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La courtoisie étudiée au bord du Léman

Archétype des histoires d'amour, celle de Tristan et Iseult est parmi les plus célèbres de la littérature courtoise. internet

Quelque 170 spécialistes du Moyen Age venus du monde entier se retrouvent ces jours à Lausanne et Genève pour le congrès de l'une des trois grandes associations internationales d'études médiévales.

Lors d’exposés ouverts au public, il sera question d’amour courtois et de la manière dont la littérature médiévale s’est appropriée les mythes antiques et celtiques.

Les scénaristes d’Hollywood le savent bien, les amours heureux ne font pas recette. Ce qu’ils savent peut-être moins, c’est que leurs histoires sentimentalement larmoyantes sont tributaires d’une conception de l’amour héritée du Moyen Age.

La même précisément qui est au centre de l’activité de la Société internationale de littérature courtoise réunie cette année en Suisse pour y tenir son 12ème congrès. Plus de 170 médiévistes venus de tous les horizons – du Canada au Japon – y participent du 29 juillet au 4 août.

Organisatrices de ce colloque, les facultés des lettres des Universités de Genève et de Lausanne ont prévu un programme de sept jours, dont un d’excursion, le 1er août, jour de la fête nationale helvétique.

Le rôle des troubadours

Mais plutôt que de feux d’artifice, c’est de feux de la passion dont il sera question lors de la centaine d’exposés prévus, tous ouverts au public. Car le vaste phénomène de société qu’est la courtoisie a pour origine un art d’aimer chanté par les troubadours dès le 12ème siècle dans les cours du sud de la France.

Idéalisation de la ‘dame’, attitude chevaleresque de l’amant, contournement des interdits de l’Eglise. La poésie courtoise a inventé un schéma de comportement toujours présent dans l’imaginaire sentimental occidental.

«Ce qui fait la spécificité de la culture médiévale, c’est d’être le creuset de notre imaginaire en matière de relations amoureuses. Il s’est passé là quelque chose qui a marqué la codification des rôles sociaux des sexes. Depuis, on considère que ce sont les hommes qui doivent faire leurs avances, qui doivent ‘courtiser’», souligne Yasmina Foehr-Janssens, professeure à l’Université de Genève et membre de l’organisation de ce congrès.

De Narcisse à Merlin

Davantage qu’un simple discours amoureux, la courtoisie est aussi un miroir dans lequel se reflète l’idéal de la société aristocratique du Moyen Age. D’où le choix du thème ‘Mythes à la cour, mythes pour la cour’ pour ce 12ème congrès international.

De Narcisse à Merlin, de Sémiramis, reine de Babylone, à la fée Mélusine, les grandes figures mythologiques qui apparaissent dans les textes courtois sous la plume par exemple de Marie de France ou de Chrétien de Troyes préexistent aussi bien dans la mythologie celtique que, fait moins connu, dans celle de l’Antiquité.

«Les enjeux de ces références sont à la fois politiques, car les grands princes aiment à se représenter comme de nouveaux Alexandre, sociaux, car la mythologie offre une sorte de vie rêvée aux membres de la cour, et bien sûr esthétiques», relève Yasmina Foehr-Janssens.

Patrimoine médiéval romand

Choisie parmi plusieurs autres candidatures pour accueillir le 12ème congrès de la Société internationale de littérature courtoise, la région lémanique avait pour elle la richesse de son patrimoine médiéval architectural et artistique .

Sans oublier, sur le plan littéraire, l’œuvre d’Othon de Grandson. Reconnu par les plus grands auteurs de son temps, ce chevalier vaudois de la fin du 14ème siècle a importé de Grande-Bretagne la matière galante anglaise.

Les congressistes ne manqueront donc pas de se rendre au château de Grandson. Ils visiteront aussi celui de Chillon, les abbayes de Romainmôtier et de Saint-Maurice, ainsi que la capitale suisse, Berne, dont la vieille ville est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1983.

swissinfo, Carole Wälti

L’étude de la littérature du Moyen Age a donné naissance à plusieurs associations qui se sont constituées autour de diverses thématiques. Les plus importantes sont au nombre de trois.

La Société internationale de littérature courtoise a vu le jour en 1973. Depuis, elle se réunit régulièrement en congrès. Elle possède des branches en Suisse, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en France ou encore au Japon.

Un de ses buts est de perpétuer le travail du Suisse Reto R. Bezzola, professeur de langues romanes à l’Université de Zurich durant 30 ans, qui a étudié la courtoisie en tant que phénomène propre à tout l’Occident.

La Société arthurienne internationale a été fondée en 1948. Elle consacre ses travaux à la littérature et à l’iconographie qui porte sur le roi Arthur et sa cour.

La Société Rencesvals a été crée en 1956 aux Pays-Bas. Elle promeut l’étude des épopées et des chansons de geste romanes, ainsi que de leurs développements au-delà du Moyen Age, par exemple dans le roman espagnol.

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