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Montreux côté musique, suivez le guide !

Montreux à l'heure du festival... swissinfo.ch

Aucune ville helvétique n'a une histoire aussi imprégnée de musique que la petite cité vaudoise, au bord du lac Léman. Entre deux concerts, entracte touristico-musical, de Stravinsky à Queen en passant par Deep Purple.

Le tourisme à Montreux remonte au début du 19e siècle, à ce goût d’alors pour la nature sauvage, ce mélange de hautes cimes et de lacs qui fit de la Suisse alpine un haut-lieu du voyage «romantique»… Byron, en 1816, écrit «Le Prisonnier de Chillon», du nom du célèbre château situé juste à côté de Montreux.

La bourgade lémanique va progressivement s’adapter à cette clientèle venue d’ailleurs, et construire hôtels et églises à leur intention. «Vers 1835, deux premiers hôtels ouvrent leurs portes. En 1850, on compte 8 hôtels offrant 250 lits, ainsi que quelques pensions-familles. En 1860, on dénombrait 18 hôtels avec 810 lits et, en 1912, 85 hôtels avec 7’525 lits», peut-on lire sur le site «Montreux Music», remarquablement complet et documenté.

Le coeur de l’événement

C’est d’un hôtel que part d’ailleurs notre promenade… Le «Montreux Palace», connu pour avoir été le domicile du père de «Lolita», Vladimir Nobokov de 1961 à sa mort, en 1977. Mais aussi pour être, depuis des décennies, la luxueuse dépendance du Montreux Jazz Festival, où logent la majorité des stars.

Elles pourraient d’ailleurs se rendre à pied au «Montreux Music & Convention Center», siège actuel du Jazz Festival, distante d’au moins 50 mètres. Mais en général, les limousines sont là pour parcourir cette terrible distance…

Les deux salles où se déroulent le festival ont pour nom l’«Auditorium Stravinsky» (le compositeur d’origine russe habita longtemps à Clarens, juste à côté de Montreux) et le «Miles Davis Hall». Sur le quai, en contrebas, le visage de Miles, perché sur un socle de granit ou est incrusté une trompette, fixe les passants…

Dans le jardin du Palace, entre l’hôtel et le lac, la musique s’affiche également un peu plus d’année en année avec l’apparition progressive d’une statuaire peu courante, en Suisse comme ailleurs: les bustes de BB King, Ella Fitzgerald, et Ray Charles ont rejoint celui de Nabokov.

Place du Marché

En longeant les quais qui bordent le lac, on aboutit à la Place du Marché, occupée en partie par le Marché Couvert, une vaste halle Belle Epoque, sorte de Pavillon Baltard ouvert sur les côtés. Dos à la ville, face au lac, la statue de Freddie Mercury regarde l’horizon. Elle est d’ailleurs devenu un lieu de rendez-vous planétaire de ses fans et un «Freddie Mercury’s Memorial Day» est organisé annuellement (cette année, ce sera le week-end des 5-6 septembre).

Pourquoi tant d’amour, à Montreux, pour le chanteur de Queen? Freddie Mercury a travaillé et vécu ici. C’est même là qu’il a enregistré son ultime chanson, «Mother Love», et écrit son dernier texte, «A Winter’s Tale», beau et résigné.

De la Place du Marché, il ne faut d’ailleurs pas marcher longtemps pour parvenir au sanctuaire… Dans un flanc du casino se niche le «Mountain StudioS», qui appartenait à Queen, et où, l’ingénieur du son David Richards aux manettes, défilèrent moult autre stars, des Rolling Stones à Led Zeppelin en passant par David Bowie, Marvin Gaye ou Ella Fitzgerald.

Le «Mountain Studios» ou plutôt ce qu’il en reste: une porte métallique graffitée par les fans, et refermée sur un bar aussi privé que désert… Ou quand un propriétaire d’une chaîne de casinos, insensible à la musique du présent comme aux fantômes du passé, tue sans état d’âme un lieu magique.

Le Casino

Le casino d’aujourd’hui n’a plus rien à voir, sinon sa situation, avec celui autour duquel se cristallisa l’épanouissement jazz et rock de Montreux. Puisque – qui l’ignore encore aujourd’hui? – l’ancien casino brûla, le 4 décembre 1971, alors que Frank Zappa y donnait un concert.

Le groupe anglais Deep Purple était justement là pour enregistrer l’album «Machine Head». Inconvénient: ils durent trouver un autre lieu. Ce fut le «Grand Hotel» de Territet, tout près de là, aujourd’hui devenu résidence privée. Avantage: l’événement leur inspira une chanson au succès mondial, «Smoke on the Water». Deep Purple ne manquera pas de rappeler la chose le 19 juillet, en conclusion du 42e Montreux Jazz Festival.

Mais au fait, que faisait Frank Zappa comme Deep Purple, en 1971, dans une petite cité vaudoise?

Clairvoyance!

Montreux, ville touristique, mais… ennuyeuse. Et cela malgré un «Septembre musical» créé en 1946, assez peu trendy en ces glorieuses swinging sixties.

Claude Nobs, à l’époque jeune cuistot reconverti dans le tourisme montreusien, va alors, en accord avec son patron Raymond Jaussi, essayer de dynamiser et de rajeunir la ville à coups de concerts en prise avec l’époque. Dans le cadre de la Rose d’Or 1964, il parviendra à faire venir les Stones pour leur premier concert continental. Puis créera le Jazz festival en 1967.

Et transformera Montreux en Mecque de la «pop», comme on disait alors… Pink Floyd, Chicago, Yes, Santana, Ten Years After, Led Zeppelin, tous passeront par ici. Une raison parmi d’autre pour expliquer pourquoi, très vite, le festival s’ouvrira à toutes les musiques – pop, rock, blues et leur descendance.

Pour conclure logiquement ce parcours musical, encore faudrait-il prendre sa voiture – ou un petit train régional – et monter sur les hauteurs de Montreux, à Caux, là où se trouve la maison de Claude Nobs. Un nid d’aigle où l’hôte des lieux accueille systématiquement le monde de la musique avec son grain de folie et ses talents culinaires, leur démontrant à chaque édition que le Montreux Jazz Festival n’est pas tout à fait un festival comme les autres…

Bernard Léchot, Montreux, swissinfo.ch

La 42ème édition du MJF a lieu du 4 au 19 juillet.

Au total, les deux scènes voient défiler près de 90 groupes.

Une trentaine de concerts sont des exclusivités suisses, dont ceux de Sheryl Crow, Joan Baez, The Raconteurs, Leonard Cohen et Madness, Gnarls Barkley et Travis, Etta James et les Babyshambles.

Maintes animations complètent la programmation, dont 250 concerts et DJ gratuits, des croisières sur le Léman et des voyages musicaux en train.

Les organisateurs disposent d’un budget de 18 millions de francs.

Le festival a été créé en 1967 par Claude Nobs, toujours aux commandes. De nombreux disques live y ont été enregistrés.

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