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Vaud: lancement d’un référendum contre l’interdiction de mendier

L'interdiction de la mendicité ne concerne pas que les Roms mais toutes les personnes qui tendent la main, a rappelé le comité vaudois contre l'interdiction de la mendicité lundi lors de l'annonce du lancement de son référendum. KEYSTONE/LAURENT GILLIERON sda-ats

(Keystone-ATS) Un comité d’associations et de partis de gauche, dont Opre Rom, la Jeunesse socialiste, le POP et Solidarités, lance un référendum contre la loi vaudoise interdisant la mendicité. Il appelle les partis de gauche et du centre à soutenir sa démarche.

Fin septembre, le Grand Conseil a accepté à une courte majorité la proposition de l’UDC d’interdire la mendicité dans le canton de Vaud. “Il s’agit tout simplement d’interdire les pauvres. C’est grave du point de vue moral, mais aussi constitutionnel”, a dénoncé lundi devant la presse à Lausanne Véra Tchérémissinoff, présidente d’Opre Rom, une association de défense de Roms.

Criminaliser le geste de demander l’aumône est inadmissible dans une société démocratique. On touche aux droits fondamentaux. L’initiative acceptée est contraire à la Convention européenne des droits de l’homme et à la Constitution vaudoise, a-t-elle rappelé. De plus, cette loi ne fera pas partir les Roms. Ils chercheront d’autres solutions, comme la délinquance et la prostitution.

Pour le porte-parole des Jeunes socialistes Romain Pilloud, “cacher la misère n’y met pas fin”. On veut se débarrasser des mendiants comme on nettoie la chaussée de ses déchets, a-t-il déploré.

Usine à gaz

L’exemple genevois le montre bien, l’interdiction de la mendicité est une usine à gaz, a renchéri le conseiller communal lausannois de solidaritéS Hadrien Buclin. Elle engendre des coûts administratifs et judiciaires qui seraient mieux utilisés pour lutter contre la pauvreté plutôt que contre les pauvres.

L’interdiction de l’aumône fait d’ailleurs l’objet d’une procédure devant la Cour européenne des droits de l’homme, a précisé son collègue, le député Jean-Michel Dolivo. Les juges de Strasbourg devraient se prononcer dans un délai de deux à trois ans.

12’000 signatures

Il est par ailleurs cocasse de voir que l’UDC qui défend le fédéralisme empêche les communes d’avoir leur propre règlement sur la mendicité, a poursuivi devant la presse M.Buclin.

“Avec nos forces actuelles, on n’est pas certain de faire aboutir le référendum. Il faut réunir 12’000 signatures en 60 jours, sans compter 2000 paraphes de marge”, s’est-il inquiété.

Appel aux partis

Le comité appelle tous les partis qui se sont opposés à l’interdiction lors du vote parlementaire (socialistes, verts, Verts’lib et PDC-Vaud libre) à s’engager résolument pour la récolte de signatures. “On espère qu’ils seront conséquents et qu’ils rejoindront le comité référendaire”, a relevé M.Buclin.

Pas mal de groupes au Grand Conseil sont mal barrés. Ils veulent éviter une votation populaire qui deviendrait l’un des thèmes principaux de la campagne pour les élections cantonales, a relevé Ilias Panchard. Le co-président des Jeunes Verts soutient le référendum en son propre nom, son parti se prononçant jeudi.

La récolte des signatures démarrera dès la publication du décret dans la Feuille des avis officiels, probablement cette semaine.

Pas que des Roms

Côté associations, la Fondation Mère Sofia, la communauté Sant’Egidio et Emmaüs soutiennent aussi le référendum. “Demander l’aumône est le dernier moyen qu’ont les pauvres de subvenir à leurs besoins”, a déclaré Yan Desarzens, directeur général de la Fondation Mère Sofia.

“Les gens qui mendient ne sont pas que les Roms. La loi interdit à l’ensemble des personnes de faire la manche. A la Soupe populaire, on accueille jusqu’à 320 couverts par soir, et ce ne sont pas 320 Roms”, a-t-il souligné.

“Il faut sortir de cette situation inacceptable”, a relevé de son côté la députée popiste Christiane Jaquet-Berger. Le comité a mis en action une seconde démarche: il a écrit au Conseil d’Etat pour lui demander de réintervenir et proposer rapidement un projet garantissant le droit de tendre la main, a-t-elle expliqué. Au cas où il remettrait l’ouvrage sur le métier, le référendum pourrait être arrêté.

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