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Le Chant du Gros, un état d’esprit !

Plaisir de retrouver Johnny Clegg à Paléo d'abord, puis au Chant du Gros... Keystone

Le Festival du ‘Chant du Gros’, dans la petite localité jurassienne du Noirmont, s'est tenu en fin de semaine. IAM, Souchon, Dutronc, mais aussi Johnny Clegg ou Micky Green étaient de la partie. Rien que ça. Rencontre en coulisse avec un organisateur enthousiaste, Gilles Pierre.

«Johnny, Gainsbourg, Dutronc, Bashung. Les cinq membres de la trilogie fondamentale de la Classe à la française. Nous avons eu Bashung. Aujourd’hui, nous avons le ravissement rare de vous présenter le plus détaché de tous. Pour les deux autres, l’un est mort et l’autre pas encore. Nous faisons de notre mieux», lit-on sur le site web du ‘Chant du Gros’ à propos de la venue, samedi soir, de Jacques Dutronc.

Pour ce qui est de la blonde Micky Green, c’est en ces mots que le festival annonçait sa participation, samedi soir également: «On a envie de dire Hmmmm, pis Whaaaaaa, pis aussi Yeahhhhh et plein d’autres choses totalement inavouables. Séduction totale et irréversible, j’adore l’Australie, une fois!».

Oui, le «Chant du Gros», c’est bel et bien un état d’esprit… Peu avant la superbe prestation de Johnny Clegg et le triomphe attendu d’Alain Souchon, vendredi soir, rencontre avec le fondateur et patron de l’événement, Gilles Pierre.

swissinfo.ch: L’édition de l’année passée, avec environ 20’000 personnes en trois jours et, côté programmation, la venue de Deep Purple, a marqué une sorte de pic pour le Chant du Gros. Cela a-t-il eu une influence sur la préparation de l’édition 2010?

Gilles Pierre: Un peu, oui, parce qu’on sait que le public attend toujours plus. On essaie de faire le mieux possible, et de nous faire plaisir aussi. Et c’est chose faite avec des gens comme Souchon, Dutronc, IAM… Mais on ne s’était pas fixé un objectif du genre «on va faire encore plus fort»!

swissinfo.ch: Programmation effectivement très francophone cette année… Un vrai choix ou tout cela est-il finalement question de hasard et d’artiste en tournée?

G.P.: On est effectivement très tributaire de qui est en tournée ou non. En plus, les groupes anglais ne sont pas forcément disponibles en septembre, c’est la fin de saison. Et ils coûtent de plus en plus chers. On a la chance de collaborer avec la Fête de l’Humanité, à Paris, ça fait quelques années qu’on essaie d’avoir un artiste un soir chez nous et le lendemain chez eux. Là, ça tombait bien, on a pu collaborer pour Souchon et Dutronc.

swissinfo.ch: Vous collaborez avec la Fête de l’Humanité, mais aussi avec Opus One, la société affiliée au Paléo Festival de Nyon, ainsi qu’avec le festival Rock oz’Arènes, à Avenches. Ce type de collaborations, c’est une question de survie?

G.P.: Non, ce n’est pas ça. Pour des festivals qui ont lieu sur la même période et dans la même région, il est certain que chacun défend son beefsteak, et protège ses exclusivités. Disons qu’on a de la chance d’être dans le Jura, et au mois de septembre. Du coup, on n’est pas perçu comme un concurrent, et cela facilite les contacts et la collaboration. Et comme on a toujours eu un esprit assez bon enfant, l’esprit jurassien, c’est-à-dire discuter autour d’un verre, ça c’est toujours très bien passé avec tout le monde!

swissinfo.ch: Le nom du festival comme le ton du site web, déjà, montrent qu’il y a effectivement ici un état d’esprit particulier au Chant du Gros… C’est simplement le vôtre, ou celui de la manifestation?

G.P.: Je crois qu’il colle à la manifestation. On est vraiment une équipe de potes, on ne se prend pas la tête, les 850 bénévoles ont le sourire et bossent comme des fous. C’est un boulot démentiel pour trois petits jours. Mais tous veulent ce festival, et l’ambiance est vraiment cool. Et les groupes ressentent ça.

swissinfo.ch: A quel moment du jour ou de la nuit rédigez-vous les textes de votre site web?

