
La BRI assignée en justice par des actionnaires suisses

La Banque des règlements internationaux a racheté de manière forcée les titres des actionnaires privés. Qui protestent.
Moins connue que la Banque Mondiale ou le Fonds monétaire international, la Banque des règlements internationaux est créée en 1930 pour contribuer à la liquidation des réparations de guerre dues par l’Allemagne après le conflit de 1914-1918. Mais, rapidement, cette institution financière change de casquette pour devenir la banque centrale des banques centrales.
A cette époque, les banques centrales française et belge manquent cruellement de liquidités. Et la banque centrale américaine ne s’intéresse pas à la BRI. Résultat: 72 648 actions sont alors vendues dans le public (soit près de 14% du capital). En raison de la situation géographique de l’établissement financier, beaucoup de Suisses se portent acquéreurs.
La BRI est cotée à la Bourse de Zurich (pour les actions des émissions belge et américaine) et à celle de Paris (pour l’émission française). Des actions qui sont particulièrement recherchées. Car elles profitent d’une exonération fiscale, et bénéficient d’un droit d’immunité (en temps de guerre, les vainqueurs ne peuvent pas saisir les titres).
Modification des statuts en 2001
«Aujourd’hui, la BRI se porte très bien. Sur les quatre derniers exercices, l’excédent net d’exploitation a grimpé de 64% et le bénéfice net de 70%. Et certaines banques centrales ont souhaité récupérer leur mise», affirme Fabrice Rémon, de la société Déminor, qui soutient les actionnaires privés.
L’année dernière, lors d’une Assemblée générale extraordinaire, la BRI – qui regroupe 50 banques centrales – décide de modifier ses statuts et d’exclure les actionnaires privés. Ces derniers n’ont eu ni le droit d’y assister, ni le droit de vote.
Ce départ n’a rien de scandaleux: l’intérêt d’un actionnaire privé n’est pas forcément le même qu’une banque centrale. En revanche, ce retrait forcé s’est fait au prix de 16 000 francs suisses l’action.
«Il s’agit d’une estimation beaucoup trop basse, qui ne satisfait pas nos clients en possession de plus de 1000 actions belges et françaises», dénonce Max Rössler, directeur de la banque privée Dominick Company, à Zurich.
En effet, quelques mois auparavant, la BRI accueillait quatre nouvelles banques centrales, dont celles d’Argentine, de Malaisie et de Thaïlande. Et elle leur facturait leurs actions 23 200 francs, soit un prix supérieur de 46%. D’autres calculs mettent la valeur de l’action à 33 900 francs (plus de 100%).
200 actionnaires ont décidé d’assigner la Banque des règlements internationaux et Arthur Andersen (qui a calculé le prix des actions) devant le Tribunal de commerce de Paris. De son côté, l’organisme financier conteste les chiffres, et considère que le prix de 16 000 francs représente, au contraire, une prime de 95%, 105% et 155% par rapport au cours de Bourse des émissions américaine, belge et française.
Ian Hamel

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