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Les amours d’Anne Bisang pour Fassbinder

Anne Bisang, metteur en scène et directrice de la Comédie de Genève. swissinfo.ch

A la Comédie de Genève, Anne Bisang a mis en scène la pièce de théâtre «Les Larmes amères de Petra von Kant» de l'auteur Rainer Werner Fassbinder. Un univers exclusivement féminin pour un amour infiniment passionnel.

Rainer Werner Fassbinder développe une empathie particulière pour les figures féminines. Dans sa pièce «Les Larmes amères de Petra von Kant», il les peint comme dans un kaléidoscope. Souvent ambitieuses, parfois effondrées, mais toujours vivantes.

Petra von Kant est un personnage très contemporain, qui est pris dans la pression de la réussite économique, sociale et affective obligatoire que chacun subit à son niveau. Vous savez, ce genre de bonheur que l’on se doit d’afficher en permanence et qui vous propulse dans une espèce d’euphorie continue.

C’est tout cela qui touche Anne Bisang dans le personnage de Petra von Kant. Et surtout, l’illusion de cette toute puissance qui s’en suit.

Elle dit un peu, beaucoup se retrouver dans le profil de l’héroïne de Fassbinder. Au travers de la pièce, Mme Bisang est allée jusqu’à exprimer, en tant que metteur en scène, «des choses intimes qui lui appartiennent très profondément».

En fait, «Les Larmes amères…», c’est l’histoire d’une passion qui lie et déchire Petra, styliste de mode renommée, et Karine, fille du peuple en recherche de travail.

L’apparition de Karine dans la vie de Petra sème bonheur et poison dans le destin de l’héroïne. Petra apprend la liberté. Mais au prix d’un apprentissage impitoyable.

Au-delà de cet amour, Petra a du talent. Elle court vers la gloire. Ivre, elle écoute les Platters dans sa baignoire. Cela arrive quand le tourbillon de la vie la perd en chemin. Elle est éminemment combustible, mais ne se consume pas. Au fond, Petra se déteste plus qu’elle ne s’aime.

De son metteur en scène Anne Bisang, la comédienne Sophie Lukasik (dans le rôle de Karine) révèle que c’est la première fois qu’elle est dirigée par quelqu’un qui est à ce point respectueux de sa personnalité d’actrice.

Mais, «cette liberté ne va pas sans le respect de certaines exigences, contrebalance la comédienne Hélène Cattin (dans le rôle de Petra), Anne est directive dans le rapport au texte. On sent qu’elle est concernée par l’enjeu du pouvoir».

Aussi, «que le spectateur n’ait pas peur d’être le voyeur d’une intimité rarement dévoilée au théâtre», sourit Sophie Lukasik (Karine). Et «que les gens oublient ce qu’il peut y avoir de prétendument déviant dans la relation amoureuse entre deux femmes, renchérit Hélène Cattin (Petra), afin qu’ils se reconnaissent davantage dans le fait de bien ou de mal aimer».

Reste qu’Anne Bisang signe là son deuxième spectacle à la tête de La Comédie de Genève et qu’elle ressent plus que jamais la pression médiatique et l’attente du public.

Le Tout-Genève attend de «la Belle» une confirmation artistique. La Tribune de Genève devait d’ailleurs titrer, mardi, le jour de la première: «La Comédie joue sa saison avec Fassbinder».

Emmanuel Manzi

Représentations jusqu’au 20 mai: mardi, vendredi et samedi à 20h; mercredi et jeudi à 19h et dimanche à 17h.

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