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Wawrinka ou le triomphe du travail et de l’humilité

Stanislas Wawrinka prend la pause à Melbourne au lendemain de sa victoire en finale contre Rafael Nadal. Reuters

Vainqueur de son premier tournoi du Grand Chelem à l’orée de ses 30 ans, Stanislas Wawrinka reçoit un hommage appuyé de la presse helvétique ce lundi. Héros modeste et travailleur, le Vaudois, nommé Suisse de l’année en 2013, est désormais promis à une fin de carrière radieuse.

Stan The Man, Stanimal, Stantastisch, Standing Ovation ou encore Grand Stan: les quotidiens helvétiques ne manquent pas d’imagination à l’heure de célébrer dans une même ferveur l’exploit de Stanislas Wawrinka, vainqueur dimanche à Melbourne de Rafael Nadal et de son premier titre majeur. «La finale ‘tronquée’ face à Rafael Nadal ne doit pas ternir le formidable parcours de Stanislas Wawrinka. Le Vaudois a pleinement mérité son premier titre dans un tournoi du Grand Chelem», estime L’Express de Neuchâtel.

La Neue Zürcher Zeitung (NZZ) rappelle que Stanislas Wawrinka, nouveau no3 mondial, est le premier à battre Novak Djokovic et Rafael Nadal, les deux meilleurs joueurs de la planète, dans un même tournoi du Grand Chelem. «Le succès de Wawrinka ne vient pas de nulle part», souligne le quotidien zurichois, pour qui le tournant est survenu il y a un an à Melbourne et sa défaite épique en cinq sets en huitièmes de finale face à Novak Djokovic. «Elle lui a donné la certitude qu’il pouvait rivaliser avec les meilleurs».

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La victoire du Vaudois en Australie revêt une importance significative dans l’histoire du sport suisse. «Contrairement à tous les géants des sports d’hiver ou du cyclisme, Wawrinka a obtenu l’un des plus grands triomphes dans un sport qui est véritablement mondial», écrit ainsi le journal de boulevard alémanique Blick.

Les autorités politiques suisses ont exprimé publiquement leurs félicitations à Stanislas Wawrinka après sa victoire en finale de l’Open d’Australie. Le Conseil d’Etat (gouvernement) vaudois a félicité «chaleureusement» le tennisman de Saint-Barthélemy (VD) au terme d’une rencontre «d’abord somptueuse, puis aussi surprenante que crispante. Même s’il est difficile de comparer les performances à travers les époques, il s’agit indéniablement d’un des plus retentissants exploits sportifs vaudois de l’histoire».

«La Suisse a suivi vos exploits ce matin. Nous y avons cru avec vous. Bravo pour ce tournoi magnifique de force et de courage de l’autre côté du monde», a quant à lui écrit Didier Burkhalter, président de la Confédération. Autre ministre francophone, Alain Berset s’est quant à lui fendu d’un tweet. «Vibré avec tous les Suisses et bien d’autres devant le match! Merci et bravo!», a écrit le Fribourgeois.

Stanislas Wawrinka est le premier Romand à remporter un titre majeur du Grand Chelem, un des quatre grands tournois du circuit mondial de tennis. Seul avant lui le Genevois Marc Rosset s’était distingué avec un titre au plus haut niveau; c’était la médaille d’or des Jeux olympiques 1992 à Barcelone.

Source: ATS

Un travailleur acharné

Certes, on est encore loin des 17 titres du Grand Chelem remportés par son ‘pote’ et compatriote Roger Federer, considéré par ses pairs comme le plus grand tennisman de tous les temps. Mais contrairement à celui de Federer, l’avènement, tardif, de Wawrinka est une surprise, comme le relève l’éditorialiste de Blick: «Le monde du tennis n’attendait rien d’autre que des actes extraordinaires de la part des génies que sont Martina Hingis et Roger Federer. Travailleur acharné, Stanislas Wawrinka surprend au contraire tout son monde. Lui-même y compris»

