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Deux “oui” nets, mais un rejet tout aussi franc en matière fiscale

Les Suisses ont dit nettement "oui" à la naturalisation facilitée et au fonds routier, mais ont rejeté RIE III (photo symbolique). Keystone/FABRICE COFFRINI sda-ats

(Keystone-ATS) Les Suisses ont exprimé des avis très tranchés dimanche en votations fédérales. S’ils ont nettement accepté de créer un fonds routier et de faciliter la naturalisation facilitée des petits-enfants d’immigrés, ils ont aussi balayé à 59,1% des voix la 3e réforme de la fiscalité des entreprises.

Seuls quatre cantons ont dit “oui” à ce projet, dit RIE III: Zoug, Nidwald, le Tessin et Vaud. Parfois du bout des lèvres. Les cantons les plus dépendants des statuts fiscaux appelés à disparaître se sont montrés plus indulgents. D’autres ont manifesté un “niet” bien plus cinglant. Comme Berne ou le Jura où plus des deux tiers des votants se sont prononcés contre la réforme.

Le verdict met fin à une campagne très virulente. La droite, les cantons et le Conseil fédéral n’ont pas réussi à convaincre qu’il s’agissait d’une réforme incontournable. Le PS peut lui se féliciter du résultat. Il avait dénoncé une série de cadeaux faits aux multinationales et aux actionnaires alors que la population, classe moyenne en tête, devrait payer les pots cassés.

La Suisse a promis de supprimer en 2019 les statuts spéciaux critiqués à l’international. Ce délai ne pourra pas être tenu car il faut au moins deux ans pour que les cantons et la Confédération puissent régler les détails d’application d’une réforme.

Le Conseil fédéral pourrait présenter un nouveau paquet au Parlement d’ici la fin de l’année, mais il faut compter avec un peu plus de temps. Les travaux préparatoires vont commencer dans les prochains jours, mais tout ne se fera pas du jour au lendemain, selon Ueli Maurer. Une analyse approndie va être menée, en association avec les cantons et les villes, pour trouver une nouvelle solution.

“Oui” à la naturalisation

Les Suisses ont en revanche fait confiance au Parlement sur la naturalisation facilitée. Seuls sept cantons alémaniques ont refusé de modifier la constitution en faveur des petits-enfants d’immigrés. C’est la première fois qu’un tel objet obtient la majorité du peuple et des cantons. Issu d’une initiative parlementaire d’Ada Marra (PS/VD), le projet a été approuvé par 60,4% des votants.

Les Neuchâtelois ont été les plus convaincus avec 75,1% de “oui” devant les Genevois (74%) et les Vaudois (72,8%). Même le Valais a rejoint le reste de la Suisse romande avec 60,9% de soutien. Dans le camp adverse, la résistance la plus forte est venue d’Appenzell Rhodes-Intérieures (56,4%) puis de Schwyz (54,2%) et d’Obwald (53,6%). Uri, Glaris, St-Gall et la Thurgovie ont également dit “non”.

Les Suisses ne devaient trancher que sur le principe, mais la loi d’application, déjà prête, est très restrictive. Seul un peu moins de 25’000 personnes devraient pouvoir obtenir le passeport suisse plus facilement. Cela n’a pas empêché l’UDC de faire une campagne axée sur la peur des naturalisations de masse ou incontrôlées avec une affiche montrant une femme en niqab. Ces exagérations semblent avoir été contre-productives.

Le Conseil fédéral veut aller vite. Le délai référendaire pour la loi d’application commencera à courir dans les jours à venir. “Je pars du principe que le texte entrera en vigueur au plus tard d’ici un an”, a précisé la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga.

De l’argent pour les routes

Les Suisses ont encore approuvé la création d’un fonds routier doté de trois milliards de francs par an pour financer autoroutes et mobilité urbaine par 62% des voix. Le fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (FORTA) a reçu le soutien le plus élevé dans les cantons de Neuchâtel (76,9%) et de Vaud (74,3%).

Tous deux attendent la manne fédérale pour construire entre autres les contournements de Morges (VD) et du Locle (NE). Ils sont suivis du Valais (63,4%), du Jura (61,8%), du canton de Fribourg (60,2%), de celui de Berne (59,1%) et de Genève (56,8%). Aucun canton n’a boudé le nouveau fonds routier. Le “oui” le plus timide a été prononcé par Bâle-Ville (53,6%).

FORTA a convaincu 1,5 million de votants, alors que 923’000 personnes ont glissé un “non” dans l’urne. Le fonds permettra de remplacer les infrastructures routières devenues obsolètes, et ainsi de réduire les bouchons. Un montant de 390 millions de francs est prévu pour des projets de mobilité douce, de trams ou de métros. Les cantons participeront à hauteur de 60 millions de francs par an à l’intégration des 400 km de routes cantonales au réseau national.

Le Conseil fédéral veut rapidement mettre en oeuvre le projet. Il mettra en consultation les ordonnances correspondantes le mois prochain et veut transmettre son message sur le premier programme d’aménagements financés par le fonds au Parlement à la fin de l’année.

Il table sur un premier financement quadriennal pour début 2020. “Le contournement du Locle va pouvoir avancer”, a remarqué la ministre des transports Doris Leuthard. L’augmentation de 4 centimes du prix de l’essence ne devrait pas intervenir avant 2019-2020.

Environ 46% des Suisses

La campagne virulente sur RIE III n’aura pas mobilisé outre mesure les Suisses. La participation aux scrutins dimanche, dans la moyenne nationale supérieure des dernières votations, s’est élevée à environ 46%. Comme d’habitude, les Schaffhousois, qui sont soumis au régime du vote obligatoire, ont été les plus assidus avec une participation d’environ 66%.

Seuls autres cantons à voir plus d’un citoyen sur deux se prononcer, parfois de justesse: Zoug (53%), Bâle-Ville (52%), Appenzell Rhodes extérieures (50%), les Grisons (50%) et Neuchâtel (52%). Dans la majorité des cantons, la participation se situe entre 40 et 50%. Ceux de Glaris (un peu moin de 40%) et d’Uri (39%) arrivent en queue de peloton.

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