La voix de la Suisse dans le monde depuis 1935
Les meilleures histoires
Démocratie suisse
Les meilleures histoires
Restez en contact avec la Suisse

Jean-Luc Addor: «La Cinquième Suisse est largement oubliée par la politique suisse»

Jean-Luc Addor
Jean-Luc Addor: «La Cinquième Suisse est largement oubliée par la politique suisse» Katy Romy / Swissinfo

Pour le conseiller national UDC Jean-Luc Addor, le vote électronique n’est pas la solution pour garantir aux Suisses de l’étranger la possibilité de participer aux scrutins. Dans le cadre de notre série d’interviews «La Cinquième Suisse sous la Coupole», il explique sa position et présente ses alternatives.

Élu au Conseil national en 2015, Jean-Luc Addor est parfois imprévisible. Connu pour ses positions conservatrices, le député de l’Union démocratique du centre (UDC) défend une ligne dure en matière d’immigration.

En juin dernier, le Valaisan de 61 ans a toutefois surpris en devenant le premier UDC président d’un syndicat national, Garanto, qui défend le personnel des douanes. Ayant acquis la nationalité italienne par mariage, il est binational.

Depuis des années, il défend aussi les intérêts de la Cinquième Suisse au sein du groupe d’amitié interparlementaireLien externe «Suisses de l’étranger».

Contrairement à la France ou l’Italie, qui accordent des circonscriptions électorales à leurs citoyens expatriés, les Suisses de l’étranger ne disposent pas de représentation directe sous la Coupole fédérale. Cela ne signifie pas pour autant que leurs intérêts ne sont pas pris en compte. Plus de 60 députés et sénateurs (sur 246) sont membres de l’intergroupe parlementaire «Suisses de l’étranger»Lien externe. Chaque semaine de session, nous donnons la parole à l’un d’entre eux dans notre nouveau format «La Cinquième Suisse sous la Coupole».

Swissinfo: Quelle est la priorité pour vous durant cette session?

Jean-Luc Addor: Les questions liées à la sécurité du pays. Je me suis engagé en faveur de la révision de la loi fédérale sur le matériel de guerre, acceptée cette semaine par le Conseil national et le Conseil des États. Cette modification facilitera l’exportation et la réexportation d’armes afin de permettre à notre industrie de défense de subsister.

Quel est le sujet le plus important de la session pour la Cinquième Suisse? 

Je ne sais pas. Les Suisses de l’étranger comptent pour moi, mais il y a énormément de dossiers importants. En tant que politicien de milice, il est impossible d’être sur tous les fronts, et en ce moment je suis sous l’eau. Je fixe des priorités selon les sessions et j’essaie de faire au mieux, aussi dans leur intérêt.

Pourquoi vous engagez-vous pour l’électorat des Suisses à l’étranger?

Parce qu’ils ne sont pas des demi-Suisses, mais des Suisses à part entière. Je m’engage à défendre leurs intérêts et à garantir qu’ils puissent exercer leurs droits civiques. Il est inacceptable qu’une partie de ces citoyens, pourtant inscrits au registre électoral, reçoive son matériel de vote après la date de la votation.

Vous engagez-vous en faveur de l’introduction du vote électronique pour résoudre ce problème?

Absolument pas. Je suis totalement hostile au vote électronique. D’abord pour des raisons de sécurité: on ne nous a jamais démontré la fiabilité de ces systèmes. Ensuite pour des raisons de principe: le vote est un acte citoyen, pas un clic anonyme derrière un clavier. Je suis également opposé au vote par correspondance généralisé. Aller voter devrait rester un acte social, un moment où l’on se retrouve avant ou après pour partager un café ou un apéro.

Quelle est pour vous la solution pour garantir la participation de la Cinquième Suisse aux scrutins?

Mon ancien collègue, le député zurichois Claudio Zanetti, avait déposé en 2019 une motionLien externe qui proposait d’envoyer le matériel des Suisses de l’étranger par voie électronique. Le texte avait été rejeté, mais je trouve qu’il faudrait reprendre cette idée. Les Suisses de l’étranger recevraient ainsi leur matériel de vote rapidement. Il faudrait ensuite réfléchir à un moyen de voter sur place de manière sécurisée. 

Quels sont vos liens avec la communauté des Suisses de l’étranger? 

J’ai des amis suisses qui vivent à l’étranger et qui tiennent à conserver leurs liens avec leur patrie. Il est, pour moi, essentiel de leur donner les moyens de préserver ces attaches.

Quel est, selon vous, le projet le plus important que vous avez mené pour défendre les intérêts des citoyennes et citoyens à l’étranger?

J’avais déposé une motion qui demandait la création d’une circonscription dédiée aux Suisses de l’étranger. Ce modèle existe déjà dans certains pays voisins, comme la France ou l’Italie. L’objectif était de renforcer le lien des personnes expatriées avec la Suisse, notamment en matière d’exercice des droits politiques. Malheureusement, la motion a été rejetée. Je considère que cette idée mérite d’être approfondie, mais il n’existe actuellement pas de majorité politique en sa faveur.

Avez-vous dû concéder des défaites en défendant les intérêts de la Cinquième Suisse? 

La Cinquième Suisse est largement oubliée par la politique suisse et il est nécessaire d’y remédier. Outre la création d’une circonscription spécifique, une manière de renforcer son implication serait de favoriser la constitution de listes dédiées aux Suisses de l’étranger lors des élections. Lors des législatives de 2023, j’avais tenté de créer une telle liste au sein de mon parti en Valais. Cette initiative n’avait cependant pas abouti, faute d’un nombre suffisant de candidats prêts à s’engager. L’objectif est désormais de pouvoir présenter une liste en 2027.

Estimez-vous que les intérêts des Suisses de l’étranger ne sont pas suffisamment représentés sous la Coupole?

Je considère qu’il est nécessaire de revoir les priorités dans la défense des intérêts des Suisses de l’étranger. La généralisation du vote électronique ne devrait pas être l’objectif principal. La priorité devrait être d’améliorer la situation des personnes contraintes de s’expatrier à la retraite, faute de pouvoir vivre décemment en Suisse avec l’Assurance vieillesse et survivants (AVS). Il s’agit de personnes qui ont travaillé toute leur vie et contribué à notre pays. Il est essentiel de leur garantir des conditions dignes pour qu’elles puissent rester en Suisse.

Si vous deviez émigrer à l’étranger, où vous installeriez-vous?

Je suis attaché à la Suisse et n’ai pas l’intention de quitter le pays. J’apprécie toutefois de voyager pour découvrir d’autres endroits, ce qui me rappelle à chaque fois à quel point nous vivons dans un beau pays.

>> Relire notre article sur la représentation des Suisses de l’étranger au Parlement:

Plus

Les plus appréciés

Les plus discutés

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision