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L’ancien président égyptien Mohamed Morsi est mort

Mohamed Morsi alors qu'il présidait l'Egypte (Archives). KEYSTONE/EPA FILE/OLIVER WEIKEN sda-ats

(Keystone-ATS) L’ex-président égyptien Mohamed Morsi est mort lundi après une audition au tribunal au Caire. L’ex-président, en détention depuis 2013, s’est soudain effondré, avant d’être emmené à l’hôpital où il est décédé.

“Le tribunal lui a accordé le droit de parler pendant cinq minutes (…) Il est tombé sur le sol dans la cage des accusés (…) et a été immédiatement transporté à l’hôpital” où il est décédé, a indiqué le parquet général égyptien dans un communiqué.

“Il est arrivé à l’hôpital à exactement 16h50 et il n’y avait pas de nouvelles blessures visibles sur le corps”, a-t-il précisé. Selon la télévision d’Etat, Mohamed Morsi est mort “à cause d’un arrêt cardiaque”.

L’ancien président, en détention depuis juillet 2013, comparaissait lundi au sein du complexe pénitentiaire de Tora dans le sud de la capitale égyptienne. Selon l’un de ses avocats, Abdelmoneim Abdel Maksoud, Mohamed Morsi sera enterré à Medinat Nasr, un quartier de l’est du Caire, “mais on ignore toujours quand”. Dans un message posté sur Facebook, Ahmed, le fils de M. Morsi a confirmé la mort du président déchu

“Théories du complot”

Le Parti de la liberté et de la justice de M. Morsi, le bras politique des Frères musulmans, a parlé d’un “assassinat”, dénonçant dans un communiqué de mauvaises conditions de détention dont “le but était de le tuer à petit feu”.

Le chef de l’Etat turc Recep Tayyip Erdogan, allié de l’ancien président islamiste, lui a rapidement rendu hommage en le qualifiant de “martyr”. L’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, a lui exprimé “sa profonde tristesse”.

Selon Jonathan Schanzer, du cercle de réflexion Foundation for Defence of Democracies (FDD), “étant donné les circonstances, Mohamed Morsi sera considéré comme un martyr. Et les théories du complot autour de sa mort vont certainement prospérer”. Mais selon ce dernier, “les Frères musulmans resteront moribonds en Egypte. Et ils resteront affaiblis dans le reste de la région”.

Conditions dénoncées

En mars 2018, une commission britannique indépendante avait condamné son maintien à l’isolement 23 heures par jour, dans des conditions de détention pouvant “relever de la torture ou du traitement cruel, inhumain ou dégradant”.

Dans un communiqué, l’ONG Amnesty International a demandé aux autorités une “enquête immédiate” sur la mort de M. Morsi, qualifiée de “profondément choquante”.

L’organisation de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a également réagi. Sa directrice pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Sarah Leah Whitson, a dénoncé sur Twitter “l’échec du gouvernement à lui accorder des soins médicaux adéquats, encore moins des visites de sa famille”.

Condamnations expéditives

Le leader islamiste était emprisonné depuis sa destitution. Il avait été jugé par la suite dans plusieurs affaires dont un dossier d’espionnage pour l’Iran, le Qatar et des groupes militants comme le Hamas à Gaza. Il a également été accusé de fomenter des actes de terrorisme.

Depuis sa destitution en 2013, son ancien ministre de la Défense Abdel Fattah al-Sissi a mené une répression sans merci contre l’opposition islamiste. Les Frères musulmans ont été les premiers ciblés. Plus de 1400 manifestants pro-Morsi ont été tués en quelques mois; des centaines ont été condamnés à mort, dans des procès de masse expéditifs, qualifiés par l’ONU de “sans précédent dans l’Histoire récente”; plusieurs d’entre eux sont décédés en détention.

Après l’annonce de la mort de M. Morsi, la télévision égyptienne, soutien du régime actuel, a diffusé en boucle des images de violences et d’attentats, accusant les Frères musulmans de “terrorisme” et de “mensonge”. Les campagnes médiatiques contre la confrérie, et contre la Turquie et le Qatar qui la soutiennent, sont récurrentes en Egypte.

Les années qui ont suivi le coup de force de l’armée en Egypte ont vu une succession d’attaques visant les forces de l’ordre. Des centaines de policiers et militaires ont été tués, en même temps qu’émergeait une véritable insurrection djihadiste localisée dans le nord-Sinaï, devenu un bastion du groupe Etat islamique.

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