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Semenya insaisissable

(Keystone-ATS) Tout paraît à nouveau si facile pour Caster Semenya! La jeune femme de 25 ans a décroché le titre olympique sur le double tour de piste à Rio en 1’55”28, meilleur temps de la décennie.

La Sud-Africaine, sept ans après avoir soulevé le débat sur l’intersexualité (hyperandrogénie) dans l’athlétisme avec son titre mondial à Berlin sur 800 m, est revenue de manière éclatante sur le devant de la scène. L’athlète autrefois entraînée par Maria Mutola a fait ce qu’elle a voulu. Elle a contrôlé les opérations à l’avant du peloton même quand la Burundaise Francine Niyonsaba a tenté de prendre le large, avant de déborder tout le monde, comme à la parade, dans la dernière ligne droite, pour l’emporter avec plus d’une seconde d’avance.

Niyonsaba remporte l’argent en 1’56”49 et la Kényane Margaret Wambui, championne du monde juniors en 2014, le bronze en 1’56”89. Niyonsaba n’a jamais perdu de 800 m dans sa vie… sauf quand elle affrontait Semenya. L’histoire s’est répétée.

Les trois femmes sur le podium, à l’apparence différente des canons féminins habituels, sinon masculine, sont susceptibles de produire naturellement un taux de testostérone supérieur à la moyenne des femmes. Les experts parlent d’hyperandrogénie, un phénomène qui ne concernerait que 0,005 % des femmes dans la population générale mais serait 140 fois supérieur dans le demi-fond féminin, comme l’avait démontré une enquête de la Fédération internationale (IAAF) aux Mondiaux de Daegu en 2011.

Le cas est surtout net pour Semenya. Après son triomphe de Berlin, elle avait été suspendue par l’IAAF, avant de pouvoir recourir dès juillet 2010. Observée par le monde entier, “épiée” sous toutes les coutures en raison de son intersexualité, elle avait traversé ensuite des moments très difficiles, remportant tout de même l’argent aux Mondiaux 2011 et aux JO 2012. Elle aurait suivi un traitement pour faire baisser son taux de testostérone, afin de se conformer à une valeur limite fixée par l’IAAF.

Casse-tête

Mais l’été dernier, le Tribunal arbitral du sport (TAS) à Lausanne a estimé qu’il n’existait pas suffisamment de preuves scientifiques montrant que le taux de testostérone influençait de manière décisive les performances. Le règlement de l’IAAF sur l’hyperandrogénie a donc été levé jusqu’en juillet 2017, le temps que l’IAAF, le cas échéant, apporte la preuve du contraire. Depuis cette levée de restriction, les performances de Semenya ont repris l’ascenseur.

Semenya, icône en Afrique du Sud et très appréciée pour ses qualités humaines, ne s’exprime pas sur le sujet, ni son entourage. Ses rivales sont partagées, entre celles qui estiment qu’elle bénéficie d’un avantage indu et d’autres retenant d’abord que cela n’a rien à voir avec du dopage. En attendant, l'”affaire” est un casse-tête pour l’IAAF.

Semenya ne s’est cependant pas approchée samedi du très vieux record du monde (1’53”23 en 1983) de la Tchèque Jarmila Kratochvilova, que beaucoup d’observateurs estiment qu’elle a dans les jambes.

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