Manifestation vrombissante à Berne
35'000 motards ont roulé vers la capitale fédérale samedi pour dire non à «l'Etat policier sur les routes».
Ils ont protesté contre la nouvelle politique de sécurité routière qui prévoit de limiter la vitesse des motos à 80 km/h.
Selon la police municipale, quelque 20’000 motards se trouvaient sur la Place fédérale et 15’000 autres dans les rues alentour, comme en témoignaient les innombrables gros cubes parqués un peu partout au centre-ville.
Les accès à la capitale ont été complètement engorgés. De nombreux bouchons et ralentissements étaient signalés un peu partout en milieu de journée. Et le contournement de Berne a été totalement bloqué sur quatre pistes.
A 80km/h sur l’autoroute
De nombreux motards ont en effet adopté le 80 km/h sur l’autoroute, comme le prévoit le projet «Vision zéro» du Bureau suisse de prévention des accidents (bpa).
Les Valaisans ont ainsi contraint en fin de matinée tout le trafic autoroutier à rouler à cette allure, selon la gendarmerie. Ils ont été rejoints par les Vaudois sur l’A9, ce qui n’a pas manquer de provoquer d’autres engorgements.
En début d’après-midi, après avoir laissé leurs machines sur l’Allmend, en périphérie de Berne, les motocyclistes se sont rendus en un long cortège sur la Place fédérale. A pied, vêtus de cuir, le casque sous le bras, ils ont traversé la vieille ville.
D’autres, moins disciplinés, sont tout de même venus à moto au centre ville, malgré les recommandations des organisateurs. Les plaques d’immatriculation affichaient une belle variété de cantons. Quelques Français s’étaient aussi déplacés.
«Etat policier»
Copieusement sifflé, le ministre des transports Moritz Leuenberger n’a pas été épargné par les différents orateurs qui se sont succédé sur la Place fédérale.
L’ancien conseiller national du Parti de la liberté Michael Dreher a accusé le conseiller fédéral de mener une politique «idiote» et de «s’ériger en bailli pour nous imposer ses règles».
«Nous sommes contre les gens qui ont zéro vision et uniquement l’idée d’interdire. Nous ne voulons pas de l’Etat policier sur les routes», a-t-il déclaré sous un tonnerre d’applaudissements.
«Le début de la résistance»
Malgré la colère, tout s’est déroulé dans le calme, avec une «détermination tranquille», comme l’a relevé le président de la Fédération motocycliste suisse Jean-Pierre Dubosson.
Certaines motardes avaient récupéré le désormais célèbre slogan «Plutôt à poil qu’… à 80 km/h».
«Ce n’est que le début de la résistance», a clamé Caroline Birrer, de la Communauté d’intérêts motards contre Vision zéro (CI Motards). La CI Motards a en effet annoncé le lancement d’une action intitulée «route de la peur» au cours des cinq prochains mois.
Il s’agit d’attirer l’attention de l’OFROU sur les tacons de bitume, bouches d’égoûts, glissières dites «de sécurité» et autres pièges parfois mortels pour les motards.
Première suisse
Unique dans l’histoire de la moto en Suisse, cette manifestation visait à protester contre les mesures proposées par l’Office fédéral des routes (OFROU) et le bpa dans le rapport «Vision zéro» visant à réduire le nombre de victimes de la route.
Outre le bridage technique à 80 km/h et un taux d’alcoolémie spécifique de 0,2 pour mille, les motocyclistes refusent l’augmentation de 16 à 18 ans de l’âge minimum pour la conduite de motos et de scooters et la limitation à 70 km/h hors des agglomérations.
90 morts et 1’600 blessés par an
Pour sa part, le Bureau suisse de prévention des accidents estime que les motards se lancent trop tôt dans la contestation. Il a rappelé samedi que la nouvelle politique de sécurité routière sera élaborée d’ici fin 2004 dans le cadre d’une large concertation à laquelle participeront aussi les motocyclistes.
Le bpa note qu’avec 90 morts et 1’600 blessés par année en Suisse, les motards paient un «lourd tribut» à la route. Pour un nombre égal de kilomètres parcourus, le risque d’accident à moto est sept fois plus élevé qu’en voiture.
swissinfo et les agences
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