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Affaire Karimov: le procureur fédéral Patrick Lamon est récusé

Gulnara Karimova au moment de sa splendeur. La fille de l'ancien président de l'Ouzbékistan est retournée derrière les barreaux dans son pays (archives). KEYSTONE/EPA/SERGEI ILNITSKY sda-ats

(Keystone-ATS) Le procureur fédéral Patrick Lamon est relevé de l’enquête pour blanchiment qu’il menait depuis 2012 contre Gulnara Karimova. Le Tribunal pénal fédéral a admis la demande de récusation déposée par la fille de l’ancien président ouzbek Islam Karimov, décédé en 2016.

Patrick Lamon s’est joint à une délégation du Ministère public de la Confédération (MPC) qui rendait visite à son homologue ouzbek du 12 au 14 septembre 2018. Ce déplacement a été suivi le 19 décembre par une rencontre entre le MPC et une délégation de Tachkent.

Après avoir tenté à plusieurs reprises d’obtenir des renseignements sur ces contacts, le défenseur de Mme Karimova a demandé la récusation des six participants au voyage, parmi lesquels figurent aussi le procureur général de la Confédération Michael Lauber.

Dans une décision publiée mardi, le Tribunal pénal fédéral a écarté les demandes visant les personnes qui ne jouent pas de rôle dans la procédure en cours contre la recourante. En revanche, il a estimé que le déplacement de Patrick Lamon, en dehors de toute commission rogatoire, pouvait donner une apparence de prévention.

Explications insuffisantes

En effet, les réponses du MPC n’ont pas permis de déterminer quelles démarches ont été entreprises par Patrick Lamon en Ouzbékistan. Le MPC a expliqué que le voyage avait pour but “de clarifier, dans le respect des normes imposées par le droit suisse, la situation, notamment sous l’angle de l’entraide judiciaire et des droits de la défense”.

Un but qui, selon les juges de Bellinzone, n’est pas sans rapport avec Mme Karimova. Cette dernière, qui était assignée à résidence en Ouzbékistan, a été remise en prison en mars dernier. La Cour des plaintes estime que cette détention “dans des conditions opaques” semble découler, sinon de la procédure menée en Suisse, tout au moins de sa filiation avec l’ancien président ouzbek.

A mi-mars, le Tribunal pénal fédéral a annulé la décision du MPC de vendre trois voitures de luxe appartenant à la famille Karimov. Il a estimé que cette grave atteinte à la garantie de la propriété n’était en rien urgente puisque le MPC a séquestré les clés de ces véhicules en 2013 déjà. Depuis, ceux-ci sont restés à l’abandon dans la propriété Karimov à Cologny (GE).

Blanchiment

En juillet 2012, le Ministère public de la Confédération (MPC) a ouvert une instruction pénale à l’encontre de l’assistante personnelle de Mme Karimova et du directeur général de la filiale ouzbèke d’une société russe de télécommunications, pour soupçon de faux dans les titres et blanchiment d’argent.

La procédure a ensuite été étendue à deux collaborateurs de Mme Karimova, à Mme Karimova elle-même ainsi qu’à son ex-époux. Dans le cadre de cette procédure, le MPC a bloqué plus de 800 millions de francs appartenant à Mme Karimova et à son entourage.

Le MPC a prononcé en mai 2018 deux premières condamnations sous forme d’ordonnances pénales à l’encontre de l’ex-mari et de l’ancienne assistante de Mme Karimova, assorties d’une confiscation d’un montant équivalent à 685 millions de francs. Le défenseur de Mme Karimova a fait recours et formé des oppositions contre les ordonnances pénales et de confiscation du MPC. (décision BB.2018.195 du 3 avril 2019)

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