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Le Parlement veut durcir la loi sur l’asile

Les requérants d'asile déboutés n'auront plus droit à l'aide sociale. Keystone

Au nom de la lutte contre les abus et malgré les menaces de référendum, les députés ont suivi les sénateurs. Ils ont décidé de durcir le droit d'asile.

Lundi et mardi, les députés ont opéré un vrai serrage de vis, en votant une série de mesures visant les requérants d’asile et surtout ceux qui sont jugés indésirables en Suisse.

Mardi, les députés ont décidé que les étrangers jugés indésirables en Suisse risquaient à l’avenir de passer jusqu’à deux ans derrière les barreaux s’ils entravent leur renvoi.

Comme les sénateurs, les députés ont doublé la durée maximale de la détention dans le cadre des mesures de contrainte en la faisant passer de neuf à dix-huit mois. Cette prolongation a été entérinée par 106 voix contre 82.

Les mêmes députés ont étendu de trois à six mois au plus la détention dite de phase préparatoire. Pour les mineurs, l’emprisonnement en vue de l’expulsion ne pourra pas excéder un an au total.

Enfin, une demande d’autorisation de séjour déposée par un étranger admis provisoirement devrait être examinée de manière approfondie après cinq ans.

Les corrections suggérées par Blocher

Lundi, comme cela fut déjà le cas à la Chambre haute (Conseil des Etats), le ministre de la justice Christoph Blocher avait réussi à imposer ses corrections sur l’asile aux représentants de la Chambre basse (Conseil national).

Les députés avaient refusé d’emblée de renvoyer le débat. Et cela malgré les innovations introduites par le ministre de l’Union démocratique du centre (UDC/droite dure) alors que le processus parlementaire était déjà en cours.

La gauche et les libéraux avaient exigé en vain un message sur les conséquences du durcissement proposé.

Dans la foulée, la majorité bourgeoise avait renoncé à introduire dans la révision de la loi l’admission pour raisons humanitaires.

Lors du premier examen de la loi en mai 2004, la Chambre basse avait pourtant soutenu ce nouveau statut destiné aux personnes pour lesquelles le renvoi ne peut être raisonnablement exigé ou en cas de détresse personnelle grave.

Le droit au regroupement familial

L’admission humanitaire – qui concerne quelque 3000 personnes par an – aurait permis, en particulier, d’accorder un droit au regroupement familial immédiat.

En lieu et place de ce statut cher à la gauche, le Conseil national avait préféré se contenter de retoucher le régime actuel de l’admission provisoire.

Ainsi, les requérants accueillis provisoirement n’auront droit au regroupement familial, et donc à faire venir en Suisse leur famille, qu’au bout de trois ans.

L’admission provisoire sera accordée uniquement si le renvoi dans son pays d’origine représente une mise en danger concrète de l’étranger, notamment en cas de guerre, de violences généralisées ou de détresse médicale.

Les cantons resteront compétents pour définir les cas de rigueur, malgré les différences de traitement que cela peut induire.

L’aide sociale et l’aide d’urgence

Lundi toujours, les députés du Conseil national avaient également exclu de l’aide sociale les requérants d’asile déboutés.

La droite avait estimé que les expériences faites depuis plus d’une année avec la suppression de cette aide aux personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière étaient positives.

Le but de l’opération est d’accélérer les départs. Dans un premier temps, les cantons percevront des forfaits de 15 000 francs par cas qui leur permettront d’assurer, à titre transitoire, un soutien d’urgence aux demandeurs déboutés encore en Suisse.

En revanche, lundi, la Chambre basse n’avait pas voulu refuser l’aide d’urgence aux personnes qui ne veulent pas quitter la Suisse suite à une décision négative.

Introduite dans la loi en mars par la Conseil des Etats, cette mesure avait été jugée contraire à la constitution par le Tribunal fédéral.

Cela n’avait pas empêché le ministre de justice et police et une minorité de droite de défendre en vain une version légèrement édulcorée de la suppression de l’aide d’urgence. Mais leur tentative avait finalement été balayée.

Le problème de la pièce d’identité

En revanche, aucune divergence ne sépare les deux Chambres du parlement en ce qui concerne la chasse aux demandeurs d’asile sans papiers.

A l’avenir, la Suisse refusera en principe d’entrer en matière sur les demandes déposées par des personnes ne disposant pas d’une pièce d’identité. Selon la droite, de nombreux requérants se défont de leurs documents pour ne pas être rapatriés.

Le risque d’exclure des personnes réellement persécutées n’avait pas freiné la majorité, qui avait fait valoir les exceptions prévues.

Les autorités devraient ainsi entrer en matière si des motifs valables pour l’absence de papiers peuvent être invoqués ou alors si des investigations supplémentaires sont nécessaires.

swissinfo avec les agences

Demandes d’asile en 2004: 14’248
Cas traités: 19’157
Décisions positives: 1555
Admissions provisoires: 4198
Départs et retours forcés: 19’730

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