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Milliers de Palestiniens coincés dans le principal hôpital de Gaza

Les affrontements se concentrent autour d'al-Chifa depuis des jours. KEYSTONE/AP sda-ats

(Keystone-ATS) Des milliers de civils sont toujours coincés mardi dans le principal hôpital de Gaza, au coeur des combats entre Israël et le Hamas. L’établissement est privé d’eau et d’électricité et environ 180 corps y ont été enterrés dans une fosse commune, selon son directeur.

Plusieurs milliers de Palestiniens, des malades, du personnel et des civils déplacés par la guerre qui fait rage depuis le 7 octobre, s’entassent sur le site de l’hôpital al-Chifa, un immense complexe abritant, selon Israël, des infrastructures du mouvement islamiste enterrées dans un réseau de tunnels.

« La situation est très grave, c’est inhumain », a averti Médecins sans frontières (MSF) sur X (ex-Twitter). Au moins « 179 corps » ont été enterrés mardi dans une « fosse commune » creusée dans le complexe de l’hôpital al-Chifa, a annoncé son directeur à l’AFP. Parmi eux figurent sept bébés prématurés morts faute d’électricité pour les maintenir en vie.

« Nous avons été obligés de les enterrer dans une fosse commune », a affirmé le Dr Mohammed Abou Salmiya. « Il y a des corps qui jonchent les allées du complexe hospitalier et les chambres frigorifiées des morgues ne sont plus alimentées » en électricité, a-t-il ajouté. Un journaliste collaborant avec l’AFP à l’intérieur de l’hôpital a raconté que l’odeur des corps en décomposition était étouffante.

Combats toute la nuit

Des chars israéliens sont massés mardi aux portes d’al-Chifa, tandis que les combats et les frappes aériennes aux alentours se sont poursuivis toute la nuit, a-t-il ajouté, moins intenses cependant que les nuits précédentes.

Israël frappe sans répit la bande de Gaza depuis l’attaque lancée sur son sol contre des civils par des commandos du Hamas le 7 octobre, et mène depuis le 27 octobre une opération terrestre dans le but « d’anéantir » le mouvement islamiste, au pouvoir dans le territoire palestinien assiégé.

Du côté israélien, environ 1200 personnes ont été tuées, selon les autorités, en grande majorité des civils tués le jour de l’attaque. L’armée israélienne a annoncé mardi que 46 soldats avaient été tués depuis le début de la guerre.

Dans la bande de Gaza, les bombardements israéliens ont tué au total 11’240 personnes, majoritairement des civils, parmi lesquels 4630 enfants, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Une soldate otage tuée

L’armée israélienne estime par ailleurs que quelque 240 personnes ont été emmenées en otages dans la bande de Gaza au cours de l’attaque du Hamas. Elle a annoncé mardi la mort de Noa Marciano, une soldate de 19 ans otage du Hamas, au lendemain de la diffusion par le mouvement islamiste d’une photo la présentant comme « tuée par un bombardement » israélien.

Le Hamas accuse Israël de « tergiverser » dans les discussions, via une médiation du Qatar, portant sur la possible libération de dizaines d’otages contre une trêve. Des proches d’otages ont prévu une marche mardi de Tel-Aviv au bureau du Premier ministre à Jérusalem, afin de faire pression sur Benjamin Netanyahu pour favoriser leur libération.

Lundi, un porte-parole de l’armée israélienne avait affirmé que les soldats « avaient trouvé des signes » montrant la présence d’otages détenus par le Hamas, dans une vidéo tournée dans une cave de l’hôpital pour enfants Al-Rantissi à Gaza. Il a montré des images d’un biberon et d’un vêtement près d’une chaise, ainsi que des fusils d’assaut, des grenades et ce qu’il a présenté comme « des ceintures d’explosifs ».

« Des gens vont mourir »

Le gouvernement du Hamas avait affirmé lundi que tous les hôpitaux du nord de la bande de Gaza, où se concentrent les combats les plus violents, étaient « hors service », faute d’électricité et de carburant. Le président américain Joe Biden a appelé Israël à la retenue, affirmant que l’hôpital al-Chifa devait « être protégé ».

L’ONU ne cesse de réclamer l’envoi de carburant à Gaza, notamment pour alimenter les générateurs dans les hôpitaux.

Le territoire est soumis depuis le 9 octobre par Israël à un siège complet qui prive sa population d’eau, d’électricité, de nourriture et de médicaments. Mais Israël refuse de laisser passer du carburant, affirmant qu’il pourrait être utilisé par le Hamas pour ses activités militaires.

« Nous n’avons ni électricité ni nourriture ni eau dans l’hôpital » al-Chifa, a raconté un médecin de MSF. « Des gens vont mourir dans quelques heures sans respirateurs artificiels qui fonctionnent », a-t-il ajouté.

L’armée israélienne, qui accuse le mouvement islamiste d’utiliser les malades et les déplacés comme « boucliers humains », a affirmé ne pas cibler l’hôpital. Elle a fait état « d’efforts » pour transférer des couveuses d’un hôpital israélien à al-Chifa.

« L’idée est d’essayer d’évacuer des gens, d’en évacuer le plus possible », a déclaré dans la nuit de lundi à mardi un porte-parole de l’armée. Selon lui, « quelques centaines » de personnes seraient à l’intérieur de l’hôpital, tandis que selon le vice-ministre de la Santé du gouvernement du Hamas, Youssef Abou Rich, présent dans l’hôpital, environ 20’000 déplacés y auraient trouvé refuge.

« Le contrôle de Gaza »

Mardi, le gouvernement du Hamas a affirmé que « plus de cent » personnes avaient été tuées depuis la veille dans des bombardements israéliens, dont l’un a fait 30 morts, selon cette source, dans l’hôpital indonésien de Jabaliya, un immense camp de réfugiés du nord de la bande de Gaza.

Le Hamas a « perdu le contrôle à Gaza » et ses combattants « fuient vers le sud » du territoire, avait affirmé lundi le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant. Selon l’ONU, environ 1,6 des 2,4 millions d’habitants du territoire ont été déplacés par la guerre.

A la frontière entre Israël et le Liban, de nouveaux échanges de tirs ont opposé pendant la nuit de lundi à mardi l’armée israélienne et des groupes armés au Liban, dont le puissant Hezbollah pro-iranien, qui soutient le Hamas.

En Cisjordanie, cinq Palestiniens ont été tués selon une source hospitalière, lors d’affrontements nocturnes avec les forces israéliennes dans le secteur de Tulkarem (nord).

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