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Les deux grands partis d’opposition ivoiriens vers une alliance

Le PDCI et le FPI se sont "rassemblés pour sauver la Côte d'Ivoire", selon un des orateurs du jour. Twitter sda-ats

(Keystone-ATS) Plusieurs milliers de personnes ont assisté samedi à Abidjan à un meeting politique réunissant pour la première fois les deux principaux partis d’opposition en Côte d’Ivoire, possible préfiguration d’une alliance électorale en vue de la présidentielle d’octobre 2020.

Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), de l’ex-président Henri Konan Bédié, et le Front populaire ivoirien (FPI) de l’ancien chef de l’Etat Laurent Gbagbo, ont placé ce meeting sous le leitmotiv de la “réconciliation nationale”, toujours pas effective, selon eux, huit ans après la fin de la décennie de crise qu’a connue le pays jusqu’en 2011 et qui s’était soldée par une crise post-électorale ayant fait 3000 morts.

“Nous vivons un grand jour, le PDCI et le FPI sont ensemble pour sauver la Côte d’Ivoire”, a déclaré à la tribune le secrétaire général du FPI Assoa Adou, en présence de l’ex-Première Dame Simone Gbagbo, devant les militants rassemblés dans un stade quasi-plein du quartier populaire de Treichville.

Réconciliation

“Ce meeting, c’est un meeting de préparation, il y en aura d’autres” dans tout le pays, a déclaré en écho le numéro deux du PDCI Maurice Kakou Guikahué, appelant les militants à “rester mobilisés”.

Le mot “alliance” n’a pas été prononcé. En attendant, la réconciliation entre les anciens ennemis jurés a commencé il y a un peu plus d’un mois. Ils se sont rencontrés fin juillet à Bruxelles, où M. Gbagbo réside en liberté conditionnelle en attendant un éventuel appel lundi prochain de son jugement d’acquittement de crimes contre l’humanité devant la Cour pénale internationale (CPI).

Le meeting de samedi constitue donc une deuxième étape vers une possible alliance électorale, indispensable pour espérer déloger du pouvoir en 2020 le Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), la formation du président Alassane Ouattara, qui en détient actuellement tous les leviers.

Lors des élections locales d’octobre 2018, le PDCI avait réalisé un bon score, avec 25% des voix sur l’ensemble du pays. Le FPI refuse de participer aux élections depuis 2011, mais les analystes le considèrent toujours comme la troisième force politique de Côte d’Ivoire.

Un “échauffement”

“Il n’y a pas d’alliance pour l’instant, mais on discute”, a confié un cadre du FPI en marge du meeting. De fait, si les orateurs représentant les diverses formations invitées au meeting ont énuméré une longue liste de maux, attribués au régime Ouattara, dont souffre selon eux la Côte d’Ivoire, aucune ébauche de programme commun de gouvernement n’a été esquissée.

“Ce meeting commun, c’est un échauffement, chacun y est allé pour se jauger. Au vu de l’affluence, c’est un succès, alors que le meeting a été organisé en seulement quelques jours, mais ni les militants ni les appareils ne se sont mélangés dans le stade”, a observé le politologue Jean Alabro.

La scène politique ivoirienne est en pleine recomposition depuis un an. Après avoir été pendant 14 ans l’allié de M. Ouattara et l’avoir soutenu lors des deux présidentielles de 2010 et 2015, M. Bédié a rompu avec lui en août 2018, devant le refus du président de soutenir un candidat PDCI pour la présidentielle de 2020.

Grand écart

Depuis, le PDCI cherche à construire un large front commun d’opposition, qui a pris le nom de Coalition pour la démocratie, la réconciliation et la paix (CDRP), afin de gagner en 2020, quitte à faire le grand écart idéologique. Le PDCI se veut conservateur et libéral, tandis que le FPI se veut socialiste.

Quitte aussi à oublier les rancunes. Des représentants de Guillaume Soro, ex-chef de la rébellion qui a contrôlé pendant huit ans la moitié nord de la Côte d’Ivoire sous la présidence Gbgabo, étaient présents au meeting samedi.

Mais Guillaume Soro, ancien Premier ministre de Ouattara puis ancien président de l’Assemblée nationale, est lui aussi en rupture de ban avec le pouvoir. “Le RHDP le sait : 2020, c’est le terminus”, a lancé son représentant, le député Alain Lobognon.

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