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Le National rejette l’initiative d’Uniterre sans contre-projet

L'agriculture écologique telle que la souhaite Uniterre va trop loin, selon le Conseil national (archives). KEYSTONE/VALENTIN FLAURAUD sda-ats

(Keystone-ATS) Le Conseil national rejette l’initiative d’Uniterre pour une agriculture écologique, sans contre-projet. Le lobby paysan a profité des débats pour marquer sa colère envers la politique de Johann Schneider-Ammann.

Au terme de la troisième journée de session consacrée à l’initiative du petit syndicat agricole, les élus ont rejeté vendredi par 126 voix contre 49 et 6 abstentions le contre-projet de Beat Jans (PS/BS).

Lors des débats, les partisans de la cause paysanne, UDC en tête, avaient manifesté leur sympathie pour les mesures protectionnistes que l’initiative préconise. Le contre-projet constituait également à leurs yeux un sérieux avertissement pour le Conseil fédéral.

Le monde rural a en effet saisi l’occasion de l’initiative d’Uniterre sur laquelle le National avait à se prononcer pour tirer à boulets rouges sur la politique du Conseil fédéral. C’est le récent rapport sur l’avenir de la politique agricole qui a mis le feu aux poudres.

Protection douanière

La vue d’ensemble 2022+ prévoit en effet un démantèlement de la protection douanière avec l’Union européenne (UE). En clair, elle demande à l’agriculture de s’adapter à moyen terme. Les agriculteurs voient dans ce rapport une contradiction flagrante avec le nouvel article constitutionnel sur la sécurité alimentaire plébiscité par le peuple le 24 septembre. Ils redoutent la disparition d’encore plus d’exploitations.

Le ministre Johann Schneider-Ammann a rétorqué aux mécontents que ce document n’était qu’une base de discussion en vue d’un message pour le Parlement à la mi-2019. D’ici là, on aurait tout le temps de rediscuter, si possible sur une base moins conflictuelle que les attaques qui ont fusé sous la Coupole.

Quant à l’initiative d’Uniterre, tous les partis hormis les Verts l’ont jugée excessive. Beaucoup d’élus PLR et Vert’libéraux ont souligné que l’article constitutionnel plébiscité en septembre remplissait déjà la plupart des objectifs. En outre, introduire des barrières douanières pour les produits importés serait contraire aux accords de libre-échange.

Pour la petite paysannerie

Le texte “Pour la souveraineté alimentaire. L’agriculture nous concerne toutes et tous” veut renforcer le rôle des petits paysans dans l’approvisionnement des denrées alimentaires en Suisse, notamment à travers la commercialisation directe. Les agriculteurs devraient produire de manière écologique et pouvoir commercialiser eux-mêmes les semences.

Les organismes génétiquement modifiés (OGM) seraient définitivement interdits et les subventions à l’exportation de produits supprimées. Le texte veut encore proscrire l’importation des produits étrangers non conformes aux normes sociales et environnementales suisses.

Le contre-projet reprenait plusieurs aspects de l’initiative. Mais il laissait tomber notamment l’harmonisation des conditions de travail au niveau fédéral, certains aspects relatifs à la transparence au sein des filières pour des prix équitables et le maintien d’une régulation douanière flexible.

Le tour du Conseil des Etats

Balthasar Glättli (Verts/ZH), partisan de l’initiative, compte désormais sur le Conseil des Etats pour qu’il élabore un contre-projet crédible. Pour lui, demander au secteur de s’adapter aux conditions du libre marché est incompatible avec le principe d’une agriculture durable.

L’initiative, soutenue par l’Alliance pour la Souveraineté Alimentaire, a été déposée en mars 2016. Parmi ses promoteurs, on retrouve l’ancien conseiller d’Etat fribourgeois Pascal Corminboeuf, le popiste vaudois Josef Zisyadis ou le socialiste genevois Jean Ziegler.

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