La Suisse plaide la cause des pays pauvres les plus endettés
A l’initiative de la Suisse et du Honduras, vingt pays classés parmi les plus pauvres et les plus endettés de la planète se sont retrouvés à Genève. Pour partager leurs problèmes. Et pour dire aussi aux pays riches leurs inquiétudes quant à leur avenir.
«Quinze à vingt pour cent de nos recettes fiscales sont consacrées au service de la dette», explique M.Bio Tchané, ministre béninois des finances, qui ajoute que son pays, depuis dix ans, essaie de mettre en chantier plusieurs programmes de lutte contre la pauvreté, mais que les moyens financiers font largement défaut. Tout simplement parce qu’il doit, comme une quarantaine d’autres pays, emprunter de l’argent pour rembourser les intérêts des emprunts passés.
Cela fait longtemps, trop longtemps qu’on parle de ce cercle vicieux sans y trouver d’issue raisonnable. Les mécanismes traditionnels de rééchelonnement ou de réduction de dette n’y changent rien. Et le résultat, c’est que ce que l’on a baptisé «le fardeau de la dette», sans mesurer vraiment le poids qu’elle fait peser sur la vie quotidienne des gens, est l’un des plus grands obstacles à l’élimination de la pauvreté.
Le ministre suisse de l’économie, Pascal Couchepin, le soulignait à l’ouverture de cette rencontre. Le malheur, disait-il, c’est que parmi toutes les voix qui réclament ou proposent des solutions, «celle des pays bénéficiaires n’a pas encore été entendue». La réunion de Genève visait précisément à donner aux pays les plus concernés l’occasion d’exposer leurs points de vue, de démontrer leurs efforts et d’obtenir des réponses sur des questions tout à fait concrètes: comment bénéficier des nouvelles procédures d’allègement de dettes? à quel prix? avec quels résultats?
Pascal Couchepin définit clairement sa conception des choses. Premièrement, il serait tout à fait contreproductif de surcharger ces pays avec une longue liste de conditions. Il faut se concentrer sur un paquet limité de mesures-clés que l’on peut facilement contrôler. Deuxièmement, il faut que tout le monde fasse preuve de bonne volonté et se partage équitablement le coût de ces allègements de dettes.
C’est là que le bât blesse et inquiète les grands argentiers des pays endettés. Les grandes banques régionales, commente le ministre béninois, tardent à mettre de l’argent sur la table. La ministre des finances du Honduras, Mme Gabriela Nunez De Reyes, qui coprésidait la réunion, va plus loin. «Nos économies sont vulnérables, explique-t-elle. Nous avons aussi besoin d’une ouverture des marchés. Il ne sert à rien de résoudre nos problèmes de dettes si on ne nous laisse pas faire commerce à l’échelle mondiale.»
Que restera-t-il de ces prises de parole? «Le suivi a déjà commencé», répond l’autre coprésident de cette assemblée, le Suisse Laurent Guye. Les représentants de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international étaient à Genève. Ils ont pu entendre les revendications de ces pays. Ils les transmettront à leurs conseils d’administration respectifs. Et les pays riches du G7 en seront informés lors de leur prochain sommet de juillet à Okinawa.
Bernard Weissbrodt
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