«Killer Joe», un thriller d’une très bonne tenue

Gino Zampieri crée au TPR de La Chaux-de-Fonds la pièce de l'Américain Tracy Letts. Et réussit un spectacle haletant.

Il y a des coups de sang, des coups de feu, des rêves avortés, des moments érotiques, des poussées de désespoir… Et des individus qui auraient bien voulu réussir mais sont passés à côté de tout.

Cruelle galerie d’inadaptés, installés dans l’espace misérabiliste d’un mobile-home (décor vériste de Luca Antonucci), à la périphérie de Dallas. C’est dans la banlieue de la métropole texane que se situe donc l’action de «Killer Joe», pièce créée au TPR de La Chaux- de-Fonds par le directeur des lieux Gino Zampieri.

Une froide lucidité

«Killer Joe» est l’œuvre du dramaturge américain Tracy Letts qui livre ici un thriller d’une très bonne tenue, en jetant sur scène des personnages dépassés par leur destin. Et pris dans l’engrenage d’une machine infernale: le crime.

Son auteur? Joe Cooper, flic pourri et tueur à gages qui tient sous sa férule Chris (Frédéric Solunto), un dealer paumé, le père et la belle-mère de ce dernier (Tobias Kempf et Suzanne Forsell). Et notamment Dottie, la petite sœur (Anne Shlomit Deonna, excellente), en équilibre instable entre naïveté et violence.

D’abord enfermée dans sa puérilité, elle s’ouvre petit à petit pour buter contre la cruauté. Celle que lui impose Joe Cooper (Robert Bouvier) dans une scène où celui-ci viole avec une froide lucidité l’innocence de Dottie et transforme en folie l’inquiétude de la jeune fille.

Bouvier se montre ici beaucoup plus crédible dans la peau du voyeur que dans celle du tueur qui essaie, sans vraiment y parvenir, de donner à son personnage le profil d’un monstre cultivant un nihilisme infâme.

Ghania Adamo

«Killer Joe», à La Chaux-de-Fonds, TPR (Beau Site); jusqu 9 mars.Tel: [phone]