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La voiture à hydrogène «made in Switzerland»

A Shanghai, la voiture a tourné avec des plaques fribourgeoises. Michelin

C’est la première voiture à hydrogène de conception entièrement originale. Elle a vu le jour entre Fribourg et Villigen, en Argovie.

Ce prototype construit par Michelin et l’Institut Paul Scherrer a fait grosse impression à la réunion mondiale des véhicules «propres» de Shanghai.

Elle s’appelle simplement Hy-Light. «Hy» pour hydrogène et «Light» pour légère. Cette voiture de quatre places ne pèse en effet que 850 kilos. C’est au bas mot 600 de moins que les modèles concurrents. Un gros atout lorsqu’il s’agit de faire accélérer l’engin, ou de le freiner.

La plupart des grands constructeurs automobiles ont déjà des prototypes à hydrogène. Mais il s’agit généralement de modèles conventionnels, où l’on a simplement remplacé le moteur par une pile à combustible, produite à l’extérieur.

«Ce sont de superbes adaptations, commente Daniel Laurent, directeur du Centre de recherche Michelin à Givisiez (Fribourg). Mais personne jusqu’ici n’avait encore ré-envisagé entièrement une voiture pour la propulsion à l’hydrogène».

Un concentré de haute technologie



Cette voiture nouvelle est le fruit de deux ans de travail, mené conjointement par le Centre de recherche du géant français du pneumatique et l’Institut Paul Scherrer (PSI) à Villigen.

«Le PSI avait déjà une expérience des piles à combustible et nous n’en avions pas, explique Daniel Laurent. Mais nous savions faire tout le reste, soit la définition de la voiture, son design, sa carrosserie, châssis, suspension, et aussi toute la chaîne de puissance.»

La Hy-Light est donc un véritable concentré de haute technologie. La pile à combustible fournit le courant à deux moteurs électriques compacts situés dans les roues avant, et également à une suspension active dernier cri, qui s’adapte instantanément aux conditions de la route.

Et pour pallier certaines contraintes des voitures électriques, Hy-Light est dotée de super-condensateurs. Ces sortes de batteries capables de se remplir et de se vider en quelques secondes fournissent à la demande un supplément de puissance. Elles savent aussi récupérer l’énergie cinétique du freinage.

Elles sont produites par Montena, autre entreprise fribourgeoise qui travaille depuis des années avec le PSI, mais également avec Volkswagen et avec l’industrie spatiale.

Résultat: une voiture capable d’emmener ses quatre occupants à 130 km/h, d’accélérer de 0 à 100 km/h en 12 secondes, un silence presque parfait, une stabilité routière de tous les instants et une consommation d’énergie équivalent à 2,3 litres d’essence aux 100 kilomètres.

«Pas avant 15 à 20 ans»

Avec ces atouts, la Hy-Light devrait faire un tabac sur le marché. Reste à savoir quand elle y arrivera. Si elle y arrive un jour. «Ce type de décisions revient à la direction du groupe Michelin», précise d’emblée Daniel Laurent.

Si production en série il y a, elle devrait se faire avec un partenaire, mais lequel? Une question que le directeur du Centre de recherche de Givisiez juge «totalement prématurée». «Michelin ne va pas concurrencer ses propres clients», se contente-t-il d’indiquer.

Michelin qui, s’il a su se faire un nom et un logo mondialement connus dans le domaine des pneumatiques, ne s’en est pas moins toujours intéressé à l’automobile. Ainsi, Pierre Boulanger, père de la fameuse 2CV de Citroën, était un homme de Michelin. Et à l’époque, le groupe de Clermont-Ferrand détenait la marque aux deux chevrons.

Reste que pour l’heure, la Hy-Light n’est qu’un prototype. Un prototype entièrement monté à la main et dont la revue Touring (du Touring Club Suisse) estime le prix de revient à «plusieurs millions de francs suisses».

Dans les colonnes de la même publication, Ralph Eichler, directeur du PSI, explique que pour l’heure «on ne sait absolument pas comment fabriquer des piles à combustible avec des robots industriels, technique indispensable à la production en grande série».

L’homme de science ne s’en dit pas moins persuadé que les voitures utilisant cette technologie seront un jour disponibles dans le commerce. Mais selon lui, ce jour viendra plutôt dans 15 à 20 ans que dans 5 à 10 ans.

L’avenir passe par la Chine



En attendant, la Hy-Light a fait grosse impression le mois dernier sur le nouveau circuit de Formule 1 de Shanghai, cadre choisi par Michelin pour l’édition 2004 de son Challenge Bibendum.

Depuis 1998, le groupe français organise chaque année cette compétition mondiale pour véhicules «propres». Et le choix de la Chine n’est pas innocent.

En plein boom économique, ce pays est déjà, avec deux millions de nouvelles immatriculations par année, le quatrième marché automobile au monde. Et tout indique que cette croissance ira en s’accélérant.

Certains visionnaires prédisent même que des pays comme la Chine ou l’Inde pourraient miser directement sur les transports à l’hydrogène et «sauter» ainsi l’étape du pétrole, dont les réserves ne seront de toute façon pas suffisantes pour assurer leur développement à long terme.

swissinfo, Marc-André Miserez

Cette voiture de quatre places ne pèse que 850 kilos.
Vitesse de pointe de 130 km/
Accélération de 0 à 100 km/h en 12 secondes.
Consommation d’énergie équivalente à 2,3 litres d’essence aux 100 km
Elle ne rejette dans l’atmosphère que de la vapeur d’eau

– La Hy-Light est le premier prototype de voiture à hydrogène qui ait été entièrement conçu à partir de zéro, alors que les autres sont des adaptations de modèles automobiles existants

– Elle a été construite par le Centre de recherche de Michelin à Givisiez (Fribourg) et par l’Institut Paul Scherrer à Villigen (Argovie), qui a fourni la pile à combustible.

– Selon ses concepteurs, il est encore beaucoup trop tôt pour parler de production en série.

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