Gilles Marchand, un homme du privé pour diriger la TSR

De grands défis attendent Gilles Marchand, le nouveau directeur de la TSR. Keystone

Coup de théâtre dans l´univers impitoyable de la TSR, le successeur de Guillaume Chenevière n´est pas issu du sérail. Directeur depuis 1993 de Ringier Romandie, Gilles Marchand a fait ses armes dans le privé.

La course à la succession vient officiellement de prendre fin avec la désignation de Gilles Marchand, au poste de directeur de la Télévision Suisse Romande (TSR). Le nom du jeune – il a 38 ans! – et tout nouveau patron de la TSR a été divulgué par le Directoire de la Radio Télévision Suisse Romande, réuni jeudi à Lausanne, sous la présidence de Jean Cavadini et en présence d’Armin Walpen, Directeur Général de SRG SSR idée suisse.

Gilles Marchand assume depuis juin 1998 la direction de Ringier Romandie. Préféré des chasseurs de têtes, c’était un outsider dans la course à la succession. Il brûle ainsi la politesse à des personnalités comme Philippe Mottaz – officiellement candidat et actuel patron de l’information – Eric Lehmann, président de la SSR, ou Yves Ménestrier, secrétaire général de la TSR.

Gilles Marchand a été choisi pour ses capacités de manager, son sens de la concertation, sa connaissance du marché et son approche du multimédia. Ces qualités, énoncées dans un communiqué du Directoire de la TSR, devraient lui permettre de relever le double défi lancé aujourd’hui à la TSR: remplir sa mission de service public en sachant répondre aux attentes de l’ensemble des téléspectateurs romands.

Le défi est d’autant plus important que Gilles Marchand a fait ses classes dans le privé. Licencié en sociologie, il a dirigé dès 1988 le département marketing et communication de la Tribune de Genève avant de devenir, en 1991, consultant puis administrateur de Concept Media SA, une société spécialisée dans le conseil aux entreprises.

C’est en 1993 que l’actuel directeur de Ringier Romandie a été appelé par ce groupe de presse pour développer puis diriger un département d’études, de marketing et de communication commun à toutes les publications éditées à Lausanne: L’Hebdo, L’Illustré, TV8, webdo.ch, puis plus récemment Edelweiss et dimanche.ch

Cette désignation met en tout cas fin à une période de flou artistique. Car, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas été facile de dénicher un successeur à Guillaume Chenevière. Il y a deux ans, une première tentative avortée avait même donné lieu à un incroyable cafouillage.

Le Directoire de la RTSR devait, à l’époque déjà, désigner un nouveau patron de la TSR. Raymond Vouillamoz et Jean-Claude Chanel partaient favoris pour prendre la place de Guillaume Chenevière, qui n’avait pas postulé à sa propre succession. Ils étaient suivis, loin derrière, par Béatrice Barton.

A la surprise générale, c’est Guillaume Chenevière qui a été désigné, contre son gré, à sa propre succession. Cette non-décision reflétait l’existence d’un profond malaise au sein de la TSR.

Quelle a été la raison invoquée pour botter en touche des candidatures aussi solides? Jean Cavadini, président du Directoire, l’avait résumée dans ces termes en juin 1998: «Ces deux candidatures (Vouillamoz et Chanel NDLR) n’ont pas permis au Directoire d’acquérir la certitude que les réformes préconisées par Arthur Andersen seraient conduites avec toutes les chances de succès.» Lapidaire et sans appel.

Ces réformes, justement, il revient désormais à Gilles Marchand de les mener à bien. Le chantier est immense. En arrivant de l’extérieur, «j’ai l’avantage de n’avoir aucun à priori, ni liste noire ni liste rouge», a relevé sur les ondes de la RSR Gilles Marchand. Parmi les défis qu’il aura à relever, il cite l’introduction du numérique et la réflexion sur les programmes avec l’arrivée d’une nouvelle concurrence.

Jugurtha Aït-Ahmed