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L’art du verre contre les bleus à l’âme

Lea Amman-Toivanen au travail à Glasart. swissinfo.ch

Récupérer du verre pour le métamorphoser en beaux objets. Cela permet aussi à des gens qui vont mal de se restructurer par le travail communautaire.

Telle est la mission de l’Atelier Recycling Glasart à Berne, une véritable entreprise rattachée au Programme d’intégration par le travail de la fondation Terra Vecchia.

«J’ai toujours eu besoin de faire quelque chose de mes mains, de créer dans le respect de l’environnement et d’aider les gens en difficulté à se structurer.»

Avec cette «idée artistique et écologique transposée dans le travail social», Lea Ammann-Toivanen a créé en 2000 l’Atelier Recycling Glasart au sein du groupe de travail bernois de la Fondation Terra Vecchia.

Cette fondation avait été conçue en 1973 pour venir en aide aux toxicomanes lors de la vague hippie et de l’arrivée des drogues dures. Pour l’un de ses responsables, Markus Roder, «notre but était de venir en aide à des gens entre 15 et 60 ans, menacés dans leur relation avec eux-même et avec le monde».

Une deuxième chance

Puis, dans les années 90 surtout, l’évolution socio-économique s’est chargée de créer de nouvelles «catégories» de personnes fragilisées.

Terra Vecchia offre toujours son programme d’intégration par le travail aux anciens drogués, mais aussi aux rentiers AI, malades psychiques, jeunes en rupture de formation, ex-délinquants, chômeurs.

Avec des activités dans plusieurs corps de métier, du bureau au jardinage en passant par la menuiserie ou les métiers de la construction. «Notre philosophie est de trouver les points forts des gens qui nous arrivent», précise Markus Roder à swissinfo.

Glasart, l’histoire d’une réussite

Glasart figure dans le programme d’intégration par le travail proposé par la fondation en ville de Berne. Sous la direction de Lea Ammann-Toivanen, de 27 à 30 personnes produisent verres à eau, à vin, à liqueur, vases, coupes, bols, coupelles, vases, photophores et autres bonbonnières en verre. Le tout décoré de motifs divers au moyen d’un sablage.

Quelque 50’000 objets sont produits chaque année et livrés à plus de 320 magasins de design, boutiques cadeaux, etc. De quoi financer 30% des frais du groupe travail de la fondation à Berne, le reste étant assuré par les indemnités journalières.

Les verres de Lea Amman-Toivanen (qui crée aussi des objets dans son atelier personnel) ont été exposés plus de 20 fois depuis 1997 et lui ont valu des prix, dont une distinction de la Fondation IKEA en 2003.

Brun ou vert pour les bouteilles de bière, vert plus foncé pour celles de vin, blanc, bleuté ou violet foncé pour celles d’eau, les bouteilles sont soigneusement récoltées dans des centres de recyclage.

Puis le verre est lavé, scié ou coupé à la flamme, aiguisé, poli, décoré (avec de la colle ou du ruban adhésif) et sablé. Un travail de précision. Un artisanat aussi, car chaque objet est fabriqué à la main et en plusieurs étapes. «Ce qui permet de trouver une place à chacun selon ses atouts», précise Lea Amman-Toivanen.

Depuis son arrivée en Suisse en 1978, cette pédagogue sociale finlandaise a travaillé dans différentes fondations actives dans le domaine social.

Trouver la bonne idée

Peu à peu, pour sortir d’une certaine routine, elle a cherché à réorienter son travail. Ayant également une formation commerciale et rêvant depuis toujours de trouver une voie artistique, voire de créer son entreprise, elle a cherché une idée à partir d’une matière première bon marché.

Elle l’a trouvée en 1996 en Finlande, son pays d’origine, connu pour son industrie verrière, chez un fabriquant d’objets en verre recyclé. «J’ai été fascinée par l’idée de prendre un objet qui a servi et d’en faire quelque chose de nouveau», raconte Lea Ammann-Toivanen.

«Le travail du verre n’a pas seulement un intérêt artistique ou écologique, mais aussi pédagogique, ajoute-t-elle. Le travail est très structurant parce qu’il est très structuré. Chaque étape est bien distincte et peut être accomplie par des gens qui ne sont momentanément pas en mesure d’effectuer des tâches plus complexes.»

C’est ainsi qu’après avoir suivi un an de formation à la Haute école d’art et de design d’Helsinki, Lea Ammann-Toivanen est revenue à Berne pour mettre en pratique son projet. Mais elle s’est vite aperçue qu’il était impossible d’ouvrir sa propre entreprise, pour des raisons financières.

Une productivité fluctuante

En effet, la fabrication prend du temps: un peu moins d’une heure pour un verre. C’est un travail simple et plutôt répétitif, mais ce n’est pas non plus un travail à la chaîne, puisque presque tout se fait à la main.

Et puis, la productivité d’une main d’œuvre constituée de gens fragilisés n’est pas très fiable, avec un fort taux d’absentéisme ou des difficultés de concentration.

Ce lundi-là, seules 7 personnes sont au travail à Glasart. Où sont les 20 autres? «Il y a la grippe, mais certains ont peut-être du mal à supporter leurs médicaments, ou ils sont tout simplement incapables de venir travailler», répond la responsable.

Résultat: les commandes ont parfois du mal à suivre. Mais, comme Lea Ammann-Toivanen aime les gens, elle est donc restée dans le cadre social et a réintégré la Fondation Terra Vecchia.

«Les gens qui passent chez nous – ils restent entre trois mois et un an – ont besoin de reprendre confiance en eux et de renouer un contact avec les autres, de s’entraider, explique Markus Roder. Pour cela, il faut leur offrir une place en fonction de leurs points forts, et leur manifester de la patience et de l’empathie. Sinon, ça ne marche pas.»

swissinfo, Isabelle Eichenberger

L’Atelier Recycling Glasart a été créé en 2000 à Berne par Lea Amman-Toivanen au sein de la Fondation Terra Vecchia, sur le principe: «Une idée artistique et écologique transposée dans le travail social».
Il emploie jusqu’à 30 personnes de 15 à 60 ans en quête de réinsertion.
Il produit environ 50’000 objets en verre recyclé, vendus dans plus de 320 magasins.
Depuis 1997, Lea Amman-Toivanen a exposé plus de 20 fois et reçu 4 prix et distinctions, notamment de la Fondation IKEA en 2003.

– La Fondation Terra Vecchia vient en aide aux personnes en difficulté «avec elles-mêmes et le monde actuel». Elle est née en 1973, avec la première vague de toxicomanie entraînée par le mouvement hippie.

– Depuis les années 90, elle vient aussi en aide aux alcooliques, aux jeunes délinquants ou à ceux qui sont en rupture, aux malades psychiques, aux chômeurs ou aux rentiers AI.

– Avec un réseau de 5 groupes de travail, elle permet à chacun de reprendre pied grâce à un programme d’intégration par le travail en communauté.

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