. : Je trouve passionnant de voir la manière dont il modifiait ses scénarios, du premier brouillon à la version finale. Il y apportait un nombre incroyable de changements jusqu’à en être satisfait.

Il était aussi capable de laisser mûrir une seule scène pendant deux ans – de la première idée au tournage – pour finalement la couper à la dernière minute.

swissinfo/Dale Bechtel

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