
Le sida progresse, l’aide diminue

L'Aide suisse contre le sida lance un véritable appel au secours: les autorités cantonales et fédérales doivent cesser de se désintéresser du phénomène.
Pour la première fois en dix ans, on constate une recrudescence des infections par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) nouvellement diagnostiquées. Cette augmentation atteint 10% cette année, selon les estimations de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP).
Parallèlement, les moyens mis à disposition pour lutter contre l’épidémie causée par le VIH ont diminué de 6 millions de francs en cinq ans, alors qu’ils s’élevaient encore à 15 millions en 1996.
Mieux vaut prévenir que guérir
Forte de ce constat, Ruth Rutmann, présidente de l’Aide suisse contre le sida (ASS), a lancé un appel énergique aux autorités. Lors d’une conférence de presse, Mme Rutmann a estimé mardi à Berne que la somme de 9 millions de francs prévue par le budget 2002 – en cours de discussion au Parlement – ne suffit pas, et de loin.
L’ASS estime donc qu’il est urgent d’augmenter les ressources de la prévention. En effet, selon une étude récente de l’Université de Lausanne, celle-ci coûte moins cher que le traitement médicamenteux du sida.
Selon Mark Baecher, porte-parole de l’ASS, «cette étude montre que les coûts de la prévention s’élèvent à 73 000 francs par personne, alors que les traitements occasionnés par le virus atteignent 500 000 francs en moyenne par malade. Le nombre de cas ayant diminué ces dernières années, la prévention a, du coup, été peu à peu désinvestie par les autorités.»
Les cantons ne jouent pas leur rôle
En outre, l’association observe que les cantons ne se sont pas substitués à la Confédération dans le financement des différentes activités de prévention, comme cela avait été recommandé par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP).
A Soleure par exemple, il n’existe plus d’antenne sida «parce que le canton n’a pas assumé ses responsabilités». Ainsi, environ 200 personnes touchées par le VIH dans le canton n’ont plus de centre auquel s’adresser. Et d’autres pourraient également disparaître faute de moyens, comme celui d’Argovie.
Gare à la banalisation
Mark Baecher interprète ce désistement par «une banalisation croissante du sida au sein du public et du monde politique». «Il existe maintenant des thérapies contre le virus et beaucoup croient que la maladie se guérit, ce qui est faux», déclare-t-il.
Le chiffre de 10% d’augmentation des cas a été mis en doute lundi par le professeur Bernard Hirschel de l’Hôpital universitaire de Genève, qui attribue cette augmentation à l’importance des fluctuations dans les déclarations faites par les médecins.
Ces différentes constatations amènent Ruth Rutmann à conclure que l’ASS n’a pas encore rempli son mandat. Mais elle estime que «plus que jamais, notre travail est indispensable» pour empêcher les nouvelles infections, soutenir les personnes touchées et promouvoir la solidarité.
Nouvelle campagne
Selon les chiffres de l’OFSP, 58% des nouvelles infections sont dues à des contacts hétérosexuels et la part des hommes touchés ne cesse d’augmenter, passant de 10,4% en 1988 à 41% en 2000.
Ces constatations ont incité l’ASS à lancer un nouveau programme de prévention à l’occasion de la Journée mondiale du 1er décembre. A ce titre, un nouveau projet intitulé «Donner une voix aux hommes» a été inauguré dans les cantons de Lucerne, Zoug et Schwyz.
La campagne 2001, qui pourrait, à terme, devenir nationale, vise à sensibiliser les hommes hétérosexuels aux risques d’une infection. Elle s’adresse surtout aux hommes «mais chacun d’entre nous est invité à prendre au sérieux sa santé et celle des autres», a souligné le président de la Confédération Moritz Leuenberger dans son appel à la générosité à l’occasion de la Journée mondiale.
Isabelle Eichenberger

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