«Adieu, merci la Suisse»: les routines familiales, un ancrage essentiel pour les enfants qui partent vivre ailleurs
Partir vivre à l’étranger est déjà un défi en soi. Et avec des enfants, les enjeux décuplent. Dans le deuxième épisode du podcast «Adieu, merci la Suisse», le Suisse de l’étranger Simon Kaya, père de deux filles, et la coach parentale Jelena Jreissati éclairent les ressorts émotionnels, pratiques et culturels de l’expatriation vécue par les plus jeunes.
«Les enfants ont des attentes différentes des nôtres en tant que parents», déclare Simon Kaya. Le Bernois de 43 ans peut en témoigner, lui qui a deux filles de 9 et 12 ans et a vécu avec elles dans cinq pays différents.
Là où les parents comparent sécurité, écoles et commerces, les enfants veulent savoir si «se faire des amis sera difficile», ou s’il y aura une place de jeu. Autrement dit, leur grille de lecture est avant tout affective et sociale.
C’est la raison pour laquelle Simon Kaya et son épouse, qui est elle d’origine thaïlandaise et hongkongaise, veillent à inclure leurs enfants dans leurs décisions. Il explique qu’ils ont toujours pris en compte les besoins de leurs filles et leur ont également annoncé la durée probable de chaque séjour. Cette transparence fait partie intégrante de leur fonctionnement. De cette manière, «les filles ont rapidement perçu ces changements comme une nouvelle aventure».
Écoutez le deuxème épisode du nouveau podcast «Adieu, merci la Suisse» avec la coach parentale Jelena Jreissati et le Suisse de l’étranger Simon Kaya:
Adieu, merci la Suisse
Être à l’écoute des émotions
L’annonce d’un déménagement met l’univers entier d’un enfant sens dessus dessous, précise la coach parentale Jelena Jreissati. Un départ signifie bien plus que changer d’école ou de logement: «tout change simultanément».
Dans un contexte qui est source d’insécurité, elle recommande d’être à l’écoute des enfants et de valider leurs émotions, en ne les minimisant surtout pas, ce qui risquerait de les braquer. Si possible, l’idéal est d’offrir des repères concrets, par exemple en visitant la nouvelle ville ou la nouvelle école.
C’est d’ailleurs une habitude que Simon Kaya et son épouse ont prise depuis longtemps. «Lorsque nous savons dans quel pays nous partons vivre, nous nous y rendons plusieurs fois avec les filles, pour qu’elles y prennent déjà quelques marques.»
Jelena Jreissati rappelle aussi que chaque enfant fonctionne différemment: «Deux enfants peuvent nécessiter deux approches totalement distinctes. Certains vont par exemple avoir besoin de contrôle, d’autres d’une préparation plus longue.» Autant que faire se peut, l’accompagnement doit donc être personnalisé.
Quel est l’impact psychologique d’un déménagement à l’étranger? Comment gérer les défis personnels
et professionnels du quotidien, dans une langue et une
culture inconnues?Comment s’intégrer? Et à quels aspects doit-on particulièrement prêter attention lorsque l’on
émigre avec des enfants?
Plongez dans notre podcast audio et vidéo et explorez avec nous les multiples facettes de l’expatriation et de la vie à l’étranger. Disponible aussi en suisse allemand.
Des rituels comme refuge
Après plusieurs années en Asie du Sud-Est, la famille Kaya s’est établie depuis deux ans à Stuttgart, en Allemagne. Or, malgré leur connaissance de l’allemand, les deux enfants ont mis près d’une année à s’intégrer, alors qu’il leur fallait moitié moins de temps en Asie, «Layla et Angela ont perdu leurs marques, parce que les gens sont complètement différents ici», observe Simon Kaya.
Pour Jelena Jreissati, ces difficultés soulignent l’importance de mettre en place, ou de maintenir, des points d’ancrage stables et rassurants, sous forme de rituels familiaux ou d’activités praticables dans tous les pays. Ces routines permettent d’apaiser les insécurités liées au nouvel environnement des enfants.
«Qu’on le veuille ou non, l’école reste un lieu où l’on est jugé», dit Simon Kaya. Dans ce contexte de changements réguliers, la famille mise sur un rituel quotidien, durant lequel les filles racontent leur journée.«C’est important qu’elles aient un endroit où elles peuvent parler, où il n’y a pas de difficultés, pas de confrontation, pas de jugement», explique-t-il.
Jelena Jreissati salue cette démarche, qu’elle voit comme un «vrai outil pour la vie». Pour la spécialiste, créer un espace où l’enfant peut tout exprimer l’aide non seulement à traverser les difficultés, mais aussi à apprendre progressivement à les résoudre seul. Selon elle, cette confiance donnée renforce autant l’estime de soi que la solidité du système familial.
À l’école locale pour intégrer enfants et parents
Pour Simon Kaya, ce moment privilégié agit autant comme un appui émotionnel que comme une forme de soutien scolaire, car les parents se saisissent de cette occasion pour savoir ce que leurs filles ont compris de leurs leçons à l’école.
Layla et Angela ont en effet été scolarisées à l’école publique dans la grande majorité des pays où elles ont habité. Cela signifie donc un enseignement dans la langue locale. «L’école locale sert autant l’intégration des enfants que celles des parents!», s’amuse Simon Kaya.
Le podcast «Adieu, merci la Suisse» est également disponible en vidéo. Visionnez l’épisode:
Identités diverses
Le multilinguisme est omniprésent dans la famille Kaya. Le père parle français avec sa fille aînée, allemand avec la cadette, anglais lorsque tout le monde est réuni, tandis que leur mère s’adresse à elles en thaï. Il dit ne plus avoir de «langue de référence», mais s’adapter à «la langue du moment».
Leurs identités sont multiples, et chaque fille se définit individuellement: Suisse et Thaï pour Layla; Thaï et Suisse pour Angela.
Une approche que Jelena Jreissati estime cohérente avec leur parcours: «deux enfants, deux personnalités, deux besoins», résume-t-elle.
Quelles chansons associez-vous à la Suisse? Nous avons posé cette question à nos hôtes et avons créé une playlist «mal du pays» avec tous leurs morceaux. Bonne écoute!
Relu et vérifié par Pauline Turuban
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