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Salve de propositions après le oui à l’initiative Weber

A Brigels dans le canton des Grisons Keystone

La pression monte pour lever les restrictions sur les étrangers qui souhaitent acheter une propriété en Suisse. Elle fait suite à l'approbation de l’initiative Weber, qui fixe une limite maximale pour la construction de résidences secondaires.

Adoptée par une majorité étroite le 11 mars dernier, la limitation à 20% du territoire d’une commune pour les résidences secondaires a provoqué une onde de choc dans les régions de montagne et le secteur touristique. La votation a aussi suscité des appels renouvelés pour la mise au rebut des restrictions sur les droits de propriété des étrangers.

Des politiciens de droite, en particulier les représentants des régions de montagne, estiment le moment venu d’examiner et d’éliminer les contraintes juridiques, quatre ans après le rejet par le parlement fédéral de plans similaires proposés par le gouvernement.

Mais l’abrogation de cette restriction connue sous le nom de Lex Koller suscite une ferme opposition aussi bien à droite qu’à gauche, alors que les experts pointent le risque d’attirer des capitaux internationaux dans un marché de l’immobilier non protégé.

«Lever les restrictions augmenterait la pression sur les prix de l’immobilier dans des villes comme Zurich et Genève, mais peut-être aussi dans de petites villes à la renommée internationale, comme Lucerne et Zoug», estime Daniel Müller-Jentsch, un expert de l’immobilier du think tank Avenir Suisse.

«Et ce alors que les prix sont déjà sous pression à cause des niveaux d’immigration élevés et des taux d’intérêt bas », ajoute l’expert. Une hausse semblable des prix est attendue dans les destinations touristiques haut de gamme à la suite de l’initiative de Franz Weber, selon Daniel Müller-Jentsch.

La contribution de l’impôt

 

Parmi les partisans d’une abrogation de la lex Koller, certains proposent de lier l’achat immobilier à une contribution fiscale importante pour aider à financer des projets d’infrastructure publique.

De son coté, Jacqueline Badran suggère l’imposition d’une période de résidence obligatoire de cinq ans, comme condition sine qua non pour l’achat de la propriété. Rejetant les allégations de xénophobie, la parlementaire socialiste affirme que les règles devraient être les mêmes pour tous, indépendamment de la nationalité de l’acheteur: «L’objectif est d’empêcher une flambée des prix de l’immobilier, notamment dans les zones urbaines.»

Dans la même veine, Hans Kissling, un économiste et expert en planification du développement régional, ajoute: «Il est crucial pour les villes que les restrictions restent en place pour les étrangers souhaitant acheter des biens immobiliers en Suisse». Dans un article paru dans le quotidien zurichois Tages-Anzeiger, il prévient qu’une levée des restrictions laisserait le champ libre aux investisseurs étrangers à la recherche d’occasions en or dans un marché mondialisé de la propriété.

Effet immédiat

 

Face à cette effervescence, Doris Leuthard, ministre en charge du territoire, a rappelé la position du gouvernement concernant l’initiative Weber : «L’amendement constitutionnel s’applique avec effet immédiat, que cela vous plaise ou non».

Les demandes faites par des acheteurs potentiels avant la votation restent valables, selon la ministre. Mais Doris Leuthard a appelé les autorités locales à faire preuve de retenue dans le traitement des demandes introduites entre le 11 mars et le 31 décembre de cette année, jusqu’à ce que les détails des modifications juridiques soient réglés. «Dans les cas controversés, ce sera aux tribunaux de décider», précise la ministre.

À partir de 2013, les communes dépassant le quota de 20% de résidences secondaires ne doivent plus accorder de permis de construire.

Un groupe de travail réunissant des représentants des autorités fédérales, cantonales, locales et du comité d’initiative a été mandaté pour élaborer un projet de directive pour la période de transition. Les premiers résultats sont attendus d’ici l’automne.

Statu quo

Quoi qu’il en soit, le résultat du vote du 11 mars n’a pas d’impact immédiat sur l’achat de propriétés par des étrangers, selon l’Office fédéral de la Justice. L’achat de biens immobiliers reste possible en conformité avec les restrictions actuelles, à savoir un maximum de 1500 autorisations par an.

Les chiffres montrent que 70 à 100% de ce quota a été utilisé dans les dernières années. En 2010, la plupart des demandes ont été présentées par les cantons du Valais, de Vaud et du Tessin.

Les étrangers (individus et entreprises) qui souhaitent acheter une propriété en Suisse doivent d’abord obtenir un permis du canton où ils souhaitent acheter. Le nombre de ces permis est strictement limité.

Les citoyens de l’UE et de l’AELE et les titulaires d’un permis C vivant en Suisse ne sont pas considérés comme des étrangers dans ce contexte.

Les biens achetés dans le but de créer une activité commerciale permanente sont exemptés de ce type de permis.

Les étrangers qui achètent une propriété comme habitation doivent l’utiliser comme leur résidence principale.

Les restrictions à l’encontre des étrangers qui achètent des biens suisses ont été mises en place en 1961.

Ces règlements ont été inscrits dans la loi en 1983 et modifiée plus tard. Une proposition du gouvernement d’abolir ces règles a été rejetée par le parlement en 2008.

Traduction de l’anglais: Frédéric Burnand

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