Une rockeuse devient maire de Zurich
La mairie de la plus grande ville de Suisse sera pour la première fois occupée par une femme. La socialiste Corine Mauch l'a emporté au deuxième tour sur la radicale Kathrin Martelli. Elle prendra le 1er mai les clés d'une ville resplendissante, mais confrontée à de nombreux défis.
Arrivée juste derrière sa rivale au premier tour, le 8 février, Corine Mauch a réussi à maintenir la mairie de la plus grande ville du pays dans le giron socialiste, où elle se trouve depuis 1990. L’ingénieure agronome de 49 ans a soufflé la place à sa rivale, Kathrin Martelli (PLR, les libéraux-radicaux, droite).
L’image de la radicale, sage et discrète, ne collait vraisemblablement pas à celle que les Zurichois se font de leur propre ville, et sûrement encore moins à celle qu’ils souhaitent que le reste de la Suisse – voire du monde – se fasse…
Corine Mauch a au contraire tout pour incarner une ville qui se veut moderne et dynamique, et qui l’est aussi grandement. Spécialiste en questions environnementales, Zurichoise depuis 25 ans, elle affiche un de ces parcours cosmopolites qui «font» de nombreuses décideuses et décideurs d’aujourd’hui.
De Boston où elle a vécu, enfant, quelques années, au «Kreis 6» où elle habite, en passant par le canton d’Argovie, Lausanne (master d’administration publique de l’IDHEAP) et la Chine, au moins par le biais de quatre semestres de sinologie à Zurich: la nouvelle mairesse est multilingue, sportive et cultivée.
Corine Mauch est aussi musicienne – même si son groupe de rock a officiellement fait ses adieux à la scène en début d’année. Mais elle ne laissera pas pour autant sa guitare basse dans sa housse, pour autant qu’elle en ait le temps, dit-elle en riant.
La nouvelle élue est aussi homosexuelle et n’en fait ni un mystère, ni un cheval de bataille.
Finance: un tiers des emplois
Le sourire resplendissant qu’elle a affiché tout au long de la campagne ne disparaîtra pas de son visage décidé, mais pourrait bien se figer un peu dans ses premières réunions de travail.
Zurich est fière de ce qu’elle est devenue. Après avoir réglé le problème des scènes de la drogue dans les années 90, recyclé les places de travail de l’industrie en emplois de services, être devenue une métropole animée, branchée, et toujours agréable à vivre pour une majorité de ses habitants qui en a les moyens, elle a aujourd’hui plus d’un défi à relever.
Le premier vient bien sûr de la crise économique et financière. Un tiers de la valeur ajoutée de la plus grande ville du pays, qui héberge plus de 9% des places du travail de Suisse, provient de la finance, cette dernière fournissant un tiers des emplois.
Corine Mauch le dit d’emblée: maîtriser les effets de la crise est «le défi le plus urgent. Nous n’avons pas le droit de nous reposer. Nous devons continuer à investir. Grâce à une politique budgétaire intelligente, la ville a environ 800 millions de francs de capitaux propres, ce n’est pas le moment de céder à l’hystérie.»
La socialiste entend aussi se battre pour des logements à prix modérés, qui manquent cruellement au bord de la Limmat. «Les logements chers, le marché les offre de lui-même, mais les pouvoirs publics doivent trouver des solutions pour le segment non luxueux, peut-être en transférant du terrain agricole en zone à bâtir.»
Zurich la hautaine? Du passé
A l’entendre, il est loin le temps où Zurich la hautaine se prenait, au moins, pour le centre de la Suisse. Corine Mauch est bien décidée à passer des alliances avec d’autres villes pour défendre les intérêts spécifiquement urbains en Suisse.
«La place des villes n’est pas encore reconnue à sa juste valeur, que l’on songe aux dépenses prises en charge par les villes et dont profitent les régions alentour. Il y a une évolution, mais pas encore assez. Dans ce domaine, Zurich ne peut pas agir seule.»
Dans un document stratégique intitulé «Zurich en 2025», la municipalité se voit aussi intensifier ses collaborations avec d’autres métropoles sur le plan international. Elmar Ledergerber, son prédécesseur qui vient d’être fait citoyen d’honneur de Kunming, n’aimait rien tant que fouler des tapis rouges à Berlin ou San Francisco.
Si elle ne peut rivaliser en taille avec le grand et bouillonnant Ledergerber, Corine Mauch, même petite en taille, a le charisme – sans ostentation – et le pragmatisme nécessaires pour incarner la Zurich du 21e siècle et jouer sa partition, en bonne bassiste, en écoutant sûrement davantage ses partenaires-musiciens que ceux-ci n’en ont eu l’habitude jusqu’ici.
swissinfo, Ariane Gigon à Zurich
Corine Mauch a été élue dimanche à la mairie de Zurich.
Elle a obtenu 41.745 voix, contre 30.851 pour la radicale Kathrin Martelli, a communiqué la Chancellerie communale.
La participation a atteint 34,2%.
Elle succédera fin avril au maire démissionnaire Elmar Ledergerber.
Cela fait 18 ans que la présidence de la ville de Zurich est en mains socialistes.
Population: 374’000
Population de l’agglomération: 1,112 million
Personnes actives en ville: 330’000
Personnes actives dans l’administration municipale: 25’700
Pendulaires, par jour: 215’000
Etudiants: 43’000
Nombre de visiteurs par année: 1,26 Mio.
Surface totale: 91,9 km2, dont forêt: 21,8 km2
Longueur de la frontière de la ville: 58,6 km
Point le plus haut (Üetliberg Kulm): 871 m.
Point le plus bas (rive de la Limmat): 392 m.
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