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Un cinéaste titillé par les catastrophes

Dans le film d'Emmerich, un raz de marée détruit New York. Keystone

Ueli Steiger est catégorique: il n'a rien contre les New-Yorkais. Il a juste détruit leur ville pour la troisième fois.

Le cinéaste helvétique évoque le film «Le jour d’après», sur lequel il a travaillé comme directeur de la photographie, et dévoile comment on peut réussir à Hollywood.

«Le jour d’après» – dans lequel il est directeur de la photographie – est le troisième projet d’Ueli Steiger avec le réalisateur allemand Roland Emmerich, l’homme à qui l’on doit «Independence Day» et «Godzilla».

Son dernier film conte à grand renfort d’effets spéciaux un désastre environnemental d’ampleur mondiale consécutif au dérèglement du climat.

swissinfo: Comment êtes-vous arrivé à Hollywood?

Ueli Steiger: J’étais dans une école de cinéma à Londres quand j’ai rencontré le réalisateur Michael Hoffman. Six ans plus tard, j’ai pu travailler avec lui sur son premier film aux Etats-Unis. J’étais ce cameraman suisse un peu bizarre engagé sur un gros projet produit par Robert Redford.

On m’employait dans la deuxième équipe, à filmer des paysages et ce genre de choses. Mais lorsqu’une semaine après le début du tournage, ils ont viré le directeur de la photographie, on m’a demandé de faire le joint en attendant de lui trouver un remplaçant. Je n’ai pas commis d’erreur, j’étais bon marché, on m’a gardé. Première étape.

swissinfo: Comment s’est fait le lien avec Roland Emmerich?

U. S.: J’ai rencontré Roland Emmerich quand on m’a demandé de faire un remplacement comme cameraman sur «Independence Day». J’ai travaillé dix jours au sein de la première équipe, ensuite, ils m’ont gardé dans la deuxième.

Par la suite, Roland m’a proposé «Godzilla» – nouvelle étape. Depuis, nous travaillons ensemble. C’est un très bon réalisateur.

C’est assez fabuleux de pouvoir travailler avec un réalisateur très visuel et qui aime coopérer. Et, ce qui ne gâte rien, nous avons grandi à moins de 200 kilomètres et nous avons le même âge.

swissinfo: Vous avez achevé trois films-catastrophe. Diriez-vous que ce genre devient votre marque de fabrique?

U. S.: Je ne crois pas. J’ai aussi fait beaucoup de comédies. Par exemple «Bowfinger» ou le second Austin Powers. J’ai également travaillé sur des films indépendants, comme les deux derniers réalisés par Dennis Hopper.

J’aimerais bien ne pas être catalogué. Mais d’un autre côté, participer à ce genre de grosse production est très gratifiant. C’est toujours une vraie partie de plaisir.

swissinfo: Ces superproductions sont dominées par les effets spéciaux. Quelle peut être votre influence dans ce genre de film?

U. S.: Les effets spéciaux jouent un rôle énorme. Et certaines des scènes critiques comme la vague géante dans «Le Jour d’après» sont le résultat d’effets spéciaux.

Mais en réalité, dans un film, il y a moins d’effets spéciaux que les gens ne le pensent généralement. La plus grande partie d’un film reste le fait de la photographie classique.

Le visuel d’un film est toujours produit avant d’y ajouter les effets de technique numérique. En tant que directeur de la photographie, je suis donc très impliqué, y compris au niveau de la post-production.

swissinfo: Etant donné que «Le jour d’après» est typiquement une superproduction, le considérez-vous comme un film à thème ou comme un simple divertissement?

U. S.: Ce film est très spécial. C’est une superproduction, mais en même temps, il est très rare que ce genre traite de thèmes spécifiques comme les changements climatiques.

Ce film vous cloue à votre fauteuil. Je l’ai vu sept fois et je suis impressionné; il ne vous lâche pas. Cela dit, son message politique est évident, clairement signifié.

swissinfo: Roland Emmerich entreprend de détruire New York pour la troisième fois dans ce film. Vous ne craigniez pas que ses habitants le prennent mal?

U. S.: Je ne pense pas que Roland s’en soit vraiment préoccupé. New York est simplement la ville idéale pour l’action. C’est celle qui a le plus fort impact lorsqu’il s’agit de raconter une histoire.

swissinfo: Etes-vous considéré comme un cinéaste suisse travaillant à Hollywood ou comme partie intégrante de l’industrie cinématographique américaine?

U. S.: Je suis encore un Suisse travaillant à Hollywood. Mais les étrangers sont nombreux dans l’industrie, notamment les cinéastes. Hollywood a une longue tradition d’accueil de cinéastes non-américains.

swissinfo: Etre étranger, c’est un avantage?

U. S.: Etonnamment, oui. Les bons cinéastes américains sont nombreux. D’une certaine manière, au début, j’ai eu de la chance d’obtenir des jobs qui me convenaient et qui m’ont permis de me faire une réputation.

swissinfo: Est-ce que d’autres Suisses désireux de travailler à Hollywood auraient leurs chances?

U. S.: Il n’y a aucun désavantage à être Suisse. Vous avez toutes les chances de réussir à Hollywood.

Il y a beaucoup de jeunes Suisses qui viennent ici à Los Angeles dans les écoles de cinéma. Et je rencontre sans cesse de fabuleux jeunes talents.

Trouver une place dans une école, un job dans l’industrie, obtenir un permis de travail, ce n’est pas évident. Mais je vois beaucoup de gens qui y parviennent. C’est très encourageant.

Interview-swissinfo: Scott Capper
(traduction: Pierre-François Besson)

– Ueli Steiger a étudié le cinéma à la London International Film School.

– Son premier film américain fut «Promised Land» en 1986. Depuis, il a été directeur de la photographie sur une vingtaine de films.

– Ueli Steiger a collaboré à trois superproductions de Roland Emmerich – «Independence Day», «Godzilla» et «The day after tomorrow» («Le jour d’après», en français).

– Il a également participé à des films comme «Bowfinger» et «Austin Powers: The spy who shagged me».

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