Genève éternue, les autres cantons s’enrhument

Le scandale des Offices des poursuites et faillites fait trembler Genève. Et préoccupe les autres cantons. Il pourrait mettre en lumière les carences qui existent dans d'autres administrations. Notamment au niveau des modes de contrôles internes.
Le gouvernement cantonal genevois met les bouchées doubles pour tenter de limiter les dégâts. Récemment rendu public, un rapport dévastateur de l’Inspection des finances a, en effet, confirmé les graves soupçons qui pesaient depuis deux ans au moins sur ce service.
Une série impressionnante de graves dysfonctionnements et de pratiques frauduleuses ont été mis au jour. Sans attendre, le Conseil d’Etat a ordonné l’ouverture d’enquêtes administratives contre 37 employés et suspendu, avec effet immédiat, 15 d’entre eux.
Problèmes structurels
Au delà des problèmes de personne et des particularités genevoises, cette affaire met en évidence un certain nombre de problèmes structurels qui se sont posés – à des degrés divers – à la plupart des administrations publiques en Suisse.
«Les signaux d’alarme lancés à plusieurs reprises par l’inspection des finances n’ont apparemment pas été pris en compte», constate Nils Soguel, de l’Institut de hautes études en administration publique (IDHEAP) de Lausanne. Il rappelle que cette carence a également été à l’origine des scandales qui ont frappé les banques cantonales de Berne et du Valais.
Nils Soguel souligne également la faiblesse, voire l’absence de systèmes de contrôle interne comme le principe de la double signature: «Cette forme d’autocontrôle fait souvent défaut dans les administrations publiques».
L’usage immodéré des consultants
Membre de la commission de contrôle de gestion du Parlement genevois, le député vert David Hiler, lui, pointe une autre caractéristique du scandale genevois qui a pu également être constatée ailleurs: l’usage immodéré des consultants.
«Depuis les années 80, ce service a eu recours abondamment à des consultants externes, alors même que les responsables de l’Etat ne disposaient pas d’une vision claire de ce qu’ils voulaient faire», souligne David Hiler.
Et ce dernier d’enfoncer le clou: «Le mélange entre une administration fossilisée et peu compétente et des consultants adeptes de la nouvelle gestion publique jargonnant en anglais, ce mélange est catastrophique».
Davis Hiler estime d’ailleurs que cette conception de la gestion de l’Etat est aujourd’hui dépassée. «Les questions actuelles sont les suivantes: quels sont les indicateurs permettant de mesurer l’efficacité d’un service, quel degré de transparence faut-il exiger d’un service et quel type de contrôle faut-il exercer?»
Un avis que ne partage absolument pas Jean-Marc Schwab, responsable de la modernisation de l’Etat de Vaud: «Après la Suisse alémanique, la plupart des cantons romands ont entrepris de réformer leur administration en s’inspirant des principes de la nouvelle gestion publique».
Quant à Nils Soguel, il estime que les dysfonctionnements des Offices des poursuites et faillites n’ont rien à voir avec la nouvelle gestion publique. De fait, ce service n’a pas été soumis à un contrat de prestation, pierre angulaire de cette méthode de gestion.
Frédéric Burnand, Genève

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