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Les voisins de la mondialisation

La mondialisation des gens, pas celle du capital! SP

«Voisins...», c'est le titre du nouvel album de Michel Bühler. Entre quelques murmures de tendresse, c'est de véritables coups de gueule que nous balance l'artiste vaudois.

L’album a failli s’appeler «Mondialisation», selon le titre d’une des chansons qu’il contient. «Et puis j’ai trouvé ça un peu rébarbatif. Finalement le titre s’est imposé de lui-même, puisqu’on parle de personnages, de gens d’ici et de là-bas», explique Michel Bühler. Il a également songé à «Dernière chanson»: «Cela aurait fait plaisir à quelques personnes qui se seraient dit: ouf, enfin il arrête de chanter!»·

Il est vrai que Michel Bühler peut agacer. Les conservateurs, bien sûr, mais ça, on imagine qu’il s’en réjouit plutôt: «Les gonzesses en tailleur, ça vient rarement me voir», écrit-il dans «Vulgaire». Parfois, il irrite aussi son propre camp, lui qui trimballe son rêve et ses colères avec le même idéalisme brut depuis une bonne trentaine d’années. Une sorte d’obstination. Mais qui lui aura évité de se renier… Tout le monde ne peut pas en dire autant.

Dans «Voisins…», il vise tous azimuts. Les boursicoteurs, Barbie, Coca, Mickey, Mac Do, les stars, Thatcher et Pinochet («Vulgaire»), Wall Street, Shell et la déforestation («Dans un pauvre Pueblo»), le racisme banalisé («Kosovo»), le patronat, tous ceux qui restructurent et licencient («Mondialisation»), les publicitaires et l’audimat («Ma voisine»), la peine de mort («Dans la prison de Saint-Quentin»), sans parler de son voisin imaginaire, un Zurichois milliardaire, démocrate, patriote et respecté («Mon voisin est milliardaire»).·

Tout cela dans une avalanche verbale que ne renieraient pas certains rappeurs, même si d’un point de vue rythmique, le rap est à Bühler ce que la mazurka est à NTM. On constate que son écriture a évolué, on sent que la verdeur de Renaud et la brutalité du hip-hop sont passés par là: «Il y a quelques années, je mettais mon costume du dimanche pour écrire des chansons. Maintenant, je pense qu’il faut parler plus directement aux gens».

On l’a compris, l’incontournable mondialisation est au coeur de l’album «Voisins…» Le nouveau Grand Satan? «Je suis évidemment pour la mondialisation. Mais celle des gens, pas celle du capital. Aujourd’hui, les capitaux peuvent circuler librement partout. Mais pas les gens. Essayez d’accueillir en Suisse un ami sénégalais pour 15 jours de vacances… c’est la croix et la bannière!»

La mondialisation version Bühler, c’est dans l’universalité de l’émotion individuelle qu’on la trouve vraiment. Emotion de la rencontre: Giovanna la Piémontaise immigrée en Suisse, ou ce Kosovar aux cheveux gris qui soudain lui rappelle son propre père. Emotion de l’amour, comme dans «Dernière chanson»:·«S’il ne devait rester de moi qu’une chanson,·quand je serai parti vers mes Iles Marquises,·après le grand salut, il faudrait qu’elle dise·que tu étais jolie et que nous nous aimions».·

Bernard Léchot


«Voisins» de Michel Bühler est distribué par Disques Office

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