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Messageries chiffrées: Paris et Berlin demandent à l’Europe d’agir

Thomas de Maizière et Bernard Cazeneuve ont évoqué la nécessité d'un "partage systématique de l'information des fichiers européens" de renseignement, "systématiquement alimentés par tous les Etats membres". KEYSTONE/AP/MICHEL EULER sda-ats

(Keystone-ATS) Les ministres de l’Intérieur français et allemand ont demandé à la Commission européenne d’encadrer juridiquement les réseaux de télécommunication cryptés, y compris les messageries non européennes. Le réseau Telegram prisé des djihadistes est notamment visé.

“Nous proposons avec Thomas de Maizière que la Commission européenne étudie la possibilité d’un acte législatif rapprochant les droits et obligations de tous les opérateurs (…), que le siège juridique soit en Europe ou non”, a déclaré mardi le ministre français Bernard Cazeneuve. Il s’exprimait à l’issue d’une rencontre avec son homologue allemand.

Un tel acte juridique permettrait “d’imposer des obligations à des opérateurs qui se révéleraient non coopératifs, notamment pour retirer des contenus illicites ou déchiffrer des messages dans le cadre d’enquêtes judiciaires”, a-t-il ajouté.

Eléments de preuve

Les ministres visent notamment la messagerie cryptée Telegram, application créée par des Russes et prisée pour sa confidentialité.

“Les échanges de plus en plus systématiques opérés via certaines applications, telles que Telegram, doivent pouvoir, dans le cadre de procédures judiciaires (…) être identifiés et utilisés comme des éléments de preuve par les services d’investigation et les magistrats”, a ajouté Bernard Cazeneuve.

Le ministre a toutefois précisé qu’il ne s’agissait pas de remettre en cause le chiffrement qui “permet de sécuriser les conversations”.

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Lors de cette rencontre, les deux ministres ont également évoqué la nécessité d’un “partage systématique de l’information des fichiers européens” de renseignement, “systématiquement alimentés par tous les Etats membres”.

Les ministres français et allemand ont également soulevé la question de l’élargissement du projet pilote appelé ADEP, qui permet la transmission automatisée des antécédents judiciaires entre services de police. Actuellement six Etats membres sont concernés (Finlande, Espagne, Hongrie, Irlande, France, Allemagne). La France et l’Allemagne souhaitent l’étendre à tous les Etats membres.

PNR opérationnel d’ici fin 2016

Autre idée proposée: la mise en place d’un système électronique d’autorisation de voyage pour les personnes entrant sur le territoire européen sans visa, à l’instar de ce qui existe déjà aux Etats-Unis.

Par ailleurs, Bernard Cazeneuve a rappelé que le “PNR”, le fichier sur les passagers aériens, serait en France “pleinement opérationnel d’ici la fin de l’année”. La France et l’Allemagne travaillent “pour que chaque Etat membre le rende opérationnel le plus vite possible”, a-t-il dit.

Enfin, les deux ministres ont appelé à “muscler les contrôles aux frontières extérieures” notamment avec la future agence de garde-frontières, idée franco-allemande. Bernard Cazeneuve et Thomas de Maizière souhaitent que ces propositions soient discutées au prochain sommet des 27 chefs d’Etats et de gouvernement européens le 16 septembre à Bratislava.

Sept présumés djihadistes arrêtés

Bernard Cazeneuve a auparavant indiqué que sept personnes “en lien avec des réseaux terroristes” avaient été arrêtées en août. Trois d’entre elles au moins avaient des “projets constitués” d’attentats, a précisé le ministre français de l’Intérieur.

“Le nombre d’individus en lien avec des réseaux terroristes interpellés par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) dans les six premiers mois de l’année en France est équivalent à celui de la totalité de l’année 2015”, a-t-il précisé.

En proie à une menace terroriste sans précédent, la France a subi en un mois et demi trois attaques djihadistes revendiquées par le groupe Etat islamique, dont l’attentat de Nice du 14 juillet (86 morts), plus de six mois après les attentats de Paris et Saint-Denis en novembre (130 morts).

Par mesure de précaution, de nombreuses festivités estivales traditionnelles ont été restreintes ou supprimées un peu partout en France.

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