G.P.: En tout cas après l’apéro! C’est toujours un gros délire. On reçoit d’ailleurs pas mal de courrier, y compris de la part de groupes programmés!

swissinfo.ch: Aucun manager n’a un jour exigé que vous retiriez un texte?

G.P.: Non, ce n’est jamais arrivé. Et je pense que si un management jouait ce jeu-là, on leur dirait qu’on retire tout, y compris le groupe de la scène! Oui, ça nous énerverait. Mais je crois que la plupart des musiciens ont le même genre d’humour…

swissinfo.ch : Alors qu’en Suisse romande les festivals ont d’abord poussé sur les bords du Léman, il y a aujourd’hui une quantité incroyable de petits ou moyens festivals dans l’arc jurassien. Une explication?

G.P.: Mais il y a aussi de plus en plus de groupes! C’est vrai qu’il y a un paradoxe: le disque a connu une chute monumentale, mais le net a permis à énormément de groupes de se faire connaître. Finalement, c’est peut-être un bien pour un mal, parce que la musique est beaucoup plus accessible, il suffit d’aller sur Internet pour découvrir un groupe, et peut-être acheter sa musique.

Cette facilité d’accès a peut-être motivé les gens à monter leur petit festival. Je crois que dans la région, beaucoup sont partis dans cette idée-là: on est une équipe de copains, on a des amis qui font de la musique, on a envie de les voir jouer ici, on monte un festival… Maintenant, il est vrai qu’il y a énormément de festivals en Suisse, et que cela devient délicat.

Mais le fait qu’il y ait autant de festivals, c’est bien pour les groupes. Et on voit qu’en Suisse, on a énormément d’excellents artistes, avec un très haut niveau.

swissinfo.ch: Parmi les artistes suisses programmés cette année, quels sont ceux qui selon vous ont un vrai potentiel?

G.P.: Je trouve qu’Aloan a atteint un niveau assez exceptionnel. Mais c’est dur, en Suisse, les musiciens n’arrivent pas à vivre de leur musique, c’est trop petit. Je suis sûr que si Aloan venait des Etats-Unis, ce serait une énorme tête d’affiche! Sinon, il y a des gens comme les régionaux Ska Nerfs, qui ont vraiment un gros potentiel, les Rambling Wheels, ou Kya Bamba, qui pour moi, pourraient vraiment tourner dans le monde entier…

swissinfo.ch: L’année prochaine, le 20ème! Vous vous apprêtez à mettre le feu au Jura?

G.P.: On est prêt à tout! Peut-être pas par rapport à la programmation, puisque, comme on le disait, c’est délicat, on ne sait pas ce qui tournera l’année prochaine. Bon, chaque année, je dis qu’on aura Pink Floyd, et je continue de le dire… Mais je pense qu’on va plutôt essayer de faire des choses originales, recontacter des artistes qui sont déjà venus et leur proposer de faire des duos, ou développer une scène gratuite au camping, qui pourrait ressembler à ce qu’étaient les premières éditions du festival, amener la fête dans le village… Bref, faire plein de cadeaux aux gens. C’est un peu l’idée du 20ème !

1991. Le Festival du «Chant du Gros» a lieu depuis 1991 au Noirmont.

«Gros Louis». Le «Chant du Gros» tire son nom du gros Louis, le propriétaire du champ sur lequel la manifestation a lieu chaque année.

3 jours. Cette 19e édition a lieu du 9 au 11 septembre. Dernier festival ‘open air’ de l’été en Suisse, les concerts ont néanmoins lieu sous des chapiteaux.

3 scènes. Les deux principales scènes du lieux ont des noms imagés: la «sainte scène» pour la plus grande, «la scène déménage» pour la plus petite. Reste encore le Fan club, pour ceux qui comment tôt et finissent tard.

Vedettes au menu: après Renan Luce et IAM jeudi, Johnny Clegg, Alain Souchon et Gaëtan Roussel vendredi, Micky Green, Jacques Dutronc et Sinsemilia notamment ont joué samedi samedi.

Les Suisses de l’étape: Rambling Wheels, Jah Man Gang, Ska Nerfs, Capt ‘n’ Kunz, Tafta, Stevans, Lan, Aloan, Kya Bamba, Explosion de caca.

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