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Vidy, une scène à l’offre exceptionnelle

James Thiérrée, petit-fils de Chaplin, quadruple lauréat des Molières 2006, est en ce moment à Vidy. (Mario Del Curto)

Installé à deux pas du lac à Lausanne, ce théâtre aux ambitions européennes fait depuis longtemps les très riches heures de la comédie, du cirque et de la tragédie.

Son directeur, René Gonzales, exprime ici ses inquiétudes financières pour une institution qu’il mène avec bonheur depuis 17 ans.

Lorsqu’il parle de son théâtre, René Gonzales jubile. «Un cadeau, un état de grâce, une félicité», confie-t-il à propos de cette seconde partie de la saison 2006-2007 qui a démarré début janvier avec deux créations très réussies: “Le Pélican” d’August Strindberg et “Au revoir parapluie” de James Thiérrée.

Et le reste est à l’avenant: une vingtaine de spectacles à l’affiche jusqu’à fin juin, avec la crème des metteurs en scène d’ici et d’ailleurs. De quoi faire rêver nos meilleurs directeurs de théâtre dont une saison entière se compose, parfois, de 8 spectacles à peine. De quoi faire peur aussi, car cette pléthore n’assure pas forcément l’adhésion du public.

Saturation des scènes françaises

Mais là ne sont pas les craintes de René Gonzales. Les spectateurs l’ont toujours suivi dans ses choix. Ses inquiétudes sont ailleurs. Elles viennent de la saturation des scènes françaises, principal marché pour Vidy qui, depuis plusieurs années, y fait tourner ses productions.

De ses inquiétudes, René Gonzales faisait justement état lors d’une conférence de presse réunie en ce début d’année.

Plus tard, il nous confiait: «cela fait plus d’une décennie que Vidy vit un âge d’or. Mais les choses sont en train de changer. Jusqu’ici, la plupart de nos spectacles trouvaient un prolongement à l’étranger, en France notamment qui est notre interlocuteur économique privilégié. Nos tournées dans l’Hexagone nous ont jusqu’ici permis de nous autofinancer et de réinvestir ainsi dans de nouvelles créations.»

Plus d’un tour dans son sac

«Aujourd’hui, poursuit-il, la France est dans une situation de superproduction artistique». Le théâtre, comme “l’industrie” du film et du livre, souffre d’une explosion de l’offre culturelle. Ce qui n’est pas un signe de bonne santé. Les retombées, nous les subissons forcément. J’ai donc une appréhension pour l’avenir, mais je vais me battre».

On veut bien le croire. René Gonzales a toujours plus d’un tour dans son sac. En attendant, il profite du bonheur que lui procurent les jeunes artistes suisses dont la présence, lumineuse voudrait-on dire, fait briller l’affiche 2007 de Vidy.

Parmi eux, le metteur en scène alémanique Gian Manuel Rau qui présente donc “Le Pélican” d’August Strindberg jusqu’au 28 janvier. Et qui réalise ici un petit chef-d’oeuvre de finesse psychologique. On le retrouvera en avril avec le “Woyzeck” de Büchner que l’on espère tout aussi excellent.

Le hasard n’existe pas

Autre Alémanique invité à Vidy: Stefan Kaegi, lui aussi très jeune. Cet été, il fit les belles heures du festival d’Avignon avec son “Mnemopark”, qui sera repris ici en mars.

Et puis, il y aura les créateurs romands: Valentin Rossier, Robert Bouvier, Jean Liermier et Omar Porras, toujours très attendu, qui va présenter en mai “Maître Puntila et son valet Matti” de Brecht.

Mais cette réunion de talents, est-ce un hasard? «Non, répond Gonzales, le hasard n’existe pas dans mon métier, c’est plutôt le résultat de 17 années de travail. J’ai croisé il y longtemps la route de certains artistes et je les ai suivis. Les choses se sont mises en place petit à petit, et le résultat, je l’obtiens maintenant.»

swissinfo, Ghania Adamo

Le Théâtre de Vidy dispose de trois scènes: la salle Charles Apothéloz (400 places), la Passerelle (100 places) et le Chapiteau (200 places).

Chaque saison se compose de 20 à 25 spectacles, dont une majorité en création. 80’000 à 120’000 spectateurs fréquentent les 350 à 400 représentations annuelles.

Le Théâtre a également une forte activité internationale: coproductions, collaborations régulières avec certains festivals, tournées. Du point de vue artistique, administratif et technique, Vidy a ainsi assuré, certaines saisons, plus de 500 représentations hors de Suisse.

A la tête de l’institution depuis 17 ans, René Gonzalez est un ancien comédien. Avant d’arriver à Vidy, il a dirigé le Théâtre Saint-Denis, la Maison de la Culture de Bobigny et l’Opéra Bastille à Paris.

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