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La presse salue le «roi» Couchepin, moins son bilan

Keystone

Toute la presse suisse fait sa une de la démission du conseiller fédéral annoncée vendredi pour la fin du mois d'octobre. Un «roi» souvent goûté pour son côté visionnaire, moins pour son bilan au Département de l'Intérieur.

«Retraité», titre Le Nouvelliste. Selon le quotidien du Valais, son canton, «cette grande figure du radicalisme» n’a pas été un «gestionnaire» mais un «conseiller fédéral qui décide, même par temps d’orage».

A Genève, Le Temps contemple «La grande sortie» d’un Pascal Couchepin quittant «une fonction qui l’a peut être grandi, mais qu’il a à coup sûr grandie».

Au-delà d’un bilan «fatalement mitigé», il «aura incarné une dimension cardinale en une période qui le réclamait: le respect des institutions et de l’autorité de l’Etat».

Son «insoumission à l’opinion [publique] était chez lui le revers d’une discipline d’Etat intransigeante», juge le journal. La Neue Luzerner Zeitung ironise, elle, en français: «Le roi Pascal Couchepin est mort. Vive le roi!»

Pour le journal de Lucerne, le démissionnaire est un ministre «qui aime son pays. Mais aussi un conseiller fédéral qui, dans la Suisse républicaine, avait des côtés quasi royalistes.» Un ministre dont «l’ego» dominait le gouvernement.

«Un géant s’en va», estime Le Matin. Un géant qui annonce sa démission, «comme le reste, avec la tendresse du papier de verre».

Mais sur le fond, «blindé par le combat» puisque venant d’un parti minoritaire dans son canton le Valais, Couchepin a été «un des seuls membres du gouvernement à opposer un vrai discours à la montée de l’UDC (droite conservatrice)». Et c’est ce que retiendra l’histoire, estime le quotidien édité à Lausanne.

«Provocateur et visionnaire»

«Le croisement d’un provocateur et d’un visionnaire», c’est l’avis de la Neue Zürcher Zeitung, proche de son parti, qui souligne le «format extraordinaire» d’un ministre «hors des normes et de la forme helvétiques».

A Fribourg, La Liberté observe que le ministre fut «l’homme des essais. Peu furent transformés. Mais qui lui reprochera d’avoir tenté, bousculé, osé, provoqué dans un monde politiquement si policé?»

A l’heure du bilan, le journal rappelle que «Tartarin des Alpes n’a ramené que de maigres trophées», sur le dossier miné de la santé notamment.

«En fait, le ministre de l’Intérieur, peu porté sur les détails domestiques où se terre la diable et se cache la poussière, aura surtout brillé à l’extérieur, au bal des idées et à la cour des grands, fréquentée avec volupté.»

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Bilan critiqué à l’Intérieur

A Lausanne, 24 Heures salue notamment en Couchepin la capacité «à secouer le landernau» même si «à l’inverse de son impact personnel», le bilan politique du Valaisan s’avère «plutôt maigre».

A Zurich, le Tages Anzeiger a la dent encore plus dure. Le quotidien aurait préféré au provocateur, à l’homme d’Etat philosophant, un ministre de la santé et des assurances sociales «fort».

Pour ce journal, il a manqué au ministre de l’Intérieur l’essentiel pour mener des réformes efficaces: «Le travail de fond, la connaissance des détails et la crédibilité. Son départ signifie donc aujourd’hui plus d’espoirs que de regrets – même au sein de son propre parti.»

Des flèches encore dans la Basler Zeitung. Le journal reconnaît que la polarisation politique croissante de ces dernières années explique en partie aussi «l’échec» du ministre en matière de politique de santé.

Mais «Couchepin était un provocateur, constate le journal de Bâle. «Le résultat: des fronts durcis et le marasme en matière d’assurances sociales.»

«Le besoin d’un Obama»

«Le bon moment» pour partir, en conclut en français la Berner Zeitung. Le quotidien de Berne observe que le partant s’est mis les médecins à dos et laisse la politique des assurances sociales et de la santé dans une «impasse».

Ceci dit, sa capacité à penser autrement, hors de l’intérêt partisan ou de l’air du temps sont salués par le journal, qui n’en exige pas moins de la part de son futur successeur. Car «le Conseil fédéral n’a besoin ni de girouettes ni de soldat d’un parti.»

S’agissant de l’après-Couchepin justement, Le Temps craint les «longues manœuvres tactiques et les épuisants calculs politiciens. (…) L’ironie serait amère car rien n’inquiétait plus Pascal Couchepin, dans sa vision de notre société, que cette désagrégation de la notion de bien commun au profit d’intérêts catégoriels et de batailles partisanes.»

En annonçant son départ, Pascal Couchepin a lâché la meute des candidats à sa succession, constate la Tribune de Genève. Avec le risque de voir élu un candidat «falot, insipide, produit d’un compromis. Or la Suisse a plus que jamais besoin d’un Obama. C’est un visionnaire qu’il nous faut au Conseil fédéral, pas un gestionnaire»…

Pierre-François Besson, swissinfo.ch

Annonce. Agé de 67 ans, le conseiller fédéral libéral-radical (droite) a annoncé vendredi sa démission pour le 31 octobre.

Poste. A l’exécutif national depuis 1998, président de la Confédération en 2003 et 2008, il a été patron du Département fédéral de l’économie jusqu’en 2003, avant de passer à celui de l’intérieur.

Domaines. A ce titre, il chapeaute les assurances sociales, la santé, l’éducation et la recherche, les politiques familiale, de la jeunesse, de la culture ou les questions relatives aux religions.

Bilan. Sa carrière politique de 41 ans a été ponctuée de 27 élections, sans échec, et de 22 campagnes de votation conduites au nom du gouvernement, dont dix-neuf gagnées.

Conseil. Eternel dernier des sondages, le ministre a constaté vendredi qu’il n’y avait pas besoin d’être aimé des sondages pour durer. Il a appelé à se méfier des enquêtes d’opinion, du «bling-bling, du spumante» pour aller plutôt au fond des choses.

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