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Prédicateur libyen accusé de discrimination raciale à Bienne

Le prédicateur libyen Abu Ramadan rejette les accusations de discrimination raciale et d'escroquerie à l'aide sociale lors de sa comparution devant le tribunal régional à Bienne. KEYSTONE/MARCEL BIERI sda-ats

(Keystone-ATS) Un prédicateur libyen a comparu lundi devant le tribunal à Bienne accusé de discrimination raciale pour des propos haineux tenus lors d’un prêche. Il doit aussi répondre d’escroquerie. L’accusation demande 14 mois de prison avec sursis et l’expulsion.

Selon l’acte d’accusation, Abu Ramadan aurait appelé le 7 juillet 2017, en tant que prédicateur laïc, à la haine contre des personnes en raison de leur religion ou de leur ethnie dans la mosquée Ar’Rahman de Bienne. Il aurait visé les juifs, les chrétiens, les hindous, les Russes et les chiites.

Il aura fallu beaucoup de temps pour établir l’accusation de discrimination raciale. Un expert a dû traduire le prêche d’arabe en allemand et une expertise supplémentaire a été nécessaire pour interpréter les propos traduits.

Compte tenu de ces éléments, le Ministère public régional Jura bernois-Seeland estime avéré que ce sexagénaire a exprimé à de réitérées reprises le souhait d’éradiquer les membres de certaines ethnies et religions. Il a de ce fait lancé un appel à la haine, se rendant coupable de discrimination raciale.

Devant le tribunal régional Jura bernois-Seeland, l’accusé a rejeté ces accusations, jugeant qu’il n’avait rien à se reprocher. Il a estimé qu’un seul de ses sermons à la mosquée avait été examiné à la loupe et que certains passages avaient été sortis de leur contexte. Dans d’autres sermons, il aurait mis en garde contre l’organisation terroriste Etat islamique.

Aide sociale

Le prédicateur est aussi accusé d’avoir perçu illégalement une aide sociale d’environ 46’000 francs dans sa commune de résidence de Nidau (BE). Il aurait déclaré aux autorités communales ne disposer d’aucun revenu ni d’aucune fortune. Mais en même temps, il aurait aidé à l’organisation des pèlerinages, obtenant ainsi un revenu concret.

Devant le juge, Abu Ramadan a rétorqué qu’il avait tout fait bénévolement et qu’il n’avait rien gagné par ses services. De l’argent a circulé entre les pèlerins, lui et les organisateurs de voyages, mais tout s’est déroulé de manière correcte. Il a affirmé n’avoir jamais reçu de salaire pour ses activités religieuses.

Menace d’expulsion

La procureure a requis une peine de prison de 14 mois avec sursis pour escroquerie et discrimination raciale assortie d’une expulsion de Suisse, estimant que ce prédicateur de 68 ans n’est pas intégré. Plusieurs proches parents vivent toujours dans son pays d’origine, a ajouté la représentante du Ministère public.

A l’opposé, la défense a plaidé l’acquittement. Elle a souligné que le prêche controversé portait sur la corruption. L’avocat d’office a également rejeté les accusations sur la perception illégale d’aide sociale. Son client n’a tiré aucun avantage financier des activités qu’il organisait.

Ce ressortissant libyen arrivé en Suisse en 1998 comme demandeur d’asile a perdu son statut de réfugié fin 2017 pour s’être rendu plusieurs fois dans son pays sans jamais être inquiété. Abu Ramadan est actuellement au bénéfice d’un permis C. S’il est reconnu coupable, il risque d’être expulsé de Suisse.

Devant le juge unique, Abu Ramadan a déclaré qu’il ne pouvait pas envisager un retour durable en Libye, où il serait exposé selon lui aux dangers des partisans de l’ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, qui contrôlent une partie du pays.

Le verdict devrait être annoncé mardi en fin d’après-midi.

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