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Le Parlement s’écharpe sur l’initiative sur la sphère privée

Le National se penche sur le secret bancaire pour les clients suisses. Les débats se poursuivront jeudi (image symbolique). KEYSTONE/MARTIN RUETSCHI sda-ats

(Keystone-ATS) Les échanges ont été vifs mardi au National sur l’initiative de la droite “Oui à la protection de la sphère privée” et un contre-projet, qui veulent maintenir le secret bancaire pour les clients en Suisse. Rien n’a encore été décidé, les débats se poursuivent jeudi.

La gauche, le PVL et le PBD s’opposent aux deux textes. La majorité du PDC et du PLR soutient le contre-projet plutôt que l’initiative, mais certains de leurs membres font partie des initiants. L’UDC milite elle pour l’initiative populaire, tout en déclarant pouvoir vivre avec le contre-projet.

Sphère privée

L’initiative populaire, déposée en 2014 par des politiciens de droite, réclame le droit à la protection de sa sphère privée financière. Le but est d’éviter que les cantons puissent exiger des banques qu’elles fournissent des informations concernant un contribuable en cas de soustraction fiscale et non plus seulement de fraude.

La commission de l’économie du National a décidé d’y opposer un contre-projet direct. Dans un premier temps, elle recommandait le rejet pur et simple de l’initiative. Après les élections fédérales de 2015, la majorité de droite a changé d’avis.

Ce contre-projet vise explicitement à empêcher une révision de la loi sur l’impôt anticipé qui conduirait à un échange automatique de renseignements en Suisse. Les déclarations des banques aux autorités fiscales ne seront autorisées que si la personne bénéficiaire l’aura expressément demandé.

Les autorités pourront toujours accéder à des données bancaires en cas de soupçons de graves infractions fiscales, mais contrairement à l’initiative, le contre-projet ne contient pas de liste exhaustive de ces infractions. Le Parlement pourra donc étendre la liste dans la loi.

Affront

La protection de la sphère privée financière est largement suffisante aujourd’hui, a plaidé Martin Landolt (PBD/GL). “Je parle évidemment pour les Suisses qui n’ont rien à se reprocher en matière fiscale.” Pour les autres, il ne faut pas baisser la garde.

Surtout, aucun des deux textes ne va dans le sens de la stratégie de l’argent propre développée par le Conseil fédéral depuis des années, soutenue par les banquiers et les cantons. Ils sont parfaitement inutiles, et un affront pour les contribuables honnêtes, a lancé Beat Jans (PS/BS).

Selon les chiffres de l’administration fédérale, plus de 20 milliards de francs non déclarés ont été récupérés ces dernières années, a rappelé Ada Marra (PS/VD). L’initiative et le contre-projet seraient un retour en arrière.

Suisses honnêtes

Il y a bien entendu des moutons noirs, comme partout. Mais cette initiative ne cherche pas à protéger les tricheurs, a asséné Thomas Matter (UDC/ZH). Les Suisses sont honnêtes en matière fiscale, a emboîté Jean-François Rime (UDC/FR). Il faut se prémunir contre un Etat de plus en plus fouineur, selon Roger Köppel (UDC/ZH).

Aux yeux du PDC, l’initiative va toutefois trop loin. La Suisse ne pourrait plus lutter efficacement contre le blanchiment et le financement du terrorisme, constate Guillaume Barazzone (PDC/GE). Mais soutenir le contre-projet, c’est se donner la chance de combattre efficacement l’initiative devant le peuple. Le droit en vigueur sera ainsi maintenu et précisé.

Le PLR a aussi plaidé pour le contre-projet, mentionnant la confiance qui doit régner entre les autorités et les citoyens.

Initiative en question

Le Conseil fédéral s’est lui prononcé contre l’initiative, sans lui opposer de contre-projet. La sphère privée est déjà suffisamment protégée et le texte risque de faciliter l’évasion fiscale, a-t-il fait valoir.

Le Conseil des Etats devrait se prononcer lors de la session de printemps. Christian Lüscher (PLR/GE), membre du comité d’initiative, n’a pas caché que si les deux Chambres acceptent le contre-projet, l’initiative pourrait être retirée.

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