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Défendre le droit d’informer en Suisse et dans le monde

Famille soudanaise dans un camp de réfugiés, 2008. Zalmaï

En publiant un premier album consacré au photographe afghano-suisse Zalmaï, la section suisse de RSF illustre son engagement en faveur du droit d'informer. Une exigence citoyenne malmenée aussi bien par les régimes autoritaires que dans les démocraties.

Qu’il photographie à Cuba, aux Philippines, à New York ou en Afghanistan, Zalmaï affirme un point de vue sur le monde. Par son regard fait d’empathie, ce reporter suisse et afghan témoigne de réalités qu’on préfère souvent ne pas voir.

Il incarne ainsi parfaitement l’engagement de l’ONG Reporters Sans Frontières. Rien d’étonnant donc que la section suisse de l’ONG l’ait choisi pour son nouvel album de promotion, selon une tradition lancée il y a une vingtaine d’années par le siège parisien de l’organisation.

«Difficile d’expliquer aux jeunes générations qui marchent sur des journaux gratuits en allant à l’école ou au travail que l’information n’est pas garantie et qu’elle a une valeur», relève Thérèse Obrecht, la nouvelle présidente de la section suisse de Reporters sans frontières.

Avant de souligner: «Plus qu’un privilège des journalistes, nous défendons un droit citoyen, celui d’informer et d’être informé.»

Un objectif que l’association va thématiser – début juin à Genève – avec un festival intitulé «Caméra témoin: 32 films pour le droit à l’information». Durant une semaine, les spectateurs pourront confronter l’approche de la fiction, du documentaire et du reportage sur une série de thèmes d’actualité.

Cap sur la Suisse allemande

Malgré ses faibles moyens, RSF Suisse tente en effet d’accroître sa visibilité. «Nous voulons mieux nous faire connaître, en Suisse alémanique en particulier, détaille Thérèse Obrecht. Et ce depuis notre bureau de Zurich. Les premiers échos sont très favorables.»

Même en Suisse en effet, la défense du droit d’informer est une nécessité. «Dans les pays autoritaires, il est assez facile de voir et de dénoncer les entraves à la liberté de la presse. Mais en Suisse aussi, il y a des problèmes, comme en témoignent les effets de l’article 293 du code pénal qui réprime la publication de documents officiels secrets. Quand il y a une fuite, les autorités font des perquisitions dans les médias concernés et lancent des procès à l’encontre des journalistes, alors que l’informateur, lui, n’est souvent pas inquiété. C’est unique en Europe», s’indigne Thérèse Obrecht.

Une autre menace plus diffuse pèse sur la profession. Avec la crise actuelle, les journalistes, comme les autres salariés, ont peur de perdre leur emploi. «En conséquence, ils risquent de devenir très dociles. Une tendance qui ne peut qu’affaiblir encore l’enquête, soit l’essence même du journalisme» relève Thérèse Obrecht.

Un métier périlleux

«J’espère que cette crise qui touche tout particulièrement le monde des médias nous permettra de poser les vraies questions sur le sens du journalisme. Sommes-nous juste des passeurs d’informations ou pouvons-nous avoir un point de vue?», demande l’ancienne correspondante à Moscou.

Pour autant, les formes les plus brutales de contrôle de l’information persistent. «L’année dernière, le nombre de journalistes tués (60) était en baisse par rapport à 2007, même s’il est toujours aussi périlleux de pratiquer ce métier dans certains pays, comme la Russie. De plus, la répression se déplace de plus en plus vers la blogosphère, à mesure que les médias y migrent», signale Thérèse Obrecht.

Fort de ce constat global, on pourrait s’attendre à une situation calamiteuse en Afghanistan, un pays en guerre où l’Etat de droit vacille sous les coups de boutoir des forces talibanes.

L’exemple afghan

«L’Afghanistan est un grand blessé craignant de mourir. Ce pays a toujours besoin de soins intensifs. Il ne peut pas encore penser la manière dont il va se relever de ses blessures. Dès lors parler de gagner les cœurs et les esprits des Afghans, comme le font les Américains, est pour le moins prématuré», constate Zalmaï qui séjourne régulièrement dans son pays natal

Quoi qu’il en soit, la liberté de la presse y est plutôt bien respectée. «Après la chute des Taliban en 2001, des dizaines de journaux ont été créés, tout comme des radios libres et des chaînes de télévision. Ces médias n’ont pas beaucoup de moyens, les journalistes sont jeunes, sans grande expérience», souligne Zalmaï.

«Il y a donc une relative liberté d’expression, malgré l’existence de certains sujets tabous comme les chefs de guerre ou la religion», conclut-il.

Frédéric Burnand, Genève, swissinfo.ch

Persécuté. L’ONG défend les journalistes emprisonnés ou persécutés pour leur activité professionnelle.

Liberté. RSF lutte pour faire reculer la censure et les restrictions à la liberté de la presse.

Bourse. Elle accorde chaque année une centaine de bourses d’assistance pour les journalistes ou les médias en difficulté, ainsi qu’aux familles de reporters emprisonnés,

Conflits. RSF agit pour améliorer la sécurité des journalistes, notamment dans les zones de conflits.

Monde. L’action de Reporters sans frontières est relayée sur les cinq continents grâce à ses sections nationales (France, Allemagne, Autriche, Belgique, Canada, Espagne, Italie, Suède et Suisse), ses bureaux à Bangkok, Londres, New York, Tokyo et Washington, et son réseau de plus de cent vingt correspondants.

Membre. Nul besoin d’être journaliste pour devenir membre de RSF.

Festival « Caméra Témoin: 32 films pour le droit à l’information » se tient à Carouge (canton de Genève) du 3 au 9 juin 2009, au cinéma Bio.

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