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Ursula Andress, une légende helvétique

Une icône plus qu'une photo... SP

Dans notre pays de banquiers, les légendes et les mythes artistiques sont rares. En particulier en matière de 7ème Art. Grâce à une biographie qui vient de paraître, Rolf Kesselring se souvient d’anciennes amours cinématographiques…

Depuis Guillaume Tell et quelques-uns de ses acolytes historiques, nous manquions d’icônes, de héros, qui auraient permis de nous identifier à quelque chose de planétaire. Pourtant, il y a quelques décennies, une compatriote devint une légende mondiale…

Aujourd’hui, Ursula Andress, la star mondiale, est mise à nu… enfin, façon de parler. Un ouvrage récent lui rend hommage.

Le soir où j’ai tué James Bond

La première fois qu’elle m’est apparue, elle jaillissait d’une mer azuréenne et caraïbe. Elle n’était vêtue que d’un costume de bain deux pièces d’un blanc immaculé et d’un poignard de plongeur. Des gouttelettes d’eau de mer, que j’imaginais salées et odorantes, perlaient sur sa peau… mon imagination et ma libido étaient à feux et à sang.

Impossible de me souvenir du scénario, pas plus que je me rappelle qui était ce Docteur No. J’étais dans l’incapacité cérébrale de voir une scène de plus. A peine était-elle sortie de l’eau que j’étais fou amoureux, fatalement, définitivement.

Ce fut à cet instant que, sur cette plage paradisiaque, je perçus la présence d’un agent étranger. Un vague acteur qui s’appelait Sean Connery et qui interprétait le rôle trouble d’un certain James Bond. Elle, botticellienne, vénusienne, presque irréelle, se dirigeait vers lui sans m’accorder le moindre regard. Elle le fixait, lui et uniquement lui !

Je ne vous dirai pas comment, mais, je le jure, ce soir-là, férocement jaloux, j’ai assassiné James Bond !

Mon rêve pulvérisé

Depuis, j’ai reçu cet ouvrage, et je ne rêve plus du tout. D’ailleurs qui a dit: amour-toujours? Sûrement un innocent! Cette biographie d’Ursula (les déesses ne se désignent que par leur prénom!) m’a renseigné sur les tribulations d’une Bernoise à travers le monde et c’est très bien ainsi.

Jamais je n’avais imaginé que cette femme superbe, fille de diplomate allemand et d’une native de notre belle Helvétie, avait eu une vie aussi aventureuse. D’Ostermundigen à Hollywood, il y a des milliers de kilomètres et pourtant elle les a parcourus en multipliant les tours et les détours.

Pulvérisé sur cette plage lointaine, mon rêve amoureux m’avait conduit à une fausse indifférence à l’égard de la belle. Plus jamais je n’avais été voir un film où elle jouait. Je voulais l’oublier, la gommer de ma mémoire. Peut-être était-ce le remord, un reste de culpabilité: ce n’est pas tous les jours qu’on devient assassin à cause d’une femme, même si elle est éblouissante.

La dimension du miracle

Ursula Andress est un être qui a vécu dans ce que j’appelle la dimension du miracle. Peu de personnes connaissent les petites portes qui donnent accès à cette étendue invisible. Si j’affirme cela, c’est qu’en lisant l’excellent texte de Patrick Meier et Philippe Durant, les deux auteurs de cette biographie, j’ai réalisé à quel point la belle avait parcouru des chemins extraordinaires pour devenir celle que j’avais découverte sur grand écran en compagnie de ma première et ultime victime: Sean Connery.

J’ai appris comment d’Ostermundingen, canton de Berne en Suisse, elle monta à Paris rejoindre Daniel Gélin, son premier amour. Puis je l’ai suivie dans les rues de Rome où, désœuvrée, elle rencontra deux amis qui n’étaient pas encore des monstres sacrés: Brigitte Bardot et Roger Vadim.

Obsédée par le cinéma, elle finira, à force de patience, de pugnacité, de rencontres apparemment innocentes, par être appelée à Hollywood. La Paramount la mettra sous contrat avec le dessein de la façonner en déesse germanique afin de prendre la suite des Garbo et autre Marlène Dietrich.

Des hommes comme s’il en pleuvait

Elles les a tous connus. Elle les a tous conquis. Malgré la frustration que m’a procuré la lecture de cette longue liste de mâles célèbres qui la côtoyèrent, je ne peux me départir d’une admiration totale à l’égard de cette femme étonnante qui, par son air distant et glacial, avait réussi, un soir, à faire bouillir mon sang.

Dans cet ouvrage, orné de multiples photos et documents, j’ai découvert, page 62, le portrait d’Ursula gamine, tresses blondes et sourire candide, dans les tonalités grises et douces des images de ces années-là.

J’ai songé à la petite fille d’Ostermundigen qui de Daniel Gélin à Alain Delon ou Jean-Paul Belmondo, en passant par Marlon Brando, James Dean ou Noël Howard, a réussi à collectionner des amours innombrables et célèbres.

Destin extraordinaire raconté par Patrick Meier, le collectionneur, et son complice passionné de cinéma Philippe Durant, je vous conseille de courir chez votre libraire préféré et de vous procurer ce pavé passionnant et extrêmement révélateur sur le parcours stupéfiant d’une icône à jamais incrustée dans le cœur des hommes qui, comme moi, l’avaient découverte sortant d’une mer azuréenne …

Rolf Kesselring, swissinfo.ch

Berne. Ursula Andress est née le 19 mars 1936 à Ostermundigen, à côté de Berne.

Rome. Elle débute en Italie en 1954 dans «Un Americano à Roma».

007. C’est sa prestation dans «James Bond contre Dr. No», de Terence Young, face à Sean Connery, qui lui apporte la célébrité.

Bikini. Le bikini qui l’habille dans la fameuse scène a été vendu 41’125 livres (98’700 francs) lors d’une vente aux enchères en 2001 (lire «Le coton au prix de l’or»).

Filmographie. Quelques titres:

– L’idole d’Acapulco de Richard Thorpe. (1963)

Les Tribulations d’un Chinois en Chine de Philippe de Broca (1965)

– Once Before I Die de John Derek (1966)

– Le Crépuscule des aigles (The Blue Max) de John Guillermin (1966)

– Soleil rouge de Terence Young (1971)

– Le Choc des Titans (Clash of the Titans) de Desmond Davis (1981)

Vie privée. Elle a été mariée au réalisateur américain John Derek de 1957 à 1966, a été la compagne de marlon Brando et de James Dean, et a eu un fils, Dimitri, avec l’acteur américain Harry Hamlin.

«Ursula Andress» de Patrick Meier et Philippe Durant.

Editions Favre.

384 pages.

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