Le WWF-Suisse prend la tête de la fronde politique anti-OGM
L’introduction d’organismes génétiquement modifiés (OGM) en Suisse ferait augmenter les coûts de production. C’est la conclusion d’un rapport présenté, mardi à Berne, par le WWF-Suisse qui brandit la menace d’une initiative populaire.
Le gouvernement est placé face à un choix difficile. Soit il accepte un moratoire, soit il s’expose à une initiative populaire réclamant… un moratoire sur l’utilisation commerciale des OGM. Désormais, l’offensive des opposants aux OGM est lancée. Depuis mardi, elle s’est même renforcée. Puisque c’est unis derrière une même revendication que paysans, organisations écologiques et consommateurs ouvrent les hostilités politiques. Et ce, au moment où va s’amorcer le débat au Parlement sur le projet de loi sur le génie génétique (GenLex). Le Conseil fédéral a opté, fin janvier, en faveur d’un système d’autorisation.
«Nous ne voulons pas d’application commerciale des OGM dans l’agriculture jusqu’à 2010», a martelé le conseiller national Fernand Cuche (Verts/NE), au nom de l’Union des producteurs suisses (UPS). Si le moratoire n’est pas décidé lors du débat sur Genlex, «le WWF, l’UPS et les consommateurs lanceront une initiative populaire», avertit Fernand Cuche.
Dans le climat général actuel, caractérisé par une baisse de la côte du génie génétique ( vache folle, fourrage contaminés à la dioxine, etc.), on ne peut exclure une réussite de cette entreprise.
Aux arguments d’ordre éthique et écologique avancés par le front anti-OGM, le WWF vient d’ajouter un argument économique grâce à une étude demandée à la société de conseils zurichoise Basler&Partner. Elle porte sur l’évolution des coûts de six produits représentatifs de l’agriculture suisse (le maïs, le blé, le colza, les pommes de terre, la viande de porc et le lait). Et l’évolution de ces coûts a été analysée dans les trois scénarios en discussion: la renonciation aux OGM, leur usage avec modération – régime des autorisations prôné par le Conseil fédéral – ou sans modération.
Conclusion de cette étude: l’agriculture suisse n’a aucun intérêt économique à se lancer dans la culture des OGM. Il en résulterait en effet des coûts supplémentaires qui pourraient être importants, non seulement pour les producteurs des OGM eux-mêmes, mais également pour les agriculteurs pratiquant la production intégrée (PI) ou l’agriculture biologique. Les consommateurs n’en tireraient en fin de compte aucun bénéfice.
Pour la société en général aussi, les coûts croîtraient en cas d’autorisation des OGM. Les dépenses seraient plus élevées au niveau de l’administration, du contrôle, de l’information de l’opinion publique ou encore de la recherche scientifique.
A la veille des votations sur les bilatérales, le débat prend une tournure encore plus concrète. Car, pour prétendre pénétrer le marché européen, les agriculteurs suisses devront livrer des aliments compétitifs, de haute qualité, produits naturellement et écologiquement. «Cela n’est pas conciliable avec l’usage des OGM», a souligné la conseillère nationale (PS/BE) Simonetta Sommaruga, présidente de la Fondation pour la protection des consommateurs alémaniques.
Autre constat de cette étude: l’utilisation des OGM pénaliserait toutes les formes d’agriculture. Des coûts supplémentaires très importants proviendraient notamment de la nécessité de séparer complètement les diverses filières de production et de valorisation afin d’éviter les contaminations.
Ce qui a amené Fernand Cuche a dénoncer les «conséquences totalitaires» des OGM. «A partir du moment où un paysan utilisera des OGM , il devient impossible de séparer les cultures les unes des autres. Car par pollinisation, par les oiseaux, par le vent, l’ensemble du territoire suisse sera contaminé par les OGM». Pour Fernand Cuche, le seul souci des entreprises agrochimiques productrices de semences OGM, est de «faire des sous».
Jugurtha Aït-Ahmed
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