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Bientôt un vrai parc pour les ours de Berne

C'est au marteau pneumatique que la conseillère communale Barbara Hayoz a percé le premier trou du chantier. Manu Friederich

Après 500 ans de captivité dans quatre fosses successives, les ours de Berne auront prochainement leur parc. Coup d'envoi des travaux ce lundi 14 janvier.

Des travaux entamés en grand pompe par le percement d’un trou dans la fosse actuelle, d’où un tunnel permettra aux plantigrades de rejoindre un espace planté d’arbres et de buissons et arrosé par un bras de rivière.

«Ils pourront vivre comme de vrais ours au milieu de la ville», se réjouit Barbara Hayoz, membre de l’exécutif de la capitale qui s’est beaucoup investie pour faire aboutir ce projet.

Lorsque le parc ouvrira en 2009, les visiteurs pourront regarder les animaux depuis la terrasse de la fosse actuelle, et également depuis un chemin qui longera l’Aar.

Tout a évidemment été pensé pour assurer la sécurité. Notamment en cas de débordement massif de la rivière, comme celui qui s’est produit en 2006. «Nous devrons être capables de les faire revenir dans la fosse en les attirant avec de la nourriture», explique le directeur du site.

«Et si cela ne marche pas, un vétérinaire leur administrera un tranquillisant afin que nous puissions les ramener dans une camionnette, poursuit Bernd Schildger. Et dans le cas où le vétérinaire ne serait pas disponible et que nous n’en trouvions aucun dans un rayon de 100 kilomètres, alors seulement, nous nous résoudrions à abattre les animaux».

Une hypothèse qui fort heureusement a donc très peu de chances de se réaliser.

Par le passé, la fosse a pu abriter plus d’une douzaine d’ours, mais il n’y en a plus actuellement que deux, Pedro et Tana, nés en 1981 de la même mère. Le frère et la sœur devraient donc être les premiers plantigrades à étrenner le nouveau parc. En tous les cas, ils seront les derniers dans la fosse.

Leurs futurs compagnons sont déjà choisis. Il s’agit d’une femelle, qui vit actuellement au zoo de Berne et d’un mâle qui viendra d’Helsinki, en Finlande.

Fort soutien populaire

Le projet du nouveau parc était déjà dans l’air depuis de nombreuses années. Mais la première version aurait coûté 16 millions de francs suisses, facture jugée trop élevée.

C’est Barbara Hayoz qui a donné une seconde vie à l’idée. Arrivée en 2005 à la tête du Département de la sécurité, de l’environnement et de l’énergie de la ville, elle a demandé de nouvelles études pour faire baisser le prix à 10 millions et a convaincu les donateurs d’ouvrir leur bourse.

Les entreprises et les organisations n’ont pas été les seules à répondre présent. Des particuliers, fortunés ou modestes, ont aussi apporté leur contribution. Et l’année dernière, une course organisée en vieille ville a permis de récolter 236’000 francs.

La population de la capitale a soutenu le projet non seulement en donnant de l’argent, mais également en votant. Car une construction publique de cette envergure passe obligatoirement par le verdict des urnes. En juin 2007, 88% des Bernois ont ainsi accepté de donner de l’espace à leurs ours.

Tout le monde les aime

Car ici, on les aime beaucoup. Depuis des générations, aller voir les plantigrades et leur jeter de la nourriture constitue un passe-temps très apprécié. Et la présentation au public des oursons nés durant l’hiver était l’occasion d’une cérémonie très populaire.

Durant des siècles, les ours ont également été de toutes les processions et aujourd’hui encore, le Carnaval de Berne commence par une «libération de l’ours», qui voit un homme affublé d’une tête d’ours sortir de la ville par l’une de ses anciennes portes.

Mais au fil des ans, les Bernois et les touristes avaient commencé à se sentir de plus en plus mal à l’aise face aux conditions de détention des animaux, dans une fosse vétuste et exiguë, qui date de 1857.

Au milieu des années 90, des travaux d’aménagement l’avaient rendue plus accueillante, avec un nouvel étang et quelques blocs de pierre sur lesquels les plantigrades peuvent grimper. Mais ceci n’avait pas suffi aux défenseurs des animaux, qui dès avant le réouverture de la fosse criaient «libérez les ours !».

A vrai dire, ces militants n’avaient rien inventé. Plus de 90 ans auparavant, Lénine, qui séjourna en Suisse avant la révolution russe de 1917, venait leur lancer des carottes en criant «les ours doivent être libérés !»

Désormais, ils n’ont plus qu’un an à attendre. Et cette fois, la «libération des ours» sera plus qu’une simple mascarade de Carnaval.

swissinfo, Julia Slater
(Traduction de l’anglais: Marc-André Miserez)

Selon la légende, le fondateur de Berne, le duc Berchtold V de Zähringen a donné à la ville le nom du premier animal qu’il a tué sur le site choisi pour établir la cité. S’agissant d’un ours, ou Bär en allemand, la ville se nomme Berne et l’animal se retrouve sur ses armoiries.
Il y a près de 500 ans que la ville garde des ours. L’actuelle fosse est la quatrième qui a été construite au fil des siècles.
Par ailleurs, la ville regorge de statues d’ours, à voir en particulier sur plusieurs de ses fontaines du 16e siècle.

Voici la description qu’un voyageur anglais fait de la fosse aux ours de 1825:

«Les gens de tous âges et de toutes conditions ne se lassent jamais de regarder ces animaux et de se pencher avec délices sur les bords de la fosse. Les plus riches consacrent parfois une pièce à l’achat de poires ou de pain d’épices à jeter aux ours… Si l’ours attrape un morceau de pain d’épices dans ses pattes, alors, le bonheur du spectateur est complet.»

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