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L’adieu aux armes des Farc avant de se convertir en parti politique

Les derniers camions chargés des fusils remis à l'ONU doivent quitter les 26 zones où les troupes sont regroupées depuis le début de l'année (archives). KEYSTONE/EPA EFE / UN MISSION IN COLOMBIA/UN MISSION IN COLOMBIA sda-ats

(Keystone-ATS) Les armes des Farc se sont tues. Les guérilleros, qui pendant plus de cinq décennies ont combattu l’Etat colombien, débutent une nouvelle vie, comme civils, dans d’anciennes zones de guerre, et préparent le lancement de leur parti politique.

“Aujourd’hui, c’est le dernier souffle du conflit (…) Avec cet abandon des armes, le conflit se termine vraiment et une nouvelle phase débute dans la vie de notre Nation”, a déclaré Juan Manuel Santos le chef de l’Etat et prix Nobel de la Paix 2016, dans une allocution retransmise depuis la zone de Pondores (La Guajira, nord). Les FARC sont la plus ancienne et plus importante rébellion du continent américain, fondée en 1964.

Aux côtés d’Ivan Marquez, l’un des chefs des Farc, M. Santos a verrouillé le dernier conteneur à quitter, sous supervision des Nations unies, la zone de Pondores, l’une des 26 où les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) sont regroupées depuis le début de l’année.

Pendant huit mois, près de 7000 hommes, femmes et mineurs ont progressivement laissé leurs armes dans des conteneurs supervisés par une mission de l’ONU, afin qu’elles soient fondues. Le délai pour localiser les dernières caches d’armement court jusqu’au 1er septembre.

Les Farc, qui ont échoué à prendre le pouvoir par les armes, entament une nouvelle étape, après avoir signé la paix en novembre pour mettre fin à un conflit qui a impliqué d’autres guérillas et des paramilitaires, faisant environ 7,5 millions de victimes, entre morts, disparus et déplacés.

Une vie civile

A partir de maintenant, les ex-guérilleros seront des civils, qui en principe devraient vivre dans ces 26 zones de désarmement, désormais appelées “espaces territoriaux de formation et de réincorporation”. “Notre pari est que l’immense majorité, du moment que nous réussissons à générer des projets collectifs économiques restent dans ces zones, voire avec leurs familles”, a déclaré Carlos Antonio Lozada, l’un des chefs des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

D’une superficie moyenne de trois km2, ces zones sont éloignées des grandes villes et situées dans d’anciens fiefs de la guérilla. Leurs alentours sont surveillés par les forces de l’ordre.

Outre environ 450 dissidents des Farc, l’Etat colombien affronte encore l’Armée de libération nationale (ELN), guérilla moins importante inspirée de la révolution cubaine avec laquelle le gouvernement a entamé des pourparlers, et de puissants gangs de trafiquants de drogue issus des anciennes milices paramilitaires.

Nouveaux risques

Il est également prévu que les Farc terminent mardi de remettre l’inventaire de leurs biens destinés à dédommager leurs victimes, et que les enfants-soldats quittent les zones. A ce jour, l’Etat a accueilli 88 mineurs sortis des rangs de la rébellion.

“On peut déjà considérer que les Farc disparaissent comme groupe guérillero (…) et deviennent des citoyens normaux”, a déclaré l’analyste Ariel Avila, de la fondation Paix et Réconciliation, qui suit la mise en oeuvre du processus de paix.

Cette nouvelle étape cruciale pour la Colombie comporte toutefois de multiples défis, qui vont de la sécurité physique des anciens combattants au lent processus d’amnistie de centaines de Farc encore en prison.

A ce jour, sept membres de l’ex-guérilla ont été assassinés depuis le début du désarmement en janvier, selon M. Avila.

Parti de gauche

“Il y a ensuite la sécurité économique, qui présente aujourd’hui le plus de problèmes. Les guérilleros ne savent pas ce qu’ils vont devenir demain”, a-t-il ajouté.

Tout en devant rendre des comptes devant une justice spéciale, les Farc vont se transformer en parti politique de gauche à partir du 1er septembre. Elles doivent faire connaître ce jour-là le nom de ce nouveau mouvement, à quelques mois des élections générales prévues en mai 2018.

L’accord de paix leur garantit pendant deux mandats, soit huit ans, au moins dix sièges au Congrès bicaméral qui compte 268 parlementaires.

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