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Des résidus d’un polluant éternel retrouvés dans le pain et le vin romands

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La molécule pourrait avoir un impact sur la reproduction des êtres vivants. Screenshot RTS

Selon l’enquête conjointe d’On en parle, A bon entendeur et du magazine Bon à Savoir, des résidus d’acide trifluoroacétique apparaissent dans le pain et le vin en Suisse romande. Cette molécule présente à grande échelle dans l’agriculture et l’industrie n’est pas encore réglementée, ni en Suisse, ni dans l’UE. Pourtant, elle pourrait avoir un impact sur la reproduction des êtres vivants.

L’acide trifluoroacétique (TFA) est une molécule classée dans la famille des PFAS, dits «polluants éternels», extrêmement persistants dans l’environnement. Utilisé comme réactif et solvant dans l’industrie, le TFA est aussi un sous-produit de la dégradation de pesticides et provient aussi des gaz de réfrigération. Très soluble dans l’eau, il se trouve aujourd’hui partout en Suisse, mais ne fait pas encore l’objet de réglementations.

Il y a quelques mois, l’ONG Pesticide Action Network a publié les résultats de tests effectués sur des produits européens, respectivement le vin et le pain. Des quantités importantes de TFA ont été trouvées. Mais qu’en est-il en Suisse?

Des TFA présents dans tous les échantillons

Les émissions On en parle, A bon entendeur ainsi que le magazine Bon à savoir ont demandé l’analyse en laboratoire de 16 bouteilles de vin romand de 2023, coûtant entre 10 et 15 francs, ainsi que 12 pains frais provenant des supermarchés Lidl, Migros, Aldi et Coop, avec des farines diverses. Du TFA a été trouvé dans tous les échantillons, y compris ceux labellisés «bio».

Dans les vins, de 11 à 150 microgrammes de TFA par kilo ont été trouvés, avec une moyenne de 58 microgrammes par kilo. Dans les pains, 29 à 130 microgrammes par kilo ont été trouvés, avec une moyenne 69 microgrammes par kilo. Ces valeurs sont en moyenne 50% moins élevées que celles de nos voisins européens. En revanche, comparées à la pollution de l’eau du robinet trouvée par les auditeurs et auditrices lors de l’enquête participative d’On en parle, qui était de 0,8 microgramme par litre, elles semblent bien élevées.

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«D’un point de vue de santé publique, trouver du TFA dans l’eau potable ou dans l’alimentation est un problème», explique Murielle Bochud, cheffe du département épidémiologie et systèmes de santé d’Unisanté. «Il faut réduire l’exposition de la population. Cependant, ces valeurs sont bien en dessous des 0,03mg par kilo de poids corporel proposés par l’Agence européenne de sécurité alimentaire.»

La Confédération et les faîtières attendent

Interrogé par la RTS, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire attend de voir ce qui se passera à l’international, notamment auprès de l’Union européenne et de l’Organisation mondiale de la santé. Il dit «attendre leurs directives pour prendre position.»

On en parle a aussi contacté les faîtières des vignerons et des céréales. Du côté de Vignoble suisse, la porte-parole insiste sur le besoin d’en savoir plus avant d’agir au vu des «nombreuses sources potentielles de contamination». Elle souligne aussi que «les consommateurs peuvent continuer à avoir confiance dans les vins suisses. Ils respectent les normes de sécurité alimentaire».

Swiss Granum, l’organisation de la branche Suisse des céréales, n’avait pas connaissance de la présence de TFA dans le pain. Le porte-parole ajoute que la branche n’envisage pas de mesures, «en raison du manque de données et de connaissances suffisantes.»

Un manque de données

Connaître l’impact de cette molécule sur le corps humain nécessite donc des études d’envergure. Or, la Confédération vient d’annuler le financement d’une vaste recherche à laquelle Murielle Bochud participait. Une occasion manquée, selon la spécialiste: «L’une des thématiques potentielles était de mesurer l’exposition de la population aux substances toxiques comme les PFAS. On ne saura pas quelle est la situation spécifique en Suisse, on devra se reposer sur des études réalisées dans d’autres pays. Or, il peut exister d’importantes différences régionales.»

«Avec les taux que vous avez trouvés, en mangeant une tranche de pain par jour, on est très loin d’une dose qui poserait problème – de l’ordre d’un 180e – selon les valeurs actuellement posées en Allemagne», explique Linda Bapst, chimiste cantonale valaisanne. «Je pense que l’attente de l’Union européenne et de l’OSAV est justifiée. Nous avons besoin de combler ce gap scientifique pour se déterminer sur les risques réels posés par cette substance», explique la chimiste dans l’émission On en parle. Cependant, elle souligne que cette attente ne doit pas s’éterniser. «Nous devons pouvoir être crédibles vis-à-vis des agriculteurs ou de l’industrie lorsqu’on va instaurer des limites.»

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