Personnalités et ONG lancent un « Appel » contre les renvois forcés

Plus de 130 personnalités vaudoises et une quarantaine d'ONG ont signé un "Appel" contre les renvois forcés de migrants. Elles demandent au Canton de Vaud de mieux protéger les plus vulnérables et les droits humains. Cette revendication a été officiellement lancée mercredi à Lausanne.
(Keystone-ATS) « Depuis plusieurs années, les associations alertent sur la situation de plus en plus critique des renvois Dublin en matière d’asile. Plusieurs événements récents ces derniers mois ont, une fois de plus, mis en lumière les conditions de ces renvois dans notre canton. C’est sur cette base qu’une quarantaine d’organisations et plus de 130 personnalités vaudoises lancent cet appel », ont-elles expliqué devant les médias.
« Nous, signataires de cet appel, appelons le Conseil d’Etat à faire preuve d’humanité en renonçant à exécuter les renvois forcés des familles avec enfants, des personnes dont la santé est menacée par le renvoi et d’autres personnes exilées en situation de vulnérabilité », déclarent-ils.
« Nous demandons au gouvernement vaudois qu’il utilise toutes les marges de manoeuvre possibles dans sa loi d’application des renvois des demandeurs d’asile, par rapport au droit fédéral qui ne règle pas tout, notamment en regard de la Convention des droits de l’enfant de l’ONU et aussi de critères de santé », a déclaré Julien Eggenberger, député socialiste et un des instigateurs de l’appel.
Trouver un autre chemin
« L’idée de cet appel est d’ouvrir une nouvelle manière de faire, d’interpeller, de créer de nouvelles opportunités, car les leviers actuels ne fonctionnent pas et les chemins législatifs sont difficiles au parlement cantonal », a pour sa part affirmé Joëlle Minacci, députée d’Ensemble à Gauche et également à l’origine de l’appel. « Nous comptons sur la mobilisation de la société civile pour faire bouger les choses, les lignes », a-t-elle ajouté.
A ce stade, les signataires viennent de différents bords politiques, des milieux sportifs, culturels, universitaires, scientifiques, de la santé, associatifs, syndicaux et des Eglises. L’objectif est d’en rassembler le plus possible et de lancer ensuite « la balle aux autorités ».
Parmi les personnalités qui ont signé l’appel, on retrouve par exemple le prix Nobel Jacques Dubochet, le musicien Pascal Auberson l’écrivain Blaise Hofmann, le président du Paléo Daniel Rossellat, l’humoriste Thomas Wiesel, l’astronaute Claude Nicollier, l’ancien président du Conseil national Yves Christen ou encore l’ex-conseiller aux Etats Luc Recordon.
Moret critiquée
Mercredi, une dizaine de signataires étaient présents à la conférence de presse. Tous ont dénoncé une situation sur le front des renvois de migrants qui s’est durcie. Il y a une intensification des renvois forcés ces derniers mois et une détérioration des conditions de ces renvois, se sont inquiétés plusieurs interlocuteurs, évoquant « une violence systémique de la procédure ».
La problématique des enfants a été plusieurs fois abordée. « Le 40% des migrants sont des mineurs et le droit des enfants n’est pas pris en compte. D’un point de vue administratif, ce ne sont que des cas rapportés », a dénoncé Bernard Borel, responsable de l’ONG Médecins Action Santé Migrants (MASM). « Il y a des questions éthiques et de dignité à se poser », a-t-il insisté.
« Cette journée du 4 juin se veut une journée forte pour dire que ça ne peut plus continuer comme ça, que le Conseil d’Etat doit changer sa manière de faire », a encore dit M. Eggenberger. La manière de mettre en oeuvre les renvois (conditions dures, arrestations brusques, présence policière parfois nombreuse, etc) est une décision politique, ont aussi rappelé les intervenants.
La conseillère d’Etat Isabelle Moret, en charge de ce dossier, a également essuyé des critiques. « Il y a un durcissement depuis qu’elle est en place. Elle fait le sale boulot que ses prédécesseurs n’ont pas fait pour se montrer bonne élève par rapport à la Confédération », a estimé Jean-Marc Béguin, conseiller communal lausannois vert’libéral.