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Rome revoit ses prévisions de croissance à la baisse

Matteo Renzi veut bénéficier d'une dérogation au pacte de stabilité au titre de "circonstances exceptionnelles",à savoir notamment la vague d'immigration massive qui touche le pays. Sur ce dossier "l'Europe a une sérieuse dette vis-à-vis de l'Italie", a-t-il estimé (archives). KEYSTONE/EPA/FILIP SINGER sda-ats

(Keystone-ATS) L’Italie a abaissé mardi sa prévision de croissance économique pour 2016 et 2017 et relevé sa prévision de déficit public pour ces deux mêmes années. Des annonces susceptibles de créer des tensions avec la Commission européenne.

Le gouvernement de Matteo Renzi a approuvé la nouvelle version du document économique et financier (DEF) fourni par le Trésor italien. Celui-ci prévoit désormais une progression du produit intérieur brut (PIB) de 0,8% cette année, contre 1,2% dans la précédente estimation en avril, et de 1,0% l’année prochaine, contre 1,4% auparavant.

“C’est une ligne de prudence”, a déclaré le président du conseil italien Matteo Renzi lors d’une conférence de presse, à l’issue d’un conseil des ministres tenu entre 22h15 et 23h00. Il a martelé que malgré ces nouvelles prévisions “la courbe de croissance se poursuit”. L’Italie a renoué avec la croissance en 2014, après deux ans de récession. Après avoir augmenté de 0,1% cette année-là, son PIB a progressé de 0,7% en 2015.

Dérogation

L’objectif de déficit a été porté de 2,3% à 2,4% du PIB pour 2016 et de 1,8% à 2,0% pour 2017.

Le déficit public italien s’est établi l’an passé à 2,6% du PIB, contre 3% en 2014. Pour 2017, l’UE avait fixé un objectif de 1,8% que Rome s’était engagé à respecter.

Matteo Renzi veut bénéficier d’une dérogation au pacte de stabilité au titre de “circonstances exceptionnelles”, à savoir le séisme meurtrier ayant frappé le pays en août, et la vague d’immigration massive qui touche le pays. Il demande donc que les dépenses liées soient tenues hors des comptes du Pacte de stabilité.

“Nous avons fait des hotspot (centres d’accueil), fermé les frontières, l’Europe a une sérieuse dette vis-à-vis de l’Italie”, a-t-il estimé.

L’UE lui avait accordé en 2015-2016 de la “flexibilité budgétaire” au titre des réformes et des investissements, une clause considérée comme “épuisée” et ne pouvant donc être réutilisée.

Piques à l’Allemagne

Citées par les agences italiennes, des sources communautaires ont indiqué mardi soir, avant les annonces de Rome, que les nouveaux chiffres seraient “sous la responsabilité du gouvernement italien”. “Nous attendons la présentation du projet de budget 2017 pour être en mesure de l’évaluer selon le calendrier prévu”, ont-elles dit, en soulignant que les contacts récents avec Rome “ne constituaient pas une négociation: aucun élément, aucun chiffre n’a fait l’objet d’un accord”.

Un revers infligé par la Commission sur la question du déficit serait un coup dur pour M. Renzi avant le référendum sur la réforme constitutionnelle, prévu le 4 décembre et pour lequel il joue en partie son avenir politique.

Le jeune et fougueux chef du gouvernement italien n’a eu cesse ces derniers temps de lancer des piques en direction de l’Allemagne pour son non-respect de la règle sur l’excédent commercial normalement limité à 6% du PIB. L’Europe doit repartir avec les investissements, qui portent la croissance. Si un pays a un excédent commercial de 89 milliards d’euros (et ne l’utilise pas pour investir, ndlr), ce pays fait mal à l’Europe”, a-t-il encore fustigé mardi.

L’économie italienne, plombée par des problèmes structurels, l’impact du Brexit et le ralentissement de la croissance mondiale, souffre en outre des inquiétudes autour de ses banques et de l’instabilité politique générée par le référendum.

L’UE réclame à l’Italie une baisse de son déficit, seul moyen selon elle de contenir la colossale dette publique italienne (2248 milliards d’euros en juin). La dette grimpera à 132,8% du PIB en 2016 et ne diminuera qu’en 2017 à 132,2%, selon les nouvelles prévisions.

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