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Le cinéaste suisse Claude Goretta est mort

Le cinéaste suisse Claude Goretta est décédé mercredi après-midi chez lui, à Genève, dans sa 90e année, a annoncé jeudi sa famille. Il avait notamment été distingué pour "La Dentellière", avec Isabelle Huppert, en 1977 (archives). KEYSTONE/SANDRO CAMPARDO sda-ats

(Keystone-ATS) Le cinéaste suisse Claude Goretta est décédé mercredi après-midi à Genève à 89 ans, a annoncé jeudi sa famille. Proche d’Alain Tanner et de Michel Soutter, il avait notamment tourné “La Dentellière” avec Isabelle Huppert en 1977.

Claude Goretta s’est “endormi paisiblement chez lui comme il l’avait toujours souhaité. Il était entouré par sa famille”, a indiqué celle-ci à Keystone-ATS. Né le 23 juin 1929 à Genève, le cinéaste était aussi réalisateur à la télévision, producteur et scénariste. Il a tourné près de quarante films.

Claude Goretta a commencé sa carrière comme réalisateur à la télévision, après avoir travaillé aux archives du British Film Institute, à Londres, avec son ami Alain Tanner. Dès 1958, il réalise pour la Télévision suisse romande (TSR) des documentaires et reportages pour l’émission “Continents sans visa”.

Distingué à Cannes

Il tourne aussi des courts-métrages de fiction écrits avec le Genevois Michel Soutter. En 1968, il fonde la maison de production Groupe 5 avec Alain Tanner, Jean-Louis Roy, Michel Soutter, Yves Yersin et Jean-Jacques Lagrange. Leurs oeuvres engagées ont contribué à l’essor du cinéma suisse.

A l’international, Claude Goretta a notamment été distingué au Festival de Cannes. Il a reçu le Prix du Jury pour “L’Invitation” (1973), avec Michel Robin, François Simon et Jean-Luc Bideau, et celui du Jury oecuménique pour “La Dentellière” (1977), avec Isabelle Huppert.

Claude Goretta a tourné avec d’autres figures du cinéma français, comme Gérard Depardieu dans “Pas si méchant que ça” (1974) ou Nathalie Baye dans “La Provinciale” (1981). Son plus grand succès, reste toutefois “La Dentellière”, en Suisse comme en France.

En 2010, Claude Goretta a reçu un Quartz à Lucerne, lors de la Fête du cinéma suisse, pour l’ensemble de son oeuvre. L’année suivante, il s’est vu remettre un Léopard d’honneur au Festival international du film de Locarno.

“Un des plus grands”

“Claude Goretta était certainement l’un des plus grands cinéastes suisses et du monde francophone”, a déclaré Frédéric Maire, directeur de la Cinémathèque suisse. Il était avant tout profondément humaniste, de part son intérêt pour les petites gens et l’expérience accumulée à la TSR pour laquelle il a signé des documentaires et des reportages.

Beaucoup de ses scénarios et films reflètent cet intérêt pour les gens et pour le monde, observe Frédéric Maire. Et de citer “L’Invitation”, qui confronte le milieu bourgeois avec celui des petites gens.

Avec ses accents et objets du quotidien suisses, “L’Invitation” est devenu le “film de chevet” de Lionel Baier, a expliqué le réalisateur vaudois. Ce film, qu’il a vu à l’âge de 6 ans, l’a “autorisé à imaginer que je pouvais être cinéaste ici”, a-t-il relevé. “Cette peinture sociétale a quelque chose d’incroyablement romanesque”, a ajouté le Vaudois, qui a réalisé en 2011 un portrait de son aîné, “Bon vent Claude Goretta”.

Pour la télévision

En 2011, la Cinémathèque avait consacré une large rétrospective à Claude Goretta. Il s’agissait de mettre en valeur un cinéaste un peu moins considéré que d’autres, peut-être à cause de ses films pour la télévision, a remarqué Frédéric Maire. D’une certaine façon, il était précurseur. La frontière aujourd’hui s’estompe entre grands et petits écrans.

Lionel Baier a aussi relevé le travail de Claude Goretta pour la télévision, de fiction et documentaire: “Il a fait des Maigret de grande qualité. Il avait le besoin de tourner beaucoup, aussi pour des raisons alimentaires.” Et de préciser qu’il est resté intéressé par le cinéma d’aujourd’hui.

Père fondateur

“La Radio Télévision Suisse a perdu un père fondateur”, souligne de son côté Philippa de Roten, cheffe du Département Société et Culture, citée dans un communiqué. “De Continents sans visa aux téléfilms Le Chagrin des Belges ou Sartre, l’âge des passions, en passant par Si le soleil ne revenait ou les Maigret, Claude Goretta a toujours su être à l’écoute de son temps. Il était un pont générationnel et un pont entre cinéma et télévision unique en Suisse”.

Sur Twitter, Gilles Jacob, président du Festival de Cannes de 2001 à 2014, a aussi souligné l’importance de l’oeuvre de Claude Goretta. “De ceux qui ont fait connaître le cinéma suisse”, a-t-il écrit.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

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