Pour le Tages-Anzeiger, l’autre grand quotidien zurichois, Stanislas Wawrinka marque rien de moins que le «triomphe du travail, du courage et de l’humilité». Car, écrit le journaliste René Stauffer, biographe officiel de Roger Federer, «Stanislas Wawrinka a toujours été exceptionnel: exceptionnellement modeste, exceptionnellement travailleur, exceptionnellement audacieux et exceptionnellement humble. Il a appris à accepter la défaite, à en tirer des leçons, encore et encore. Et parce qu’il a eu la chance de s’entourer des bonnes personnes et d’en tirer profit, il est devenu un vainqueur. Et quelle sorte de vainqueur!»

Même ode à l’humilité de Stanislas Wawrinka dans La Liberté de Fribourg, qui rappelle son enfance et son éducation anthroposophique [courant de pensée et de spiritualité créé au début du XXe siècle par Rudolf Steiner] dans le petit village vaudois de Saint-Barthélémy: «’Stan’ a gagné, et les ennuis commencent. A lui de les transformer en simples désagréments. Comment? En n’oubliant pas d’où il vient et combien le garçon soi-disant sans talent qu’il était à 14 ans a travaillé.Qu’il boive à la santé des perdants méritants, des numéros deux ombrageux, des timides qui se soignent, des ados boutonneux, des revers à une main broyés par le coup droit de Nadal, des David qui n’ont jamais battu Goliath et de tous ceux qui rêvent, un jour, de changer de vie. ‚Stan‘ est un héros. Mais le héros des petites gens, pas des nantis.»

Keystone

Comme le bon vin

Durant des années, Wawrinka lui-même n’a pas cru en ses capacités, rapporte L’Aargauer Zeitung. «Le manque de confiance en lui l’a toujours fait trébucher. Même sa femme Ilham dit de lui qu’il est timide». Mais à force de détermination et d’obstination, Stanislas Wawrinka a conquis les sommets.

«Sur son bras gauche, il a fait tatouer une citation de Samuel Beckett: ‚Ever tried. Ever failed. No matter. Try again. Fail again. Fail better‘ (Toujours essayé. Toujours échoué. Peu importe. Essaie encore. Echoue encore. Echoue mieux), écrivent 24heures et La Tribune de Genève. Il en a fait sa philosophie, sa source d’inspiration. C’est pourtant avec le seul bras droit qu’il frappe son revers comme d’autres jouent du violon.»

Pour la Basler Zeitung, il est fort possible qu’il ne s’agisse pas simplement d’une gloire passagère. «Son agent Lawrence Frankopan dit de lui: ‘Stan est comme le bon vin: plus il vieillit, plus il devient bon’. Ce sont là de belles perspectives pour les mois à venir.»

«L’histoire sans fin»

Doit-on parler d’un conte de fée du tennis suisse? ‘L’histoire sans fin’ convient mieux, estime Blick. «L’avènement de Stanislas Wawrinka donne au tennis suisse une grandeur rare, dans l’un des sports les plus prestigieux du monde», renchérit Le Matin.

Et le quotidien édité à Lausanne de rêver désormais d’une nouvelle association victorieuse de Stanislas Wawrinka et de Roger Federer, qui avaient remporté l’or olympique en double aux Jeux olympiques de Pékin en 2008. «C’est le moment ou jamais. Il faut tenter de remporter la Coupe Davis. Parce que deux talents exceptionnels atteignent un point de convergence. Parce que le tirage au sort est très favorable. Parce que, en étant carriériste ou romantique, ce but a désormais un sens.»

La Suisse jouera précisément le week-end prochain en Serbie le premier tour de la Coupe Davis. Stanislas Wawrinka, désormais no1 suisse, ne manquera pas à ses obligations patriotiques, alors que, selon plusieurs quotidiens helvétiques, Roger Federer, qui a souvent boudé l’événement ces dernières années, pourrait s’y inviter en dernière minute.

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