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L’indispensable réforme des retraites devra encore attendre

Le conseiller fédéral devra rapidement remettre l'ouvrage sur le métier. KEYSTONE/PETER SCHNEIDER sda-ats

(Keystone-ATS) Jugée indispensable par tous, la réforme des retraites n’est pourtant pas encore une affaire réglée: les Suisses ont refusé dimanche par 52,7% des voix le paquet Prévoyance vieillesse 2020. La balle est désormais dans le camp des opposants pour trouver mieux.

A l’image du projet mastodonte d’Alain Berset, son financement via un relèvement de la TVA a été refusé de justesse par 50,1% des citoyens, ainsi que la majorité des cantons.

Plus de 20 ans après la dernière réforme, le conseiller fédéral socialiste a donc échoué à convaincre les citoyens. Interrogé sur les raisons de la défaite, il a refusé de se prononcer, mais a reconnu que le dossier était “complexe et compliqué à expliquer”. La complexité du scrutin se retrouve d’ailleurs dans les résultats. Les citoyens n’ont pas forcément voté pareil sur la réforme et son financement.

A l’exception de Bâle-Ville et de Zurich, aucun canton alémanique n’a dit “oui”. Le champion du double “non” est le canton de Schwyz (64,3% à la réforme; 62,2% à son financement). La Suisse romande a soutenu la réforme sauf les deux cantons lémaniques, d’où sont issus la majorité du comité de gauche opposé à la réforme.

Compteurs à zéro

La réforme prévoyait l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans, une hausse de la TVA de 0,6 point de pourcentage et un abaissement dans le 2e pilier du taux de conversion du capital en rente de 6,8 à 6%. Pour compenser ce recul, les nouvelles rentes AVS auraient été augmentées de 70 francs et le plafond de rente pour les couples mariés relevé de 150 à 155%.

Le PLR, l’UDC et une partie de l’économie ont réussi à convaincre la majorité de rejeter un projet jugé trop généreux. A l’inverse, le Conseil fédéral, le PS, les Verts, le PDC, le PBD et le PVL y voyaient un compromis équitable et indispensable pour assurer le financement des rentes à venir.

Le résultat de dimanche remet les compteurs de la réforme du système de l’AVS à zéro. Alain Berset a indiqué qu’il allait prochainement réunir les différents acteurs concernés pour préparer un nouveau projet, sans pourtant donner un calendrier.

Pas avant les élections fédérales

Le coupable derrière l’échec de la réforme, c’est le PLR, l’UDC et le comité référendaire de la gauche romande, une “mésalliance” qui a fait capoter le projet, a critiqué la conseillère nationale Barbara Schmid-Federer (PDC/ZH), membre du comité d’Alliance F, l’alliance d’organisations féminines militant en faveur de la réforme. D’après le PDC, c’est donc désormais à eux d’agir dans l’urgence.

Le rejet de dimanche est un “triste autogoal” pour la gauche, a affirmé pour sa part le vice-président de Travail.Suisse, Jacques-André Maire, membre du comité “Oui à la réforme des retraites”. C’est un travail parlementaire “très délicat” qui s’annonce, d’autant que chaque camp était arrivé “au bout des compromis acceptables”.

Le refus par les citoyens suisses de la réforme des retraites va encore “creuser la facture finale liée à l’AVS”, a déploré quant à lui Patrick Eperon, responsable romand du comité bourgeois en faveur du projet. Même si la droite met les bouchées doubles afin de ficeler un nouveau paquet, un nouveau vote n’interviendra “pas avant les élections fédérales de 2019”, a-t-il regretté.

Le bonus pointé du doigt

Du côté des adversaires de la réforme, on reste pragmatique après la victoire. Aussi bien la gauche que la droite doit “sortir des positions idéologiques”, a plaidé Regine Sauter, membre de l’Alliance des générations (anti-réforme). La Zurichoise estime que c’est le bonus de 70 francs qui a fait déborder le vase, signe que le résultat du scrutin doit être interprété comme un “non bourgeois”.

Selon elle, le peuple a donné un mandat clair au Parlement: il ne veut pas une dégradation de la retraite, mais pas non plus des “susucres”. Les Suisses ne verront pas de sitôt l’âge de la retraite grimper à 67 ans pour tous, a promis de son côté le conseiller national Olivier Feller (PLR/VD). “Cette hausse n’est pas à l’ordre du jour, vu qu’elle serait balayée par le peuple.”

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