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Ethiopie: une bousculade fait au moins 52 morts

L'Ethiopie est actuellement en proie à un mouvement de contestation anti-gouvernementale sans précédent depuis une décennie, qui a commencé en région oromo (centre et ouest) au mois de novembre 2015 et qui s'est étendu depuis l'été à la région amhara (nord) (Photo symbolique). Keystone/EPA/STEPHEN MORRISON sda-ats

(Keystone-ATS) Au moins cinquante-deux personnes sont mortes dimanche dans un mouvement de foule lors du traditionnel festival oromo Irreecha, dans la ville de Bishoftu, au sud d’Addis Abeba, selon le gouvernement régional oromo. L’opposition évoque un bilan encore plus élevé.

Le gouvernement régional oromo a expliqué dans un communiqué que des violences avaient éclaté lors de cet événement en raison de l’action de “forces irresponsables”. “52 personnes sont mortes dans cette bousculade”, a-t-il ajouté. Le gouvernement fédéral éthiopien avait auparavant fait état de “pertes en vies humaines”, sans les chiffrer. L’opposition, elle, parle d’au moins 100 victimes.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes s’étaient rassemblées sur les bords du lac Harsadi, sacré pour les Oromo, pour assister à la cérémonie de l’Irreecha qui marque la fin de la saison des pluies. De nombreux participants brandissaient leurs bras croisés au-dessus de la tête, un geste devenu le symbole de la contestation des Oromo face aux autorités éthiopiennes, a constaté un photographe de l’AFP.

Gaz lacrymogène

La cérémonie a dégénéré lorsque des dirigeants oromo affiliés au gouvernement ont été pris à partie par la foule, selon la même source. Les manifestants qui réclamaient “justice” et “liberté” ont lancé des pierres et des bouteilles sur les forces de sécurité, qui ont riposté d’abord à coups de bâton, puis avec des gaz lacrymogènes. Ce qui a créé un mouvement de panique.

Au moins une cinquantaine de personnes sont tombées les unes sur les autres dans un fossé profond de plusieurs mètres à proximité, selon ce photographe. Celui-ci a dénombré entre 15 et 20 corps inanimés. Certaines des personnes étaient d’après lui décédées, mais il n’a pu affirmer avec certitude leur nombre. La police l’a ensuite obligé à quitter les lieux.

Tirs

Des tirs ont aussi claqué, sans qu’il soit possible de déterminer s’il s’agissait de tirs à balle réelle ou non. Des cartouches de balles en caoutchouc ont également été retrouvées sur place.

Le gouvernement régional oromo a cependant certifié que toutes les personnes avaient été tuées dans la bousculade “et pas en raison des mesures prises par la police, comme cela a été rapporté de manière erronée par certains médias.”

Des activistes oromo ont déjà appelé sur les réseaux sociaux à “cinq jours de colère” en réponse à ce drame. Une forte présence policière était visible dimanche après-midi dans la région oromo, autour d’Addis Abeba.

Contestation sans précédent

“Ce gouvernement est une dictature. Il n’y a pas d’égalité, ni de liberté d’expression. Il n’y a que le TPLF”, a déclaré Mohamed Jafar, un des manifestants, en référence au Front de libération du peuple du Tigré. Le TPLF avait renversé la dictature communiste de Mengistu Haile Mariam en 1991 et est aujourd’hui accusé de monopoliser les postes-clés au sein du pouvoir.

L’Ethiopie est actuellement en proie à un mouvement de contestation anti-gouvernementale sans précédent depuis une décennie, qui a commencé en région oromo (centre et ouest) au mois de novembre 2015 et qui s’est étendu depuis l’été à la région amhara (nord).

Ces deux ethnies représentent environ 60% de la population éthiopienne. Elles contestent de plus en plus ouvertement ce qu’ils perçoivent comme une domination sans partage de la minorité des Tigréens, issus du nord du pays.

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