
Le tennis adopte l’arbitrage vidéo

Les joueurs peuvent faire appel à des images de synthèse pour contester une décision arbitrale. Une révolution qui a débuté mercredi au tournoi de Miami.
Andi Egli, unique arbitre suisse à figurer parmi l’élite mondiale, se réjouit de l’introduction de ce système de vérification, basé sur la technologie Hawk-Eye. Et il n’est pas le seul.
C’est tout simplement une révolution. Et pour le coup, la fédération américaine de tennis apparaît comme une pionnière dans le monde de la petite balle jaune.
Normal, il faut dire que l’environnement s’y prête. Les Etats-Unis offrent un terrain idéal pour ce type d’innovation radicale. Ainsi, plusieurs sports font déjà appel au verdict de l’image en cas de phase de jeu litigieuse.
C’est le cas pour le baseball, le football américain, le basket-ball et le hockey sur glace.
Téléguidage des missiles
Utilisée à l’origine pour la chirurgie du cerveau et le téléguidage des missiles, la technologie Haw-Eye s’applique parfaitement au tennis.
Les images capturées par plusieurs caméras placées à des endroits stratégiques sont transformées en projection tridimensionnelle. Le trajet de la balle est ensuite reconstitué sur une surface de jeu virtuelle.
«Cette innovation est très intéressante. Je me réjouis de voir ce que cela va donner. En quelques secondes, nous pourrons confirmer ou infirmer une décision litigieuse », précise Andi Egli à swissinfo.
« La télévision dispose déjà de cette technologie, explique-t-il. Et elle montrait parfois des résultats différents des nôtres. Cela va nous aider».
Rien ne va changer
Le Saint-Gallois est l’unique arbitre suisse à faire partie de la douzaine de professionnels qui constituent l’élite mondiale. Il n’est pas engagé à Miami, mais sera présent sur la chaise d’arbitre des courts de l’US Open.
«Pour moi, poursuit-il rien ne va vraiment changer. La situation ressemble à ce que nous connaissons déjà depuis des années sur terre battue où il est possible de se référer à la marque laissée sur le sable par la balle pour revenir ou non sur sa décision. Désormais, cette possibilité existe aussi pour les surfaces en dur».
Stimuler l’intérêt
Comme l’arbitre suisse, les officiels de la Fédération internationale et du circuit masculin de l’ATP ainsi que les joueurs eux-mêmes sont impatients de pouvoir tester cette technologie.
«Ce n’est pas seulement une manière de mieux arbitrer, c’est aussi un très bon moyen de stimuler l’intérêt et de conserver le sens de la stratégie et du danger dans le sport», argumente ainsi le président de l’ATP Etienne de Villiers dans un communiqué.
Voix discordante
«Je suis professionnel depuis 20 ans, et c’est la chose la plus excitante qui puisse arriver pour les joueurs, les supporters et la télévision, ajoute le joueur américain André Agassi. Cette technologie va donner une autre dimension au jeu».
Des voix discordantes se sont élevées malgré tout. «C’est de la folie ce qui se passe. C’est jeter l’argent par les fenêtres», a déclaré Roger Federer au quotidien allemand Die Welt.
Le joueur valaisan Yves Allegro relevait également récemment dans le journal «Le Temps» le risque de voir des arbitres hésitants et le caractère inéquitable de la technologie, qui n’équipera que les courts principaux.
«Nous avons déjà discuté de ce dernier point lorsque les lignes du carré de service des courts principaux ont été équipées d’un signal sonore annonçant que la balle était out. Et cela n’a pas posé de problème», relativise Andi Egli.
Une question de…crédit
Déjà largement utilisée par la télévision, ce système électronique – qui admet une marge d’erreur de 3 millimètres – pourra être sollicité à deux reprises par les sportifs durant chaque manche.
Si le joueur a raison, son crédit ne baisse pas. S’il se trompe à deux reprises, il ne pourra plus recourir au système de vérification. Les crédits non utilisés ne se reportent pas au set suivant. Et un crédit supplémentaire est octroyé lors d’un éventuel un tie-break (jeu décisif).
En décembre 2005, un premier essai significatif a déjà été tenté lors du tournoi mixte et par équipes de la Hopman Cup à Perth. Selon Andi Egli, dans un cas sur cinq le joueur qui avait protesté avait raison. D’autres sources affirment que sur les 83 contestations, 45% étaient justifiées.
swissinfo, Mathias Froidevaux
Andi Egli est l’unique arbitre suisse professionnel à arborer le «Gold Badge» sur le revers de sa veste.
Au total, une douzaine d’arbitres seulement appartiennent à cette catégorie des meilleurs du monde.
La Suisse compte aujourd’hui une cinquantaine d’arbitres diplômés.
Agé de 41 ans, Andi Egli a déjà arbitré plus de 2000 parties et participé à plus de 50 tournois du Grand Chelem (Open d’Australie, Roland-Garros, Wimbledon et US Open). Il est arbitre professionnel employé à plein temps par la Fédération internationale depuis 1991.
– En Suisse, les arbitres peuvent gravir les échelons de la catégorie régionale C et nationale B. Puis, en suivant des cours de la Fédération internationale de Tennis (ITF), ils peuvent obtenir les Badges Blanc et de Bronze.
– Des prestations très bonnes et régulières leur permettent d’atteindre le Silver Badge (Thomas Mischel est le seul arbitre suisse dans cette catégorie) et le Gold Badge (Andi Egli)
– Le recours à la technologie Hawk-Eye qui permet de reconstituer virtuellement la trajectoire de la balle est une petite révolution dans le monde du tennis.
– C’est l’évolution la plus significative de ce sport depuis l’introduction du tie-break (jeu décisif) en 1970.

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